«L’ACPR ne dispose d’aucun pouvoir normatif. Et ils sont d’une incompétence notable»

Me Lionel Lefebvre et un second juriste spécialiste de l’assurance et du démarchage téléphonique dénoncent les insuffisances de l’ACPR, gendarme de l’assurance.. fort en gueule mais peu rigoureux dans ses contrôles et ses affirmations, selon différents experts du secteur.
En date du 15 septembre, L’ACPR a envoyé aux assureurs et courtiers, un courrier qui a déclenché une mini panique dans le secteur. Il laisse croire à l’illégalité du démarchage téléphonique et de la souscription de contrats d’assurance, dès lors qu’ils seraient conclus au Maroc ou en Afrique du Nord où quantité d'entités de téléprospection, de call-centers et de succursales sont installés. Un spécialiste du secteur et un avocat expert du secteur de l’assurance dénoncent l’improvisation et le manque de rigueur de cette prise de position et plus généralement des services qui organisent les contrôles au sein de l’Autorité de contrôle.

Avocat spécialisé du secteur de l’assurance, Lionel Lefebvre ( Orid Avocats) explique pourquoi le courrier en question aurait dû rester dans la bannière de l’ACPR, tant il contient un mélange de constats et d'affirmations érronées :
"L’ACPR ne dispose d’aucun pouvoir normatif et ne peut considérer comme illégale des opérations considérées comme licites. Si elle venait à sanctionner des courtiers sur le fondement de qu’elle indique dans le courrier, elle serait retoquée par le Conseil d’Etat, sur recours
Le recours à des succursales pour distribuer des contrats d’assurance est parfaitement possible dès lors que la supervision de ces succursales est effective.
Parler et évoquer d’abus signifie bien qu’il existe un droit de recourir à des succursales offshores"
Un second spécialiste du droit, qui désire rester anonyme, conforte la position de l’avocat associé :
« Le secteur de l’assurance et du courtage n’est pas peuplé que de gens honnêtes, il y a même un grand nombre d’escrocs, de gens peu regardants, qui vendent des assurances inutiles ou pour des risques déjà couverts ou qui vendent avec des méthodes illégales. Il faut donc qu’il y ait une police et des sanctions, personne ne le conteste. Et cette police, c'est l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

Mais l’ACPR a démontré ses insuffisances et son incapacité à faire des contrôles ou à faire peur. S'il y a tant de prestataires qui agissent hors des clous, c'est précisément parce que l'ACPR, la police du secteur, est défaillante.
La SFAM et les escroqueries d’Indexia n’ont jamais été relevées, Pascal Evrard, de Viva Assurances a été sanctionné en 2012 mais continue d’opérer, par exemple. C’est probablement parce qu’elle veut faire croire qu’elle surveille les entreprises du secteur que ce courrier et ces mises en demeure surgissent maintenant.
Le problème de l’ACPR est l’incompétence et le manque de travail ou de moyens de ses équipes. Pour avoir été en réunion parfois avec les brigades de contrôle, j’ai été stupéfait de leur ignorance.
Le courrier que vous évoquez avait été émis en juillet puis retiré de leur site. On a pensé alors que l'ACPR avait compris son manque de rigueur. Il est réapparu mi-septembre, et mélange tout.
Il faut encadrer la distribution d’assurances et reconnaitre l’utilité du canal de vente à distance, qui permet d’avoir accès à des tarifs moins onéreux pour un contrat »
Un policier qui poursuit les gentils et laisse filer les escrocs ?
Jointe par nos soins, l’ACPR n’a pas désiré ou pu répondre à nos demandes d’éclaircissement : son standard se borne à vous mettre en relation avec des interlocuteurs apparemment aux abonnés absents.
Jointe à trois reprises depuis hier, Nathalie Aufauvre, sa secrétaire générale est également injoignable.
Depuis le courrier du 15, qui a été largement commenté lors des Journées du Courtage, une autre réunion a eu lieu, sans qu'on sache ce qu'il en est sorti.
“Un sujet plus grave résulte de tout ceci, complète Me Lefebvre : les assureurs et courtiers qui sont vertueux et respectent les règles se retrouvent désavantagés : respecter les procédures, s’équiper par exemple d’un contrôle de la conformité des ventes avec un système de speech analytics renchérit le cout d’acquisition d’un client. Au contraire, les courtiers borderline ne se préoccupent pas eux de se mettre en conformité”.
La rédaction d'En-Contact.