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SP2C : Les centres de contacts français ont leur « Medef »

Publié le 03 juillet 2019 à 14:21 par Magazine En-Contact
SP2C : Les centres de contacts français ont leur « Medef »

40 ans après sa création, le syndicat du marketing téléphonique a changé de nom mais pas d’ambitions : il était réuni ce matin dans une Tour de La Défense, pour la remise de la 3ème étude sur les centres de contacts, quasiment un rapport de la cour des comptes du secteur et à l’invitation du cabinet de conseil qui la réalise pour son compte : E/Y. Qu’a-t-on appris de réellement nouveau, qui réconforte ou qui frustre ?
En-Contact vous livre quelques pistes, en photos et chiffres.

Le réconfort

Manuel Jacquinet devant la Smiley Box – © Emil Hernon

Le SP2C est le nouveau nom depuis quelques années déjà du syndicat créé voici quarante ans par l’une des « grandes gueules » du secteur (du nom de l’émission à laquelle elle a longtemps participé sur RMC avant de s’en faire évincer) : Sophie de Menthon. Il est donc bien vivant, réunit les plus grands prestataires en relation client externalisée de France et donc du monde et semble une exception mondiale comme l’a précisé ce matin Laurent Uberti de Sitel. « Dans aucun autre pays, un syndicat de ce type n’existe ». Il a décidé récemment de s’ouvrir à des acteurs de mid-market même s’il représente majoritairement des acteurs de taille industrielle. Une société comme ADM Value, qui réalise 50 millions d’euros et salarie environ 3100 collaborateurs n’en est pas membre, Convers l’a été par contre.

Il est vivace, comme l’a rappelé la grande Sophie, après que des Paco Rabanne ont souvent annoncé la mort probable du métier pour différents motifs : les automates d’appels, les SVI (Serveurs Vocaux Interactifs), la prédominance annoncée des bots et de l’IA. Tout ceci n’a pas fait perdre le goût de l’appel et de la conversation aux consommateurs français. La croissance du marché sur lequel ses membres se positionnent n’est pas précisément connue mais la part relative des membres du SP2C semble augmenter. Sur un marché francophone qui a tardé à externaliser, les membres du SP2C s’accaparent une large partie du « gâteau » : 1,8 milliards de prestations sont confiés aux membres du syndicat (sur un marché global estimé à 2,61 milliards d’euros) et le contact téléphonique s’avère représenter la très large partie du canal de contact choisi par les clients finaux (+ de 90%).

Ses membres participent activement à l’apprentissage, à l’emploi et la localisation sur tout le territoire et dans les pays francophones d’emplois pérennes : 3/4 des salariés sont en CDI et pour 30% d’entre eux, « mettre le casque* » et gérer une interaction représente la 1ère expérience professionnelle. De nombreuses études ont depuis démontré que les habiletés relationnelles développées dans le métier de téléconseiller sont un accélérateur de carrière et d’employabilité, idem pour les postes de superviseurs. Enfin, qui a oublié que c’est à Amiens que les premières initiatives de création de plateformes téléphoniques aidées par la région ou une ville essaimèrent (merci Gilles de Robien, Nortel et Éric Dadian). Amiens décidément qui donne à la France un jeune président, un député à la parole libre et un journal indépendant : Fakir ! Puissent les présidents et leurs ministres comprendre que les centres d’appels sont de belles usines, comme avant elle dans la région Goodyear ou Whirlpool.

