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Les stations de ski doivent procéder à des investissements courageux et ciblés

Publié le 19 mai 2020 à 09:52 par Magazine En-Contact
Les stations de ski doivent procéder à des investissements courageux et ciblés

Pomagalski travaille à rendre ses télésièges plus silencieux et rapides. Lyko organise cet hiver le co-voiturage pour se rendre en stations. Payintech pas toujours convaincant dans le cashless dans les stations, où il est concurrencé par Skidata ou Omnisis, etc.
La montagne et les acteurs du tourisme ne sont pas restés à l’écart des travaux sur l’expérience client et vacanciers. Focus sur Valloire, la plus petite des grandes stations, en bonne voie de remporter le critérium de l’expérience montagne et qui a consenti de gros investissements dans cet objectif.

La Valloire – © DR

Soigner ses atouts et investir à bon escient

Assurer la neige sur les pistes, soigner sa réputation digitale, mobiliser tous les acteurs en village autour de l’accueil ET remplacer le vieux télésiège, l’équation pour les stations françaises devient de plus en plus complexe et coûteuse.
L’investissement soutenu dans les infrastructures et l’amélioration des parcours clients, le soin apporté à des détails qui n’en sont plus, tels la vente de forfait dématérialisés, la capacité à enneiger le domaine grâce à des installations modernisées, toutes ces composantes qui participent à l’expérience séjour au ski ont hissé une station de Maurienne parmi les plus recommandées par ses clients. Sur les traces de l’un de ses champions locaux, Jean-Baptiste Grange, Valloire récupère depuis deux ans les fruits d’un ambitieux et courageux programme global.

Sur le site web de l’hôtel des Mélèzes, un hôtel 3 étoiles situé au pied des pistes dans la station connue des amateurs du Tour de France et de la montée du col du Galibier, c’est du rouge qui s’affiche à l’onglet réservation sur la quasi-totalité des mois de décembre, janvier et février : plus aucune chambre disponible. L’établissement qui ne comprend que 15 chambres n’est pas représentatif de toute la station : là comme ailleurs, quantité de réservations se concluent au dernier moment mais celle-ci rallie de plus en plus d’adeptes au point que le Club Med envisage très sérieusement d’y installer un village. En 2014, la commune et la société d’exploitation des remontées mécaniques ont failli passer sous les fourches caudines de la Cour des Comptes, en raison de sa situation financière mais tout a bien changé. Très bien notée sur tous les sites d’avis clients, la station réussit même l’exploit de devancer les mastodontes que sont Chamonix, Val Thorens, La Plagne sur le taux d’engagement digital, un item mesuré chaque mois dans l’étude We Like Travel. Cet indice mesure l’envie qu’a un client de recommander ou de rester fidèle à un fournisseur, à une marque, après qu’il en fait l’expérience. Il est de plus en plus ausculté, dans l’économie du tourisme comme dans d’autres : tous les secteurs étant désormais très concurrentiels, ce qu’il faut obtenir, c’est la recommandation, la fidélité, clés du repeat business, comme l’expriment les pros du marketing.

Cyclo col du Galibier – © DR

 

Comment et avec quels atouts Valloire s’est-elle hissée sur le podium et parvient-elle à exister en face des géantes de la vallée voisine de Tarentaise et ses palaces chaque année plus nombreux ? Tout d’abord, elle correspond bien à la station type du 3ème millénaire : elle dispose d’un vrai et beau domaine skiable, intelligemment relié à celui de Valmeinier et investit dans ses infrastructures : sur les 10 ans qui viennent, l’équipe en place à la SEM a prévu de mobiliser plus de 28 millions d’euros dont 8 à une seule télécabine et 7 à la production de neige de culture. « L’objectif est clair, indique Eric Viallet, responsable du service des pistes : permettre, dès le premier jour de la saison, à nos clients de profiter d’un domaine skiable accessible, ouvert à 50% et praticable. En moins de 100 heures de production, les équipements acquis permettent de rendre le domaine skiable, sachant que, dès le mois de mai, celui-ci sera rendu à la nature. » Ce que veut le client, là comme ailleurs, c’est attendre le moins possible, y compris sur le télésiège. Aussi, bien que le chiffre d’affaires avoisine les 15 millions d’euros, c’est une enveloppe de 28 millions d’euros qui est prévue pour la totalité de ces travaux et matériels. La SEM a compris l’importance de l’offre ski sans omettre le reste : elle a engagé les travaux et investissements pour qu’une réservation d’un séjour y soit simple et le plus digital possible, notamment pour répondre aux attentes du client ski. Selon l’étude menée par les maires des stations de montagne (ANMSM) : pour la clientèle qui part au ski, 70% des vacanciers recherchent leur logement en ligne et plus de 40% règlent également celui-ci on-line. Mais il a fallu du courage et de l’engagement pour l’équipe qui a mené ces chantiers.

