Les centres d'appels en France, c'est du passé ?
Episode 4 : les centres d'appels en France, c'est du passé ?
Le point de vue d'un entrepreneur du secteur et pas n'importe lequel, Charles-Emmanuel Berc.
« Il y a plus de contraintes à exécuter le métier d’entrepreneur dans les centres d’appels en France que de plaisir. Et c’est la même chose pour le collaborateur qui y travaille ». Rencontre avec Charles-Emmanuel Berc, fondateur de VIPP.
Et dans les deux cas, c’est malheureux. C’est une opportunité pour le continent africain. La confession et la vision inspirée de l’un des plus brillants et serial entrepreneurs du secteur : CEB, l’un des seigneurs des plateaux.
En-Contact : Voilà trente années que tu exploites, crées des CRC (centres de relation client) dont certains ont été parmi les plus innovants, en termes de gestion sociale, de typologie de secteurs pour lesquels tu as travaillé ou d'efficacité. Vipp continue d'être en sus un acteur performant sur des opérations d'acquisition, en télévente ou téléprospection. Imaginons que tu gères encore un ou des centres de contacts en France, à quoi ferais-tu attention, quelle serait ta préoccupation majeure ?
Charles-Emmanuel Berc : Soyons lucides. Travailler dans un centre d’appels en France ne fait plus rêver personne. Quand j’ai commencé dans ce métier il y a plus de 30 ans, le centre d’appels était un tremplin : on y entrait en faisant ses études ou en premier emploi. On jouait un rôle d’insertion. Le cadre juridico-légal était souple et tout le monde y trouvait son compte : le salarié tout d’abord, qui avait des conditions adaptables pour travailler. L’outsourcer, qui employait des ressources qualifiées pour une durée déterminée, qui pouvait être reconduite, plusieurs fois, ce que tout le monde acceptait. Le donneur d’ordre enfin, qui bénéficiait de personnes engagées à défendre sa marque. Aujourd’hui, le système a dénaturé l’essence de ce métier : il y a plus de contraintes à l’exécuter que de plaisir à le pratiquer, y compris pour le collaborateur ! Le centre d’appels localisé en France doit retrouver son rôle de tremplin, de passerelle. Il faut que chacun accepte que ce métier puisse être un passage pour se socialiser, débuter dans la vie active, faire ses armes. C’est d’ailleurs ce que nous faisons à Anteuil, notre seule implantation en France, chez Vipp et Philippe.
Tu as tout quitté, vendu, pour installer Vipp en Afrique subsaharienne, qu'as-tu pu y faire qui te semblait impossible en France, dans ce même métier ?
En Afrique, j’ai retrouvé cette énergie brute et pure, cette envie d’apprendre, de s’installer dans la vie, cette joie de vivre qui nous manque parfois ici… et la simplicité de dire les choses telles qu’elles sont, toujours avec courtoisie et bienveillance. Le terreau est constitué de gens talentueux tout juste sortis de l’université, la tête bien faite, bien décidé à montrer au monde que l’Afrique et leur pays comptent. Chez Vipp, on leur apporte le cadre pour exprimer tout ça, dans des conditions propices au développement personnel et un cadre certifié « Best Place to Work ». C’est cette rencontre des ambitions de nos recrues et de notre politique RH qui a rendu possible ce que tout le monde pensait impossible : délivrer depuis l’Afrique subsaharienne un haut niveau de prestation à un coût maîtrisé.
Tu es toujours très présent sur les plateaux, impliqué et une partie de l'équipe qui t'accompagne est la même depuis longtemps, qu'est ce qui explique cela ?
Oui, je suis toujours présent sur les plateaux parce que j’aime ça ! Le plateau, c’est la vie, c’est là où tout se passe, où l’on sent les ambiances et où l’on appréhende la vraie relation client. C’est aussi l’endroit où je suis vraiment accessible pour les conseillers, ou ils me voient tel que je suis, et où je suis à l’affut des comportements qui démontrent des potentiels d’évolution.
Il est vrai que l’équipe qui m’accompagne est là depuis longtemps. Pour qu’une personne “s'installe” durablement dans mon entourage, c’est soit parce qu’elle a une technicité rare, soit parce que nous avons, l’un envers l’autre un respect et une loyauté sans faille. Dans l’entreprise d’aujourd’hui, ces 2 qualités sont fondamentales et constituent le ciment de la relation, selon moi.
Le call center à la Papa is dead, vive le new call center. De quoi, de quelles technos, outils, nouvelles pratiques sera t'il équipé et pourquoi ?
Aujourd’hui, bien qu’elle se renouvelle peu, la technologie n’est plus un sujet. Elle est au service de la performance et est adaptée à nos usages. En revanche, l’état d’esprit inculqué dans le secteur au début des années 2020 a voulu nous faire croire que le talent n’était rien par rapport au processus. L’essor des plateformes pour la téléphonie mobile et internet ainsi que le e-commerce ont permis à des opportunistes, qui pouvaient être brillants, de saisir l’occasion de créer un business florissant. Or ce métier, c’est avant tout faire vivre et perdurer une relation agréable entre 2 individus. Au-delà de la relation du conseiller à son client, cela se transpose dans la relation conseiller – employeur. Cela suppose communication, bienveillance et transparence. L’entreprise moderne est connectée et les circuits d’information et de communication, s’ils n’ont pas été anticipés par le dirigeant, lui échappent complètement. Dans ce cas, l’entreprise devient ringarde, d’un seul coup. Le call center à la Papa est donc mort, vive le new call center !
Par la rédaction d'En-Contact
La fin des Call Centers à la Papa
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• Épisode 4 : Les centres d'appels en France, c'est du passé ?
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