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Les américains ont reçu 48 milliards d’appels chez eux en 2018. Que va faire Joe Biden ?

Publié le 24 novembre 2020 à 10:28 par Magazine En-Contact
Les américains ont reçu 48 milliards d’appels chez eux en 2018. Que va faire Joe Biden ?

Quel est le point commun entre Daniel Julien (CEO Teleperformance) et Adrian Abramovitch ?
Les deux habitent en Floride, près de Miami, ont de belles maisons, ont fait fortune au téléphone mais… l’un des deux est en prison. Les sales men salariés de Teleperformance émettent des appels légaux, presque toujours* tandis qu’Adrian les a remplacés par des robocalls.  

Le contexte : Les citoyens américains ont reçu chez eux 48 milliards d’appels en 2018. Les robots d’appels, qui en émettent plus de 100 millions par jours sont les criminels les plus hais et les plus impunis. Un sénateur parle de fléau de civilisation.
La story : sur la piste des Robocalls : comment un enquêteur, associé à ex-modérateur chez Trip Advisor, est parvenu à faire arrêter Adrian Abramovitch.

Un voyage offert, l’appât

Quand Brad Young arrive chez TripAdvisor, en octobre 2015, il trouve un mail d’alerte de son boss : l’épouse de son patron a reçu une invitation à prendre des vacances offertes par Trip Advisor, elle est censée avoir accumulé des points, d’après l’automate d’appels. Super nouvelle, si la compagnie avait seulement et effectivement mis en place un tel système de fidélité ou de cash back… Mais rien de tel n’existe chez Trip Advisor, qui de plus, n’utilise pas de robots de télémarketing.
Voilà donc du travail pour l’équipe antifraude, chargée de combattre les déceptions qu’Internet risquait de causer à ses clients. Le hic, c’est que la femme du patron en était restée au téléphone à touches. Trouver le bug allait nécessiter des capacités inhabituelles. Mais Brad avait son idée sur qui saurait y faire. Fred Garvin, l’oiseau rare, avait rejoint l’équipe antifraude après avoir bossé dans la radio et la mécanique. Il était tombé sur un poste de modérateur chez TA, poste basé à domicile. Rapidement, ses supérieurs avaient remarqué l’obsession qu’il mettait dans ses recherches. Enfant, avant qu’internet n’existe, il parvenait déjà à trouver les adresses des célébrités, pour leur demander des autographes.
Quand Young a confié la mission à Fred, il imaginait que cela ne prendrait pas longtemps. Fred n’avait qu’à appeler pour voir qui était au bout du fil. Pour sa part, Fred Garvin s’était peu intéressé au harcèlement téléphonique avant. Les automates d’appels faisaient partie du paysage des années 80, depuis que quelqu’un avait relié un radiocassette et un téléphone. A l’ère analogique, le hardware était bringuebalant, coûteux et compliqué. Il fallait rembobiner les cassettes, les bandes cassaient parfois. Puis la technologie avait progressé, et, début 1990, les Américains en avaient eu assez du télémarketing qu’un sénateur, Fritz Hollings, avait même qualifié de fléau de la civilisation.

Il est à l’origine de la loi de protection des consommateurs au téléphone. Il a fait part au Sénat de son expérience personnelle : ces appels le réveillaient le matin, interrompaient son diner, forçaient les malades et les personnes âgées à sortir du lit, jusqu’à ce qu’ils soient à bout de nerfs. La loi a été promulguée en 1991, limitant les heures et les modes d’appel, sur les lignes fixes. Les portables faisaient l’objet d’un traitement spécifique.
Vingt ans plus tard, l’Internet, les données bon marché, le protocole VoIP et la déréglementation du secteur téléphonique ont changé la situation, tant du côté client que de celui des automates d’appels. Même des sociétés ayant pignon sur rue ont recours à ces méthodes de marketing de masse à prix réduit. Sans surprise, les gens se sont plaints. En 2009 la FCC, la Commission fédérale du commerce a passé une loi qui interdisait d’utiliser des messages préenregistrés, sauf pour les campagnes politiques, les œuvres de charité et le recouvrement de dettes. La loi a vite été dépassée. Désormais, une personne bien équipée peut passer des millions d’appels par jour en louant des serveurs, et en payant un fournisseur de voix sur IP pour les diffuser. Certains programmes sont en open source, et les fournisseurs de VoIP offrent un mois de service gratuit pour attirer le chaland. N’importe qui peut trouver en kit des automates d’appel.
Ce n’est pas cher, 0,6 cents la minute, si quelqu’un décroche. Des intermédiaires sans scrupules promeuvent les appels terminés dès qu’un interlocuteur décroche, ce qui dans le jargon désigne les automates d’appel. Ajoutons que les listes de numéros de clients sont également faciles à trouver. Chacun peut s’improviser automate d’appel, relève Ian Barlow, chargé du dossier à la FCC. « C’est facile, peu coûteux, et il n’y a pas de barrière à l’entrée ». Une fois le logiciel programmé pour savoir qui appeler et quand, l’automate n’a besoin de personne le matin pour démarrer. Avec cette technologie, les harceleurs sont devenus quasi indétectables.

C’est à savoir

Les États-Unis sont submergés d’appels non sollicités : d’après YouMail, un fabricant de logiciel bloquant les appels automatiques, les Américains ont reçu 47,8 milliards d’appels en 2018. Soit près de 200 par an par adulte. Les plaintes à ce sujet sont courantes à la FCC, et cela va en croissant, malgré les lois passées pour endiguer le flot. Avec quelques 100 millions d’appels émis par jour, le robot d’appel devient le criminel le plus haï, souvent impuni.
En Europe, des législations interdisent, dans quelques pays, l’usage de ces robots et les opérateurs télécom sont en France en charge d’identifier les réels commanditaires des opérations de télémarketing.

 

Source : On the trail of the Robocall King. Wired.
*malgré ses efforts et une direction de la sécurité et compliance étoffée, le leader mondial des centres de contacts s’est trouvé impliqué, contre son gré, dans différentes affaires de vol de données au cours de son histoire. Le président Nicolas Sarkozy en fit les frais en 2008 (abonné de Canal+, la chaine câblée qui avait un centre d’appels outsourcé, a subi un vol de données clients commis par un employé de Teleperformance) ; l’opérateur AT&T a subi également des vols de données commis dans des centres de TP localisés en Amérique du Sud. 

 

 

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