Rendez-vous de vaccination: Zaion, Teleperformance, Omni Calculator, le tiercé français qui s’illustre.
Actualisation du 28 Janvier : Toutes les plateformes téléphoniques de France et de Navarre affectées et dévolues aux prises de rendez-vous sont débordées et pas uniquement celle de Teleperformance. Pas un journal télévisé, une émission de radio même, sans qu’on ne voie ou entende des téléconseillères ou secrétaires de mairie, de SDIS, volontaires ou réquisitionnés pour la planification de rendez-vous, dans des centres d’appels hâtivement montés et organisés. Deux entreprises, dont l’une n’est plus une start-up, s’illustrent actuellement dans cette aventure: Zaion, dont les callbots parviennent à gérer les milliers d’appels simultanés qui arrivent sur les standards, SVI et numéros verts. Et Omni Calculator, une entreprise sur laquelle deux ex-étudiants de l’INSA de Lyon ont hébergé un simulateur qui aide les citoyens et particuliers à estimer dans quel délai ils sont susceptibles d’obtenir un rendez-vous de vaccination. Ils y rentrent les données fournies par l’Insee, Santé.fr, les quantités de vaccins disponibles. Pasteur et Sanofi ont un peu vasouillé- ou n’ont peut-être tout simplement pas pris les bonnes options- mais les ingénieurs français n’ont pas dit leur dernier mot. (La forte croissance de Zaion a amené l’entreprise à recruter des chercheurs et ingénieurs en grand nombre, cette année, plus de 25, sur un effectif de 60 personnes désormais )
Le leader mondial des centres d’appels est en place depuis vendredi dernier pour aider à la prise des rendez-vous de vaccination. Mais la plateforme, tout comme le site web santé.fr sont débordés, dans l’incapacité de gérer les flux. Comment expliquer ceci ?
Alors que le Ministère de la Santé avait choisi jusque-là de s’appuyer sur le prestataire Sitel, pour la gestion du numéro vert info Covid 0800 130 000 (voir notre article à ce sujet) il a confié à un autre grand spécialiste français de ce type de services -la prise d’appels pour la gestion de crises- et pas n’importe lequel (Teleperformance, le leader mondial) celui destiné à gérer les informations pour la prise des rendez-vous pour la vaccination. Vendredi 15 janvier, plus de 370 000 appels ont été reçus sur le numéro vert 0800 009 110, on devrait dire présentés sur ce numéro, derrière lequel les équipes ont été bien en peine de gérer et prendre les conversations. En fin de matinée ce lundi 18 janvier, le taux de service s’avérait toujours aussi médiocre. Le nouvel entrant au sein du CAC 40 a-t-il perdu de sa vista ou les contraintes imposées dans le cahier des charges expliquent-elles cet état de fait ?
Volumétries d’appels à traiter inconnues et supérieures aux capacités des prestataires
Comme le précise un des intervenants, bon connaisseur de ces plateformes téléphoniques, c’est tout d’abord la planification et l’estimation des flux par le Ministère qui a fait défaut : « Nous n’avons reçu aucune hypothèse de travail ni de flux et donc le dimensionnement des équipes de téléconseillers à solliciter est quasi impossible. »
Pour le néophyte, il faudrait, à supposer que ce flux d’appels à recevoir soit lissé sur la journée et en partant sur une hypothèse de travail de 25 appels traités par heure et par agent, une force de frappe de 1450 téléconseillers pour être en mesure de gérer correctement 37 000 appels par heure. Or, rares sont les grands prestataires français en mesure de digérer seul ce type de volumes dans le contexte actuel, au regard des capacités qui leur « restent » en France. Pour avoir bien rééquilibré leur modèle offshore/inshore, tous les grands spécialistes de la relation client externalisée disposent désormais de capacités de production qui avoisinent les 5000 postes en France, au maximum. Frédéric Donati, le directeur général de Comdata, nous confirmait, voici quelques jours, que le télétravail mis en place par son équipe technique en France lui avait permis par contre d’augmenter de façon significative ses capacités de traitement pour ce type de marchés. Si l’on comprend aisément que le Ministère impose une réponse apportée par des centres localisés en France, il avait de grandes chances d’être submergé en ne s’appuyant que sur un seul prestataire. Copie à revoir ?