Amortir les investissements et savoir fidéliser toutes les clientèles

« Avec plus de 70% du domaine skiable situé à plus de 2000 mètres d’altitude, Valloire dispose d’un véritable atout, déclare Jean-Marie Martin, directeur général de la SEM. Arrivé en 2014, ce cadre venu du privé observe assez vite que la clientèle qui vient l’été très nombreuse à Valloire profite des nombreuses infrastructures de la station (piscine, golf, restaurants d’altitude) sans que le montant du panier moyen suive. Il s’attachera à en augmenter la valeur moyenne afin que le chiffre d’affaires encaissé par la SEM sur la saison d’été cesse d’être si marginale et profite parallèlement de la visibilité que peut donner, par exemple, une arrivée d’une étape du Tour de France. Mais c’est sur tout ce qui concerne la saison d’hiver que les changements les plus radicaux ont été menés et les investissements planifiés.

Soigner l’expérience en stations

Emmanuelle Lacoste – © DR

Du sol au plancher, tout a été revu et les investissements dégagés pour permettre un parcours vacancier fluide et adapté à ses nouvelles exigences : la centrale de réservation est gérée par un acteur unique, Valloire.com, en capacité de vendre un séjour et de vous renseigner même par chat. Site responsive, vision sur la disponibilité des hôtels, l’internaute peut tout faire en un clic, y compris régler la part qui lui incombe s’il vient en groupe et ne désire pas régler la totalité de la facture du groupe. Ce système de paiement partagé s’avère bien adapté à la clientèle jeune. Une fois arrivé en stations, on évitera qu’il fasse la queue aux guichets forfaits. « Nous avons déporté et installé 10 bornes sur le front de neige, là où les gens circulent et stationnent et avons même équipé d’autres lieux de la station pour faciliter l’édition des forfaits, préachetés en ligne », ajoute le DG de la SEM. L’accès à la station, un point souvent critique sera également amélioré grâce à la collaboration avec Lyko, une start-up spécialisée sur le co-voiturage. Le cashless, c’est-à-dire la possibilité offerte à un vacancier de profiter de tout ceci sans sortir sa carte bleue, est également en ligne de mire. Après une première expérience menée avec la start-up Payintech, qui ne semble pas avoir été fructueuse, le chantier est remis sur l’établi avec deux nouveaux prétendants pour doter la station d’un tel système Omnisis et Skidata.
La plus petite des grandes stations, comme on la surnomme parfois, s’est donc hissée sur le podium des stations recherchées et plébiscitées, sans s’endormir sur ses lauriers (en Maurienne, on est habitués aux temps difficiles). Récemment nommée à la tête de l’Office du Tourisme, Emmanuelle Lacoste a son plan de marche bien en tête sur ce qui doit être poursuivi. « Le village station, parce que c’est ainsi que se vit Valloire, a investi dans des infrastructures, des évènements bien connus et identifiés depuis 10 ans et qui attirent parfois jusqu’à 20 000 personnes. Les clients s’informent et réservent de plus en plus à distance d’où de réels investissements dans la communication. Nos vidéos par exemple, produites en interne, sont très consultées et créent l’envie. Pour autant, les vacanciers continuent très nombreux de pousser la porte de l’Office du Tourisme. Notamment parce qu’ils attendent que nous leur partagions les bonnes adresses, cette connaissance fine de l’ultra local qui permet de répondre à leurs désirs, de personnaliser leur séjour. Notre mission est précisément de favoriser l’immersion qui va rendre le séjour plaisant, voire inoubliable. »

En écoutant Emmanuelle, on se remémore la campagne de pub initiée voici dix ans par l’Office de Tourisme de New-York et qui recommandait, pour profiter à plein de NYC, de questionner ceux qui y vivent : Ask The Locals.

Par Manuel Jacquinet
Article paru dans les Cahiers de l’Expérience Client, L’Opinion – Décembre 2019
 

Retrouvez les Cahiers de l’Expérience Client, ici.
Le 9ème Cahier de l’Expérience Client sera publié le 17 juillet 2020.

 

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