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Call-centers. Pourquoi je quitte le Cameroun, pas l'Afrique. Charles-Emmanuel Berc

Publié le 23 janvier 2025 à 11:00 par Magazine En-Contact
Call-centers. Pourquoi je quitte le Cameroun, pas l'Afrique. Charles-Emmanuel Berc

Vipp-Interstis, l’un des spécialistes télévente, service client les plus reconnus depuis trente ans, a récemment revu son empreinte en Afrique subsaharienne. Son fondateur, Charles-Emmanuel Berc, nous explique pourquoi. 

Charles-Emmanuel Berc, qui êtes-vous ? 
J’ai fondé et je dirige un opérateur français de BPO et d’expérience  client externalisée dont les centres d’appels sont basés en Afrique. Nous avons été les premiers, quatre ans avant Sitel/Foundever, Teleperformance ou Webhelp/Concentrix, à nous installer sur ces destinations, dès 2010. Notre conviction, qui n’a pas bougé, est que l’Afrique est le continent de demain. Nous pouvons y apporter des opportunités de développement, contribuer à l’émergence de ce continent car nous sommes convaincus que la plus grande richesse de l’Afrique, ce sont les africains et notamment les jeunes diplômés. Nous sommes soucieux de notre impact social et tous ceux qui me connaissent savent quelle importance j’y accorde. Je suis personnellement attaché à mes collaborateurs locaux avec qui on construit une histoire. 

Charles-Emmanuel Berc

Vous adaptez aujourd’hui votre cartographie et réduisez vos capacités au Cameroun, pourquoi ? 
Nous avons commencé nos activités au Cameroun, et sommes aujourd’hui présents dans trois autres pays : le Bénin, le Togo et le Rwanda. Au total, nous salarions en Afrique plus de 3000 collaborateurs. Nous entretenons partout des relations nécessaires et régulières avec les administrations fiscales et sociales de ces pays, dont nous attendons un cadre lisible, transparent, stable et équitable. 

Certains événements, survenus ces deux dernières années, nous ont conduits à revoir nos risques et à diminuer significativement notre exposition au Cameroun. Nous y avons dans un premier temps réduit nos effectifs de 1 500 à 200 salariés, puis Interstis Cameroun a cessé ses activités, fin octobre 2024. Par ailleurs, la responsabilité de nos entreprises qui s’implantent sur ces zones est de porter les valeurs RSE, sur lesquelles nous nous engageons d’ailleurs avec nos clients, en matière de droit du travail, de lutte contre les discriminations et la corruption.

Certains anciens salariés se plaignent que vous n’ayiez pas respecté les conditions de rupture de leur contrat. 
Ceux qui me connaissent savent à quel point je suis attaché au respect de la valeur travail et au respect de mes collaborateurs. C’est une des composantes, non négociables, de l’ADN du groupe auquelles je tiens. J’ai fermé Interstis Cameroun à regret. Un reclassement a été proposé à tous les salariés sans exception, auprès d’une entreprise partenaire avec laquelle nous avons négocié la compensation des droits des salariés.  

D'anciens collaborateurs d'Interstis Cameroun vous qualifient d'esclavagiste sur Linkedin, un réseau professionnel consulté. Comment réagissez-vous ?

Je suis un grand fervent de la liberté d'expression. Cependant, ces contenus sont offensants et ne reflètent pas la réalité. Les réseaux sociaux ont leurs règles. L'entreprise et moi-même avons notifié à Linkedin ces contenus diffamatoires. Par respect pour les nombreux collaborateurs de Vipp impliqués dans leur travail, je ne peux pas laisser utiliser ces termes. 

Le magazine En Contact #134

Croyez-vous encore dans le développement des métiers du BPO en Afrique ?
Plus que jamais ! Notre responsabilité est de construire des relations durables et socialement responsables. Un jour peut-être, si le contexte des affaires redevient lisible et transparent, nous reviendrons au Cameroun. Pour l’instant, nous consolidons nos positions au Bénin, Togo et Rwanda, avec intensification de nos lignes de BPO et d’IT BPO. Nous stabilisons nos effectifs au Bénin à 1 500 collaborateurs et intensifions nos recrutements au Togo. Le Rwanda se positionne sur les prestations IT BPO anglophones.

Avec l'arrivée de l'IA générative, l'efficacité moindre de l'acquisition par téléphone, croyez-vous encore à l'avenir de ce métier ? 

Nous sommes l'un des partenaires de grandes marques les plus reconnues et avons toujours plaidé pour un exercice vertueux du démarchage à distance et de l'expérience client. L'IA va trouver petit à petit sa place dans nos métiers, au service de la performance du téléconseiller. Les services client à valeur ajoutée, l'acquisition 2.0 multicanale, la modération vertueuse des contenus, la digitalisation des parcours client avec une combinaison harmonieuse technologie/ humain, sont les sujets sur lesquels nous investissons massivement.  Ces lignes de business sont l'avenir de notre métier. 

Un entretien réalisé par Manuel Jacquinet.

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