Télémarketing sauvage : la guerre est déclarée
Les procureurs américains (General Attorney) et autorités anglaises ont déclaré la guerre aux scammers (arnaqueurs), bien décidés à stopper ou endiguer le fléau des unsolicited calls, les appels émis et non sollicités via du démarchage téléphonique. Des amendes qui ont parfois atteint les 18 millions de dollars, pour une seule entreprise, n'ont pas effrayé jusque-là les contrevenants.
Letitia James, la procureure de l’état de New York, a déclaré en août aux USA la guerre aux scammeurs téléphoniques, avec une formule qui ne laisse pas de doute quant à ses intentions : « Très bientôt, les arnaqueurs adeptes du démarchage téléphonique n’auront plus qu’un appel à faire, celui à passer à leur avocat ». La General Attorney rejoint la liste, nombreuse, des procureurs de plus de quarante états qui ont décidé de tuer le fléau du démarchage téléphonique non sollicité ou illégal (unsolicited calls). On comprend aisément la vigueur de la bataille grâce aux chiffres suivants : 26 milliards d’appels non désirés ont été émis vers les citoyens américains en 2018, un chiffre en augmentation de 46% par rapport à 2017. Les législations pourtant contraignantes et amendes aux montants stratosphériques n’ont pas endigué le fléau.
Les opérateurs téléphoniques appelés à la rescousse
Aux États-Unis, comme en France, on sait désormais que l’une des pistes consiste à demander le concours des opérateurs téléphoniques qui acheminent les appels, notamment ceux émis depuis des pays lointains où se cachent les contrevenants aux législations qui encadrent le démarchage téléphonique. Ainsi, depuis le 1er août, une nouvelle disposition introduite par l’Arcep est censée réglementer en France un peu les appels téléphoniques de démarchage non désirés et donc tenter de les limiter. Elle intime aux opérateurs téléphoniques de ne laisser passer dans leurs « tuyaux » que des appels dont on sait qui les émet, ce qui devrait diminuer le phone spoofing, ces campagnes industrielles d’appels émises par des robots. Jusque-là, via la présentation de faux numéro, loués pour l’occasion, le commanditaire d’une campagne était difficile à identifier.
Aux USA, même chose : les plus grands opérateurs téléphoniques (ils sont douze dans ce cas) collaborent avec l’administration et se sont engagés à réguler les flux d’appels qui transitent par leurs plateformes, à en vérifier la licéité : AT&T, Verizon, Sprint, T-Mobile, etc.…
Tout ceci sera bientôt complété par une loi encore plus contraignante dénommée pour l’instant : Stopping Bad Robocalls Act qui a passé le stade du congrès.
Poursuivre personnellement les délinquants du télémarketing et non les entreprises qu’ils dirigent, la voie suivie au Royaume-Uni
Au Royaume-Uni, l’organisme de régulation, l’ICO, a légiféré de plus en plus rigoureusement depuis la mise en place des premières listes de protection du consommateur (l’équivalent de notre Bloctel). On estime pourtant que 3,9 milliards d’appels ont été mis par des pondeuses d’appels en 2018, qu’un anglais reçoit en moyenne 90 appels de démarchage par an, soit deux par semaine. Cette nuisance générée dans leur vie quotidienne est déclarée comme la pire par les citoyens britanniques dans de nombreuses études et sondages réalisés chaque année. Deux entreprises ont récemment fait la une des journaux : Smart Home Protection et Making It Easy : les deux commercialisant, comme à peu près partout dans le monde, des services d’installation de matériels de chauffage ou des alarmes anti-cambriolage. Épinglée récemment, Making it Easy avait en effet, sur un seul semestre en 2018, émis plus d’un million d’appels dont 80 % le furent sur des numéros et des lignes pourtant inscrites sur le Telephone Preference Service (l’équivalent de notre Bloctel ou de la Do Not Call List aux USA). L’entreprise s’était vue infliger une amende de 190 000 livres. Mais on a franchi un cap dans l’arsenal juridique pour combattre ces pratiques récemment (fin 2018) : ce sont les dirigeants eux-mêmes qui pourront être poursuivis et non les entreprises en tant que personnes morales car cette disposition a permis à de nombreux dirigeants d’échapper à leurs condamnations. Andy Curry, de l’ICO, a déclaré récemment que « les entrepreneurs hors-la-loi devaient savoir désormais qu’ils seront rapidement poursuivis et que le dépôt de bilan de leur société ne leur permettrait pas de créer un écran de fumée* ».
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Photo de une : Letitia James - crédit © DR
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