Les victimes, nombreuses, de Monogram et Beverly Sonego ont déposé des plaintes pénales

Elles avaient laissé en dépôt des sacs ou vêtements de marques, de luxe, Dior, Chanel, Hermès, Balenciaga, chez Monogram ( By Luxe SAS). Qui n’ont jamais réapparu ou ont été vendus. Mais elles n’ont pas récupéré le produit des ventes. Le liquidateur de l’entreprise, Christian Hart de Keating, leur oppose à ce stade un message bref : il n’y a plus d’argent dans les caisses. Où est passé l’argent, qu’ont fait Beverly Sonego et son équipe dans les jours précédant le dépôt de bilan ?

Liquidée au cours de l'été (la publication en a été faite le 3 aout), la société Monogram (un concurrent de Vestiaire Collective ou Collector Square) et sa médiatique fondatrice auraient multiplié des actes de gestion susceptibles d’être caractéristiques d’escroqueries. Une enquête préliminaire aurait été ouverte par le Parquet. Quatre jours avant la mise en liquidation, la dirigeante acceptait de prendre en dépôt des sacs et objets qui n'apparaissent plus dans les actifs de liquidation.   

L’avocate pénaliste Me Pégand, du cabinet Bati-Juris, saisie par une cliente, a été ensuite sollicitée par de nombreuses victimes des pratiques de la SAS By Luxe, la société qui opérait sous la marque commerciale Monogram ou Monogram Paris. 

Le rappel des faits : en dix ans, grâce à des efforts marketing astucieux, Monogram Paris, un site de revente d’articles de luxe, sacs Hermes, Vuitton, Chanel a réussi à se faire une place non négligeable dans un secteur très concurrentiel. Croyant aux vertus et aux bénéfices de l’omnicanal et bien consciente que le capital confiance est essentiel dans ce secteur, la dirigeante de l’entreprise, Mme Beverly Sonego, avait ouvert une boutique, à Paris, avenue Victor Hugo, Paris 16. Et un stand aux Galeries Lafayette*

Après avoir levé 3 millions d’euros, en 2023, notamment auprès de personnalités du monde des affaires, Monogram s’est développé jusqu’à atteindre les 12 millions d’euros de CA annuel Sans parvenir à être rentable pourtant. Et après avoir tenté d'élargir le spectre des activités de son entreprise. La Monogram Academy, lancée en 2025, se proposait d'aider à maitriser les codes et techniques dans la vente de seconde main, à reconnaître les faux etc. Therealbev ( le nom de Beverly sur Instagram) relayait son intervention d'une heure sur Europe 1. 

En juin 2025, comme nous l’avons relaté, l’entreprise est à court de trésorerie et mandate un intermédiaire pour attirer de nouveaux partenaires. Malgré ces démarches, la société n’a pas survécu à l’été et a été placée en liquidation judiciaire. Le mandataire est le cabinet Sarl Keating.  

Plus de cent victimes à ce jour
De nombreuses clientes de Monogram ont été étonnées alors que le liquidateur leur annonce qu’il n’y avait plus d’argent dans les caisses de By Luxe. Car pour certaines d’entre elles, les ventes des objets confiés avaient été conclues depuis de nombreux mois; elles réclamaient en vain leur dû. Le signe que peut être, le produit des ventes a servi à assumer d’autres dépenses ? 

Pour d’autres dont une ancienne cliente, c’est carrément l’écœurement :  « Je savais que la dirigeante de l’entreprise était déjà très border sur certaines pratiques : elle rappelait des clientes pour leur demander d’accepter un prix de vente de leur sac ou vêtement moins important que le prix convenu. En réalité, elle avait dealé avec l’acquéreur, au prix fixé initialement et elle encaissait donc une commission plus importante. Quelques jours avant la fin des activités, nous ne savions pas que l’entreprise était en difficulté, elle oui. Pourquoi alors a-t-elle accepté des dépôts de pièces qu’elle savait très bien qu’elle ne vendrait pas ? Et si, comme dans mon cas, elles ont été vendues, où est passé l'argent ?

J’ai contacté le liquidateur, il ne répond que par mail et à côté des questions ». 

