Un prêt public pour développer des centres d’appels au Maroc
Daniel Rosenweg | Publié le 20.12.2012 sur Le Parisien
La principale association d’informaticiens dénonce un prêt accordé par le gouvernement à une zone franche de Casablanca accueillant des activités de service.
De l’argent du contribuable dépensé pour créer des emplois… au Maroc. A l’occasion d’une visite au Maroc, le 12 décembre, Jean-Marc Ayrault, accompagné notamment d’Arnaud Montebourg, a signé 13 conventions de partenariat, dont l’une commence à faire beaucoup de bruit en France. Elle concerne un prêt de 150 M€ destiné à financer des zones d’activités accueillant, notamment, des centres d’appels et des services informatiques délocalisés.
Sur cette somme importante, versée par l’Agence française de développement (AFD), 100 millions sont notamment destinés, selon le communiqué officiel, à la seule zone d’activité de Casablanca. Dénommé Casanearshore et s’étendant sur 53 ha boisés, ce site, qui emploie plus de 20000 personnes, s’est spécialisé dans l’accueil des activités de service dits délocalisables vers les pays à main-d’œuvre bon marché (l’offshoring). Cent multinationales y sont implantées. On y trouve ainsi des centres d’appels d’opérateurs de télécoms français, dont celui de Free (TotalCall), des services d’informatique délocalisés ou encore des filiales d’enseignes telles que le Crédit agricole, BNP Paribas, Axa…
« M. Ayrault et M. Montebourg sont-ils tombés sur la tête?» s’emporte Régis Granarolo, président de l’Association professionnelle des informaticiens, pour lequel cette convention est un encouragement à la « re-délocalisation ». Il rappelle que « 36000 informaticiens sont au chômage en France, avec une hausse de 16% sur les six derniers mois », et menace d’une « mobilisation nationale ».
Délocalisation du secteur tertiaire français
Expert en relation client et auteur d’une proposition visant à créer 15000 emplois en France dans les centres d’appel, Manuel Jacquinet a adressé, hier, une lettre ouverte à Laurent Fabius (ministre des Affaires étrangères) et Pierre Moscovici (ministre de l’Economie) qu’il soupçonne « d’avoir décidé que la priorité était… de favoriser encore plus la délocalisation des deux industries tertiaires qui créent le plus d’emplois depuis des années ».
Cette initiative suscite d’autant plus la colère des professionnels que le gouvernement a vigoureusement invité cet été les prestataires à relocaliser en France leurs centres d’appels basés à l’étranger. Alors, nouveau couac gouvernemental? Interrogé, Matignon renvoie la balle à Bercy, dont dépend l’AFD. Mais au ministère de l’Economie, comme à celui du Redressement productif, nos demandes sont restées sans réponses.