Tu seras un bon à rien. Le savoyard John Cochet embarqué à l'insu de son plein gré par Amazon
Goûte à la tarte aux fraises John, sinon comment tu sauras si tu aimes ? John Cochet se souvient dans son livre, sorti le 24 septembre, de ce conseil de sa mère et d’une autre parole, souvent entendue dans son enfance: Tu seras un bon à rien. Il ne faut pas toujours écouter ce qu’on vous dit, prédit ni croire ce que raconte Amazon, pas effrayé par une pratique commerciale trompeuse.. de plus.
Plus de cent personnes sont annoncées ce soir à La Traboule, un lieu connu des chambériens, pour la découverte et la dédicace, en avant-première, du livre d’un charpentier de La Féclaz, John Cochet. Tu seras un bon à rien, la vraie histoire de John Cochet, édité par Malpaso-RCM, raconte le parcours détonnant, au départ cahotique, d’un gamin du Biollay, un quartier difficile de Chambéry. « J’ai attendu vingt ans pour faire l’amour avec une fille, je crois qu’on s’est rendu service mutuellement, d’ailleurs ». Furieusement décidé à embrasser son destin, le dyslexique va faire son miel de nombreuses rencontres, emplois, expériences pour finir patron d’une entreprise de charpente et rénovation, appréciée jusque dans les châlets luxueux de Val d’Isère. Il aura aussi tenu des restaurants, testé à Saint Tropez les premiers matériels de saut à l'élastique. Que Johnny Halliday, rencontré sur place, ne voulut pas essayer.
Mais ce que livre a d’unique, raconte un lecteur qui l’a déjà dévoré, « c’est que son auteur décrit le quotidien d’un petit patron du bâtiment en France : Qualibat, les banquiers qui doivent être voyants puisqu’ils savent précisément à qui il faut accorder un prêt, les dossiers interminables de subvention pour les travaux de rénovation énergétique. Et l’impact de tout ceci sur la vie de famille. Malgré cela, on rigole, car c’est surtout très drôle »
“J’ai voulu écrire ce livre comme si je devenais prof à Stanford Chambéry, dans un MBA qui s’appellerait : réussir à ne pas se suicider, quand on est artisan ou patron d'une TPE, sourit le quinquagénaire. Fatigué de monter sur les toits, de passer des heures à remplir des dossiers de renouvellement pour RGE et Qualibat, John va se lancer dans la formation des jeunes et des artisans. Les jeunes que je reçois en apprentissage, ils écoutent les paroles des chanteurs de rap, pourquoi ils n’écouteraient pas des anciens ?”
Les pratiques commerciales trompeuses d’Amazon
Fidèle à son habitude et à ses pratiques commerciales trompeuses, Amazon, qui n’a aucun exemplaire en stock du livre, fait croire que ce dernier est en vente sur son site web (voir photo de une) « Ils m’ont déjà fait le coup avec Je m’appelle Frank Colin, j’ai organisé l’affaire Air Cocaïne, » indique l’éditeur des deux ouvrages, Manuel Jacquinet. « Ils piquent la photo de couverture, le numéro d’ISBN et opèrent une captation de trafic. Mais si vous passez commande, à la fin du tunnel d’achat, la réponse est: livre épuisé. »
Il ne faut pas toujours écouter ceux qui vous voient mal finir, ni croire la homepage ou les annonces d’Amazon. Dans son livre passionnant, Amazon confidentiel, Dana Mattioli décrit les nombreux écarts, vols dont le géant américain s'est rendu coupable, pour assoir sa domination, racheter à vil prix des entreprises dont il avait tué le modèle et siphonné le fichier clients. Un livre ultra utile si vous vous apprêtez à ouvrir une boutique sur Amazon.
La maison qui se construit la nuit.
Ici, à découvrir, deux extraits du livre de John Cochet.
Page 63
(..) Mon ami Alain m’embauche à la construction. Je peux toujours compter sur lui. Je vous avais dit qu’il était important dans ma vie. On vit ensemble, on travaille ensemble et on fait la fête ensemble. On est tellement proches que l’on nous prend souvent pour un couple homosexuel.
Un jour, Alain me dit : « Viens, on cherche une maison à rénover ou un terrain pour construire une maison. » On met pas longtemps à trouver une vieille grange sur un plateau magnifique, la Feclaz. Et donc nous voilà partis dans une aventure, un souvenir formidable. Le plus beau souvenir de ma vie après la naissance de mes enfants.
On dépose le permis de construire, on monte un campement : deux caravanes, une cabane en tôle pour les w.-c. et la douche et nous voilà partis à démolir la vieille maison déjà en très mauvais état. Là passe un élu de la commune, qui nous dit : « Vous avez tout démoli ! C’est interdit. Tout mur en dessous d’un mètre est considéré comme inexistant, donc si un voisin veut vous chercher des poux dans la tête, il peut vous faire supprimer votre permis de construire et plus de maison. » Alors là, un grand coup de stress nous envahit, Alain et moi. On se met à accélérer. On se met à travailler très très vite. Jour et nuit. La journée, je prépare les coffrages, je coule et le soir, un copain maçon monte à 17 heures pour nous aider jusqu’à 23 heures. Et tout d’un coup, on nous appelle « la maison qui se construit la nuit ». (..)
Page 65
(..) Ne jamais dire : « C’est pas pour moi. »
Tous d’un coup, j’ai l’opportunité de prendre une gérance d’un bar self tout seul. Il fait quatre cent cinquante couverts par jour, quinze employés, et tout ça par un concours de circonstances. Je postule en sachant pertinemment que la place serait prise mais je voulais quand même tenter. Et ça a marché !
C’est la mairie qui loue cette affaire. Tous les trois ans, le restaurant est remis en location-gérance. Mais il était tenu par le cousin du maire depuis vingt ans. Tous les gens du coin savaient que c’était pas la peine de poser une candidature. Mais moi, rien à foutre. Je vous ai dit qu’il fallait jamais lâcher l’affaire, et je fais ce que je dis. Comme j’avais deux-trois appuis chambériens, je tente. Et un autre John, qui a un restaurant un peu plus bas dans le pays pose sa candidature. On fait ça à la dernière limite le vendredi à minuit. Ouf. C’est très strict, comme procédure, mais on y arrive. Je sais que j’ai aucune chance, mais j’y vais quand même.
Et là, le cousin du maire se tue à la chasse le dimanche. Le DIMANCHE. Un truc de dingue. Et le lundi, tous les pélos appellent la mairie pour poser leur candidature, bien sûr. Mais c’est trop tard. Du coup, il n’y a que deux candidatures pour le self : l’autre John et moi.
Me voilà donc convoqué à un entretien. Les gars de la mairie sont coincés avec deux imbéciles et ils doivent en choisir un pour reprendre le self. Et comme l’autre John était l’Ennemi Numéro Un là-bas et qu’ils voulaient pas le voir débarquer, j’ai eu l’affaire ! Je l’ai gardée pendant trois ans. Comme quoi, il ne faut jamais baisser les bras et ne jamais dire : « C’est pas pour moi, c’est pour les autres », car des fois le destin frappe à votre porte (..)
Ecrit en Savoie, relu à Paris, imprimé en Isère, utile partout. Pour commander le livre, c'est ici, pas sur Amazon :)