Les prestataires de SFR en centres d'appels au régime maigre
SFR veut réduire ses coûts – et les prestataires en centres d’appels sont en première ligne. Mais l’opérateur peut-il vraiment imposer ses choix ?
Depuis que Patrick Drahi a pris le contrôle de l’opérateur SFR, tous les moyens sont bons pour réduire les coûts. Les inquiétudes concernant les conséquences de cette politique dans les centres d’appels des prestataires de l’opérateur télécom ont été ravivées par un communiqué émis par les fédérations CGT des télécommunications (FAPT) et des sociétés d’études. Représentant le personnel des prestataires, ces syndicats n’hésitent pas à annoncer que 3 000 emplois seraient menacés par des ruptures de contrat à l’initiative de SFR.
Les syndicats vont jusqu’à donner les noms des prestataires concernés : « Les premières lettres de résiliation de contrat viennent d’être envoyées au groupe Arvato et à Sitel, mais d’autres devraient suivre et concerner les entreprises b2s et Teleperformance, ainsi que les autres prestataires travaillant pour SFR », peut-on lire dans le communiqué.
Interrogé par l’AFP, SFR parle de « décroissance naturelle de l’activité depuis plus de deux ans » et d’une diminution « nombre d’appels passés aux “call centers” » de SFR de « 30% sur les deux dernières années » au profit du digital et des applications, les consommateurs privilégiant selon lui les échanges en ligne et les applications dédiées via leur smartphone ou leur tablette.
Un « proche du dossier » cité par l’AFP réfute l’information selon laquelle les contrats avec ces prestataires seraient résiliés, mais qu’il « a été décidé de les prolonger d’un an, à juillet 2017 ».
La CGT, elle, appelle à la grève le 9 avril.
Quel prestataire a le plus de soucis à se faire ?
Selon nos informations, la part d’un client tel qu’SFR dans le chiffre d’affaires de la filiale française un outsourceur tel que Sitel se chiffre en dizaines de millions d’euros, soit plus de 50%.
Chez Arvato, Teleperformance ou b2s, sociétés dont le chiffre d’affaires dépasse les 100 millions d’euros et dont le portefeuille clients est plus diversifié, l’impact serait plus marginal, même s’il resterait sensible.
De par l’importance du chiffre d’affaires généré par le client SFR, et même si ce prestataire a été acheté par Acticall, Sitel semble être le prestataire le plus exposé à de telles ruptures de contrats.
SFR sera-t-il en mesure de se séparer de ces prestataires sans affecter sa capacité à gagner de nouveaux clients ?
Une chose est sûre, SFR continue de perdre des clients et veut enrayer cette baisse. Alors où trouver les ressources nécessaires, si on se sépare de ses prestataires ? Jusque là, la volonté de l’opérateur jusqu’à présent de disposer de capacités alternatives de production en service client à l’offshore n’a pas été complètement couronnée de succès. Vu le faible nombre de pays proposant des ressources francophones disponibles, qu’il est possible de former rapidement, une vague de délocalisations semble peu probable. Ainsi, Madagascar a été longtemps considérée comme une destination possible – et l’implantation de nouvelles capacités de production sur place vient de se matérialiser. Mais les volumes restent insuffisants.
SFR est-il aujourd’hui suffisamment en position de force pour imposer ses choix à ses prestataires ?
Les prestataires de centres d’appels ont bien changé. Jadis pieds et poings liés aux commandes des opérateurs télécom, qui a longtemps représenté près de 60% de leurs revenus, ces prestataires ont réussi à diversifier leurs clientèle et activités. Suite à un mouvement de concentration ayant affecté le secteur, les sociétés auxquelles font appel les opérateurs télécom tels qu’SFR pour prendre en charge une partie de leur service client sont désormais soit des sociétés cotées, soit financées par des fonds puissants. Parallèlement, le tsunami Free est déjà passé par là, et les a obligés à consolider leurs business models. Preuve en est que ces rapports de force ont évolué : plusieurs prestataires ont préféré refuser les baisses de tarifs demandées par SFR ces derniers mois – pouvant aller jusqu’à 35% ! -, plutôt que de continuer à travailler avec l’opérateur.
Seul le franco-marocain Intelcia aurait, selon différentes sources, accédé à la demande de SFR de baisser ses tarifs, en contrepartie d’un volume d’activité supérieur.
Mais c’est aussi le plus petit des prestataires principaux de SFR.
Dans le secteur des centres d’appels comme ailleurs, size matters.