Centre d’appels du 118218, opéré à l’époque par B2S – © DR
Et les callbots, ça pourrait marcher ?
Mais une petite faille apparait tout de même dans le dispositif mis en place et qui aurait pu pourtant “sauver” et le Ministère et son prestataire : n’avoir pas songé à la mise en place d’un callbot de traitement, une sorte d’automate intelligent en capacité de prendre l’appel, de mener la conversation en langage naturel et d’en comprendre le sens, pour aller jusqu’au traitement de la demande. Mis en place par TSC, la filiale de Sitel avec son partenaire Zaion, sur Info Covid justement, la combinaison s’avère remarquablement opérationnelle : le callbot peut venir en soutien des équipes du centre d’appels pour soulager les téléconseillers, mais grâce à une programmation intelligente, ce callbot hybride peut apparaitre en amont du centre d’appels dès lors que le flux d’appels à traiter s’avère excédentaire.
« C’est un peu comme un vélo électrique, lorsque vous êtes en montée, il vient apporter de la puissance supplémentaire pour vous aider à gérer la côte ». L’entreprise, fondée par Franz Fodéré, a mis en place dès le confinement ce type d’outils pour de nombreux acteurs de l’assurance par exemple et toutes les expériences menées ont impressionné les clients.
Teleperformance n’est-il pas en mesure de proposer à son client ce type de dispositif qui embarque de la technologie intelligente ou, restreinte dans sa capacité de préconisation de solutions par le cahier des charges technique* du Ministère, l’entreprise est elle obligée d’assumer un niveau de service dégradé au regard de ce qu’elle produit fréquemment ?
*il impose que l’appel soit traité par un agent humain, ce que n’est pas un agent virtuel tel un voicebot, malgré son grand taux d’acceptation par les appelants.
Un modèle à revoir ?
Joint par nos soins vendredi dernier, un des responsables du Ministère indiquait qu’eux-mêmes avaient été stupéfaits par les capacités du mix: call center + callbot. « Celui développé par Zaion est en capacité de traiter 3000 appels en simultané, soit l’équivalent de la capacité totale en France de Teleperformance, et ce 24H/24. Et il fonctionne parfaitement », indique ce même haut responsable du Ministère.
On s’attend donc à une forte présence et audience en ligne lors du prochain webinar que tiendra, ce jeudi prochain, le spécialiste français et son partenaire Sitel. Planification et callbot, deux modules de formation que les conseillers techniques des différents Ministères vont devoir suivre avec assiduité. Celui dirigé par Elisabeth Moreno est confronté à la même équation : comment gérer quantité d’appels et remplacer le 3919 (voir notre article).
C’est à savoir : Sitel, TSC et leur partenaire Zaion organisent, jeudi 21 janvier 2021, un webinar sur leur offre et les retours d’expérience sur Info Covid, depuis la mi-novembre. Pour s’inscrire, c’est ici.
Les centres qui sont amenés ou ont été amenés, par le passé, à prendre le plus grand nombre d’appels par heure sont ceux des renseignements téléphoniques, du temps qu’ils étaient encore sollicités (voir photo jointe, celui du 118218, opéré à l’époque par B2S, en France et au Maroc). Un agent bien formé pouvait répondre et traiter 42 appels à l’heure !
Last but not least, selon un sondage Elabe réalisé en Novembre 2020 ( pour le compte de BFM Tv ) 4 français sur 10 seulement se déclaraient désireux de se faire vacciner. Les sondages, ça ne sert à rien (tapez 1), Elabe fait des sondages à la va comme je te pousse ( tapez 2) ou … c’est vraiment compliqué de diriger un pays à 400 fromages ?
Par Manuel Jacquinet
Photo de Une : Teleperformance, Byron Kemby, conseiller client sur le centre d’Asnières – © Emil Hernon