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La gare est un lieu où l'on prend le train (Marlène Dolveck). Et où Jean-Michel Jarre a enregistré

Publié le 16 mars 2025 à 11:00 par Magazine En-Contact
La gare est un lieu où l'on prend le train (Marlène Dolveck). Et où Jean-Michel Jarre a enregistré

“Nous avons notamment redéfini la gare comme ce lieu où l’on prend le train”. 

Galeries commerciales ou lieux de vie, ce que sont effectivement les gares, ce qu'elles devraient être, ce qu'elles deviennent. Toilettes propres, informations rapidement partagées et diffusées en cas d'incident, pianos, kiosques à journaux, que rêvons nous de faire, de voir, d'entendre et de recevoir en gares, en France, au Japon, en Ukraine ?

Marlène Dolveck, Jean-Michel Jarre et ses Chants magnétiques, Florent Bardon, le directeur de la Gare du Nord, Benjamin Huteau.. ils ont transformé l'expérience en gares grâce à quelques sons, jingles, enregistrements originaux, à l'amélioration de l'information. Le magazine professionnel En-Contact consacre son dossier du mois du numéro 136 aux gares SNCF, celles d'Achères, de La Baule-les Pins, de la gare du Nord, de Pantin. Celles d'Ukraine, devenues vitales, comme les trains qui y circulent, pour l'acheminement des troupes de soldats.  

L'économie comme je l'aime et veux la faire aimer, par Marlène Dolveck

Sorti en début d’année, aux éditions de l’Aube, L’économie comme je l’aime et veux la faire aimer a été écrit par Marlène Dolveck, directrice générale de Gares &Connexions. L’ex-professeure y partage sa vision et sa passion pour une économie appliquée, à hauteur d’homme. Et y révèle le lien fort qu’elle entretient avec quelques gares et ceux qui y travaillent ou embauchent, pour conduire des trains. Extraits. 

Marlène et l’économie. 
(..) Native de la région toulousaine, étudiante en économie dans ce qui deviendrait plus tard TSE, je fus d'abord professeure de sciences économiques et sociales au lycée, avant de reprendre mes études pour entamer une carrière de dirigeante, dans le secteur bancaire puis à la SNCF. De la même manière qu'enseigner impose de réinterroger sa manière de voir et faire les choses, j'ai perçu au fond de moi cette élection comme une invitation à me questionner sur la manière dont la science économique m'avait accompagnée depuis le début (..)

Le quartier cheminot de Saint-Alban
Le début ? Le début, c'est le quartier cheminot de Saint-Alban où j'ai grandi, à équidistance de la gare de triage de Saint-Jory et de la Ville rose. Là, dans les allées séparant des maisons identiques, du haut d'un cerisier magnifique dont j'avais fait mon perchoir, je m'initiai sans le savoir à l'économie, parmi ces cheminots et fils de cheminots qui entrelaçaient fierté ouvrière et ascension sociale, sécurité d'un statut mêlée aux fatigues des astreintes. Plus tard, lycéenne, un professeur marxiste de science éco stimulerait en moi l'appétit de connaissances et aussi le premier désir de tester la théorie quand elle ne me paraissait pas coïncider avec l'expérience vécue. Puis, devenue à mon tour enseignante, en lycée, ce seraient les salles de classes huppées de l'Ouest parisien qui m'initieraient aux charmes, parfois aux roueries, de certains codes sociaux, différents de ceux que j'avais pu pratiquer jusque-là. Je ne partais pas de rien, toutefois : mes parents m'avaient donné de solides assises quant à la vie en société.

La gare, laboratoire grandeur nature
La gare se prête admirablement à de telles réflexions, moins peut-être à certains leviers envisagés pour en améliorer l'usage. Elle est un lieu d'observation sociale d'une extraordinaire richesse. Des milliers, parfois des dizaines de milliers de voyageurs s'y croisent, autant de destins qui se frôlent, se côtoient, mus par des millions de pensées, par autant d'humeurs, de soucis, de convictions. Tout cela a lieu dans un bâtiment soumis à des enjeux de sécurité importants qui nécessitent une gestion méticuleuse des flux, une architectonique sophistiquée faite de signalétique, d'organisation industrielle au cordeau, de logistique (propreté, sécurité, achalandage des magasins en gare). Comment articuler les besoins de chacun et ces contraintes structurelles ? 

La Source, une école alternative pour apprendre la cuisine, localisée à côté de la gare de Pantin, dans la Cité Fertile.  Ici son restaurant d'application. Crédit Edouard Jacquinet pour En-Contact. 

Donner envie de gare et donc envie de train. 
(..) Je crois que nous avons fait beaucoup de choses intéressantes, notamment à travers le programme « Donner envie de gare et donc envie de train ». Cela suppose des gares efficaces, pratiques, modernes et... plaisantes, car ce sont des lieux de beauté architecturale et des lieux d'émotions, de vie et d'échanges. Nous avons notamment redéfini la gare comme étant ce lieu où l'on prend le train. Cela peut sembler un truisme, mais il a pu être question un temps d'en faire un lieu de poly-activité, une sorte de super centre urbain. Or les usagers de la gare l'identifient comme un lieu très fort, lié à l'univers du voyage auquel il faut l'arrimer fermement. Le renforcement des activités de restauration, qui chez nous, Français, est indissolublement attachée au plaisir et à l convivialité, est un levier important de not stratégie. Lorsque certaines gares s'avèrent par ailleurs, des lieux commerciaux qualitatifs et prisés, comme la gare Saint-Lazare, tant mieux ! Mais ce n'est que parce qu'elles sont des gares exemplaires qu'elles peuvent également devenir autre chose ensuite, non antérieurement ni même concomitamment (..)

Florent Bardon, directeur des Gares du Nord et d'Aéroport CDG2/TGV. Crédit Edouard Jacquinet. 

Accaparés par le reporting
D'une façon générale, la question de l'utilité du travail - ce que l'on nommait autrefois la « dignité du travail » - doit être retrouvée et renforcée. L'anthropologue David Graeber nous a collectivement alertés, en 2013, sur la prolifération des bullshit jobs, ces emplois dénués de sens, profondément désocialisant (qui ne doivent pas être confondus avec des emplois jugés pénibles, pouvant être pleinement porteurs de sens). Soyons lucides : il existe des emplois dans lesquels la question de la réalisation de soi demeure absente. Mais le rôle du dirigeant est de tout faire pour que le travail conserve le plus souvent possible sa puissance anthropologique : en produisant ses conditions d'existence, l'homme s'humanise en se liant à autrui. Pour parvenir à mesurer les attentes des collaborateurs, les questionnaires sur la qualité de vie au travail sont utiles, de même que les entretiens avec les ressources humaines ou les remontées de terrain opérées par les représentants du personnel (..)

La Source, une école pour apprendre la cuisine, à Pantin, au sein de la Cité Fertile, 2025. En gare d'Achères, en 1980
La suite, dans le numéro 136 d'En-Contact, dont l'histoire de l'enregistrement d'une séquence de l'album de Jean-Michel Jarre, les Chants magnétiques, en gare d'Achères, par Pierre Mourey. Et le récit de notre déjeûner, à Pantin, au sein de la Cité Fertile, dans le restaurant d'application de l'école La Source.    

 

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