X. P, une cliente de longue date de Monogram, a été victime des mêmes agissements. Elle a, comme plus d’une trentaine de victimes, déposé plainte contre l’entreprise, dans un commissariat de Paris. L’OPJ qui l’a reçue lui a indiqué que sa plainte venait s’ajouter à des très nombreux signalements. Selon nos informations, une enquête préliminaire a été ouverte au Parquet de Paris.  

Me Sandrine Pégand, du cabinet Bati-juris, a été saisie par XP et est, depuis quelques semaines, sollicitées par de nombreuses victimes de Monogram.

« Il y a manifestement des pratiques commerciales trompeuses, mais également des actes d’escroquerie caractérisés et répétés, selon nous. Les plaignantes ont intérêt à se grouper car les frais de défense et d’actions en justice seront plus réduits. Et, parallèlement, le mandataire judiciaire peut, dans le cadre de l’article 40, faire un signalement au Parquet » complète l'avocate. Sollicité par notre rédaction, ce dernier n’a pas désiré confirmer s'il avait ou non effectué ce signalement. Il indique être tenu par le secret professionnel.

Beverly Sonego s’est vite remise de la chute de Monogram
A la colère, la douleur et le préjudice financier exprimés ou qu’ont subis les victimes, un autre motif de ressentiment s’ajoute, comme l'indique une ex-cliente : « Alors que sur Instagram et les réseaux sociaux, elle s’est victimisée après la liquidation de Monogram, Beverly Sonego continue à proposer des formations, des ventes, des rencontres (voir le visuel de la dernière collaboration proposée par Beverly sur Instagram).

Cette dame est très forte, elle a un culot monstre. Car elle a déjà été condamnée pour des ventes illégales (voir les extraits du jugement rendu par la cour de Cassation). A moins qu'elle ne soit protégée? Son mari, Eliav Sonego, a eu maille à partir avec la justice et a été condamné ». 

Nb: entrepreneur dans le secteur des énergies renouvelables, Eliav Sonego a été condamné dans l'affaire dite des « grossistes d'Aubervilliers », pour blanchiment d'argent. 

Des victimes très motivées, accompagnées par Me Sandrine Pégand
La proposition de Me Pégand de rejoindre une action commune sera certainement appréciée par de nombreuses victimes. « Certaines clientes de Monogram sont des gens fortunés, qui habitent à Dubai, à l’étranger. Elles n’ont probablement pas déclaré leur créance auprès du liquidateur. Mais pour de nombreuses autres, l’acte de vente d’un objet de luxe est motivé par le fait de récupérer de l’argent, de l’argent dont on a besoin », indique XP. 

Unies par ces mésaventures, les victimes ont rejoint et échangent via un compte Instagram dénommé Monodrame. Sur TikTok, Chloé Penel ajoute un point important : "cette liquidation pourrait jeter sur l'industrie de la seconde main un discrédit certain, or des acteurs pratiquent de façon sérieuse. 

La balle est désormais du côté du Parquet. « Si une information judiciaire est ouverte, ça va être très long. Si au contraire, une enquête préliminaire est bien diligentée, les victimes peuvent espérer un traitement plus rapide de leur plainte », précise l'avocate. 

Sac Chanel Deauville rose, Robe Alaia, sac à main Bottega Veneta
Extraits du jugement rendu par la Cour de Cassation. 

« Par ces motifs :
Le tribunal, statuant publiquement par jugement réputé contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe, Condamne la SAS By Luxe à payer à M. [M] [C] la somme de 9.000 euros au titre du sac Chanel Deauville noir et du sac Chanel Deauville doré, cette somme étant augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2023 ; Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ; Déboute M. [M] [C] de ses demandes de restitution en valeur formées au titre du sac Chanel Deauville rose, de la robe Alaia, du sac à main Bottega Veneta, de la ceinture Alaia et de la veste Alaia ; Déboute M. [M] [C] de sa demande tendant à voir condamner la SAS By Luxe à lui payer la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts. »

Les noms des ex-clients et victimes de Monogram ont été anonymisés, à la demande de ceux-ci. 

La rédaction d'En-Contact. 

*Monogram aux Galeries Lafayette

NB: Monogram a un temps possédé un stand de vente aux Galeries Lafayette, le grand magasin avec lequel les relations se sont refroidies. Les rumeurs insistantes de vente de pièces non authentiques s'étaient multipliées. Ci-après la présentation du stand de 50 mètres carrés, toujours présente sur le site web des Galeries Lafayette Haussmann avec la précision obsolete. 

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