Vive le papier et la mesure de l’expérience client. 3 tables rondes ont précédé ce matin la remise du rapport papier noir et jaune que le SP2C prend la peine d’éditer et qui a largement été diffusé cette année au sein de l’Assemblée Nationale et des instances où l’on réfléchit au service client. Le choix d’une étude papier, courageux, a participé de la diffusion de celle-ci. Au cours de celles-ci, on a évoqué le marché, le rôle d’arbitre que peut jouer le consommateur, la bonne méthode suggérée pour externaliser, l’importance de l’emploi et du facteur humain. Elles ont réuni quelques-uns des plus grands entrepreneurs de cette industrie, d’hier et de demain, preuve s’il en fallait, que des Laurent Uberti (Sitel), Maxime Didier (Comdata), Dominique Decaestecker (Majorel), Tanguy de Laubier (Bluelink), Denis Akriche (Armatis LC), Vincent Bernard (Webhelp) croient au bénéfice de la rencontre, de leur métier et de la réunion d’une corporation au sein d’un syndicat, malgré la vive concurrence.

La frustration

D’où vient le sentiment alors d’une frustration diffuse après deux heures d’intervention, qui furent rythmées ?

Chloé Beauvallet – © Emil Hernon

Du décalage entre les attentes du marché, celui des clients finaux et ce qui est proposé et exécuté effectivement par les marques. Les interventions courtes de quelques femmes présentes, telles Chloé Beauvallet (BNP Paribas), Sophie de Menthon ou Kim Neyret (Sitel) ont permis de bien comprendre l’état des lieux sur ce marché qui a muté. « L’intention de bien s’occuper du client est là, au point qu’on parle partout d’expérience client et d’émotion. Les indicateurs existent, tels le NPS ou le Customer Effort Score a rappelé l’ex directrice expérience client du PMU ? Qu’attendent les entreprises pour mettre en place les conditions de l’exécution, pour s’engager ? »
C’est au moment où ce type de bonnes questions a émergé que le maitre de cérémonie précis et rigoureux qu’est Patrick Dubreil (désormais président du SP2C) a indiqué, tout en mesure, l’ampleur du chantier qui s’annonce et demeure : faire toucher du doigt au grand public le formidable secteur qu’est celui des centres de contacts, son impact économique et social. Et fermé les bans : il était temps de clôturer la présentation, car c’en fût une, marquée par une forte audience. (Invitée et intervenante, l’AFRC avait semble-t-il battu le rappel : la salle était pleine.)

Resterait à engager, selon nous, une triple conversation ? Entre les marques et leurs prestataires pour inventer de nouvelles formes de mise en œuvre de cette expérience client. Entre les membres du syndicat, sur les moyens qu’ils entendent se donner pour prendre leur place dans le débat public, qui est vitale. Entre le commanditaire de cette étude et son prestataire : peut-être pourrait-on, pour la prochaine fournée, souligner les innovations et belles aventures pour donner envie, plus envie et parvenir, malgré des moyens qui sont encore modestes, à émerger en tant que partenaire incontournable, comme un Medef agile et féminisé ?

Quand le groupe Webhelp fête les 10 ans de sa collaboration avec Bouygues Telecom pour donner du travail à des détenus et permet à plusieurs dizaines d’entre eux de devenir ensuite téléconseiller salarié et diplômé, on dispose d’une preuve, parmi d’autres, que les entrepreneurs du secteur sont prêts, fourmillent d’idées et de courage.

Quand Teleperformance devient le 1er employeur privé de Tunisie et convainc qu’il est une Great Place to Work, c’en est une autre. Bravo à eux. Ils ont 40 ans ou moins pour la deuxième partie du tournoi qui se joue. Combien de temps chantait le suisse Stefan Eicher, combien de temps ?

Par Manuel Jacquinet

NB : On a adoré, dans la tour E/Y, le soin apporté à la mesure de l’expérience client, dans des coins pertinents. Ici en photo, la Smiley Box positionnée dans les toilettes et que nous n’avions pas remarquée l’an passé. Ou qui n’y était peut-être pas ?

*Une expression qui signifie dans le métier prendre des appels, avoir démarré sur le terrain.

Photo de une : Patrick Dubreil, Maxime Didier, Sophie de Menthon, Laurent Uberti et Frédéric Simottel (BFM TV), lors de la conférence ce matin – © Emil Hernon

 

 

 

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