Wells Fargo licencie des télétravailleurs tire-au-flanc. Le marché des Mouse Jiggler indétectables en plein essor
Bloomberg a récemment rapporté que la banque américaine Wells Fargo a licencié une dizaine d’employés au début du mois de juin pour avoir tenté de tromper leurs supérieurs durant leurs jours de télétravail en utilisant des méthodes diverses pour donner l’illusion d’être en train de travailler. Peut-on licencier pour travail simulé, insuffisant, non conforme? Peut-on utiliser Zoom pour licencier ? On attend vos témoignages*.
Des employés licenciés pour avoir « créé l’impression d’un travail actif »
La banque a déclaré que ces travailleurs avaient été congédiés le mois dernier après avoir déterminé qu'ils avaient cherché à « créer l'impression d'un travail actif » par la « simulation d'activité au clavier », selon des dépôts réglementaires auprès de la Finra (Financial Industry Regulatory Authority), l’organisme d’autorégulation réglementant les sociétés de courtage et les marchés boursiers aux États-Unis. La plupart des employés avaient récemment été embauchés, mais l’un d’entre eux était employé depuis plus de sept ans. Dans une déclaration, Wells Fargo a affirmé qu'elle « maintient ses employés aux normes les plus élevées et ne tolère pas de comportement non éthique ».
Le travail hybride, un héritage de la Covid 19
Cette décision intervient quelques semaines après que la Finra a rétabli des règles de travail qui avaient été suspendues pendant la pandémie, nécessitant une supervision plus étroite des configurations de travail des managers. Cela a soulevé des inquiétudes quant aux inspections des bureaux à domicile des employés et à la difficulté accrue de maintenir des arrangements de travail hybrides.
Wells Fargo avait adopté le travail hybride pour la plupart de ses employés, leur demandant de venir au bureau seulement trois jours par semaine. Les banques américaines ont été parmi les premiers employeurs à rappeler les travailleurs au bureau après la période de la Covid 19. Cependant, une enquête de Scoop a révélé que 82 % des grandes entreprises financières avaient conservé des arrangements de travail hybrides. Pour mémoire, les techniques destinées à faire croire qu'on travaille alors qu'on paresse, pour s'extraire d'une réunion ennuyeuse ne datent pas de la Covid mais la période a intensifié la pratique. Fake a call permettait de simuler un appel, de la part d'une personne choisie, un grand client ou Barack Obama !
Le télétravail dans la mire des grandes banques américaines
Au cours des six derniers mois, plusieurs grandes banques ont soit incité les employés à revenir plus souvent au bureau, soit renforcé leurs efforts pour s'assurer que les travailleurs respectent les règles du lieu de travail. Par exemple :
- Bank of America a envoyé des "lettres d'éducation" avertissant les employés de mesures disciplinaires pour ne pas s'être présentés au travail le nombre minimum de jours par semaine.
- Goldman Sachs a informé les employés juniors qu'ils ne pourraient plus se faire rembourser les repas lorsqu'ils travaillaient à domicile, même s'ils travaillaient tard.
- Barclays et Citigroup ont tous deux annoncé récemment que des centaines d'employés seraient tenus de travailler au bureau cinq jours par semaine à partir de ce mois-ci, en réponse aux changements récents des réglementations de la Finra.
Les mouse jigglers indétectables, un marché en plein essor
Souris mouvante, logiciels qui simulent la frappe sur le clavier, mouse jigglers avec minuterie à intervalle ajustable, des marques telles que Vaydeer, Mitanty etc surfent sur la désaffection et le quiet quitting. Les avis des acheteurs de ces produits, de plus en plus nombreux et pas uniquement américains.. sont éloquents et mériteraient une thèse de sociologie :
“Très facile d'usage, détecté comme une souris. Les autres modes font gigoter la souris mais pas suffisamment pour simuler un vrai travail sur un vrai PC. Les logiciels de surveillance reconnaissent maintenant ce type de clés .. ”
Monitorer à distance la performance des collaborateurs en home-office
Mais l'employeur peut également employer des “mouchards” pour vérifier la présence, le travail effectif, la productivité, les règles mises en place et convenues
Une femme australienne, qui travaillait pour la compagnie d’assurance IAG a perdu son emploi, auquel elle a consacré dix-huit ans de sa vie, après que sa firme a utilisé une technologie de frappe au clavier pour surveiller sa performance en télétravail. Selon le New York Post, Suzie Cheikho, consultante pour Insurance Australia Group (IAG), a été licenciée pour ne pas avoir tapé assez en travaillant à distance. La Commission du travail équitable (FWC) d’Australie a rejeté sa demande de licenciement « injuste », estimant qu’elle avait été renvoyée pour une « raison valable de faute professionnelle »
En Belgique, un fonctionnaire a été licencié pour avoir télétravail depuis un autre lieu que celui convenu et fixé dans l'accord de télétravail négocié. Il a été vu travailler dans un avion l'emmenant au Portugal, alors qu'il devait travailler depuis son domicile, de 14h à 18H. Le Conseil d'Etat belge a confirmé le licenciement.
Comment superviser animer des équipes de télé-travailleurs ou encadrer les conditions du télétravail ?
Pour rappel, dans des entreprises de BPO, telles Teleperformance, Foundever, jusqu'à 50 ou 60% du personnel peut désormais, depuis la Covid, travailler depuis leur domicile.
On sait depuis l'épisode Uber, qu'une DRH efficace peut licencier aux USA des milliers de salariés en visio-conférence, via Zoom, quand bien même ils feraient bien leur travail. C'est légal là-bas, pas en France.
- En France, peut-on surveiller, et avec quel type d'outils et de logiciels, les collaborateurs qui sont en mode remote ?
- Le télétravail, est-ce la panacée ?
- Que valent les mouse jigglers indétectables, disponibles à partir de 10 euros sur Amazon, C Discount, Etsy?
- Et si la bonne adaptation consistait à travailler avec des indépendants, dont les missions et les échéances sont claires et précises ?
“Plutôt que d'assister à une énième réunion inutile, je fais la cuisine et je ne m'en cache pas” SG, consultante dans un cabinet de conseil.
Cet été, dans le numéro 133, lisez notre enquête croustillante et documentée sur ces sujets. Et participez-y* si vous êtes un expert dans le domaine des Bullshit Jobs, de la simulation (au travail) ou que vous savez attraper les tire-au-flanc !
Dores et déjà, savourez le portrait de Fodoa Fache-Adkins, une experte sur ces questions, cadre et collaboratrice efficace chez Teleperformance, cash et fin cordon bleu C'est ici.
“Mon lieu de travail est chez moi, et ce depuis bien avant la Covid. Pour survivre et profiter du home office, il faut beaucoup d'organisation, une vraie discipline et une hygiène de vie (..) Au début d'un call, je préviens souvent mes interlocuteurs que je suis dans la cuisine et qu'en même temps que je participe à l'échange, je peux préparer autre chose ou surveiller un repas. Tous les jours, pour ne pas perdre le contact avec le monde réel, je sors et m'installe au café pour un petit noir et la lecture du journal” Fodoa Fache-Adkins. J'ai tant appris, rue Firmin Gillot, Portraits et confidences d'Alumni de Teleperformance, éditions Malpaso-RCM
*joindre la rédaction: [email protected]