Ce sont les gens qui font revenir les gens. Tiens donc ..
180 conférences et Keynotes sur le commerce et l'expérience, pas une seule sur les gens, les vendeurs, les salariés. Bienvenue à Paris Retail Week 2022.
Paris Retail Week 2022 ( le rendez-vous de l'omni-canal, du commerce connecté, du marketing..) débute dans 2 jours, à Paris. J'y ai recensé plus de 180 conférences, keynotes, plénières. Aucune n'évoque ou ne parle des collaborateurs, des employés, 1 seule des vendeurs. Aucune ne mentionne l'expérience collaborateurs, salariés. Tiens-donc .. J'ai pourtant passé une heure à lire, à chercher: le mot vendeur apparait une fois, peut-être deux, dans un atelier Cegid. Mais Julia Bijaoui, par exemple -et parmi d'autres sachants sur l'expérience client, les parcours clients agiles, le paiement fractionné - va nous parler d'engagement et de commerce désirable. Julia, ce n'est pas la jeune femme diplômée d'une grande école, HEC, qui faisait livrer des courses et des repas avec des livreurs Frichti.. qui n'avaient pas tous leurs papiers ?
Ce sont les gens qui font revenir les gens.
Comme l'explicite une autre conférence bien nommée de Paris Retail Week 2022 : “ L'apocalypse promise au magasin est annulée. Son avenir ? L'expérience, le petit plus qui ne peut pas être téléchargé " Dans les banques, on a l'habitude des accroches qui percutent ( Atelier organisé par BNP Personal Finance, à 15H). C'est déjà un bon début ! Il importe pourtant de s'occuper de l'expérience collaborateurs, de la vie quotidienne des salariés, des travailleurs indépendants qu'on recrute sur Malt ou des livreurs qui livrent. Des concierges en bas des immeubles ou dans l'entrée de ceux-ci, qui ont ajouté depuis quelques années à leurs missions la réception et le stockage des colis Amazon, Veepee. Du facteur qui connait, dans les villages reculés ou de montagne, là où les rues et les impasses n'ont pas toutes de nom, les visages et les lieux-dits. Un énième salon sur le commerce phygital, la data qui personnalise au service de l'engagement, le paiement fractionné et les market-places, qui n'a pas mis à son programme ces sujets ou qui n'a pas trouvé d'exposants ou de conférenciers sur ces questions d'actualité, voilà qui doit nous interroger : ce sont les gens qui font revenir les gens, qui les soignent. Ce sont les parents qui éduquent, pas la edtech, c'est à l'école qu'on apprend etc etc.. Si les lieux de rencontre, les salons et les conférence, les Conseils Nationaux sur la Refondation ne sont pas des lieux où l'on évoque la vraie vie, celle-ci nous rattrapera violemment : je me rappelle être allé à Bercy, en Décembre 2021, aux Assises du Commerce. Il y avait du beau monde et un Ministre bien en jambes et en verve. Qu'en est-il sorti ? Pour aller plus loin, la remise en avant d'un article publié voici trois ans..
De l’hôtellerie aux cabinets de conseil, un objectif : la juste sélection et la rétention (fidélisation)
L’arrivée partout annoncée et espérée des robots pour remplacer vendeurs, chauffeurs de taxis ou serveurs résoudra peut-être une difficile équation : on recherche partout des personnes capables de soigner et d’être attentif aux clients, aux malades. Une fois ces rares candidats dénichés, comment les fidéliser et s’arranger pour qu’ils contribuent effectivement à l’expérience client ? Grâce à l’expérience collaborateurs. Est-ce élémentaire mon cher Watson ? Non mais lorsque c’est mis en place avec sincérité, ça fonctionne.
A la tête d’un hôtel **** dont elle a repris la direction, la Mainaz au Col de la Faucille (dans le Jura), Lucie Brindjonc a son plan stratégique bien en tête : conserver la clientèle de séminaire que lui apporte la proximité de Genève, tenter de décrocher sa première étoile pour le restaurant et sénioriser l’équipe de collaborateurs qu’elle a trouvée sur place, à son arrivée. Après une carrière étoffée à Hong Kong et dans de nombreux grands établissements, cette maman a été appelée à la rescousse par les associés qui ont repris l’établissement réputé pour sa vue incroyable sur le Mont Blanc, un argument qui ne suffit plus. « Ce sont les gens qui font revenir les gens », dit la jeune General Manager qui a eu l’occasion d’éprouver cet adage en Asie. « A Hong Kong, il y a des palaces à tous les coins de rue, or nous sommes parvenus dans l’établissement que je gérais à remplir le nôtre et à fidéliser notre clientèle » La qualité du service et le sentiment procuré d’être à la maison, comme chez soi sont de réelles attentes et nouvelles tendances depuis des années mais ils nécessitent des collaborateurs pointus, en capacité d’anticiper et de personnaliser « Ces mêmes facultés que vous demandez, vous devez en faire preuve indique-t-elle, encore plus à une époque où pour une partie d’entre eux, le travail et l’engagement professionnel sont une option parmi d’autres et certainement pas un réflexe comme ce fût le cas pour les générations précédentes. Il peut arriver qu’un collaborateur pose sa démission parce qu’on lui a refusé un jour de congés, un week-end pourtant très chargé ». Ces efforts et attentions sont dénommées par les spécialistes expérience collaborateur ou encore la symétrie des attentions. (Nb : depuis notre interview, la jeune directrice a rejoint un autre établissement hôtelier, en Côte d’Or à Beaune.)
Un métier et des outils spécifiques :
Sophie Cléjan, directrice de l’expérience salariés chez Orange, la définit comme « l’ensemble des interactions que vit le collaborateur dans l’entreprise, tout au long de son parcours au sein de celle-ci et sa satisfaction avant et après son embauche ».
Certains groupes de conseil, de technologie, confrontés à des pénuries dramatiques sur des postes clés (développeur front-end, data scientist) n’hésitent pas à déployer des outils pour mesurer la satisfaction de façon régulière, après des moments clés, ou à investir des sommes importantes dans l’aménagement des locaux, la nourriture vegan et le café à volonté.
Les centres d’appels en pointe sur ces sujets
Mais c’est peut-être l’industrie des centres d’appels, qui expérimente le plus ces « difficultés depuis des longtemps, qui a été le plus loin dans ces travaux. Chez le leader mondial du secteur, Teleperformance, qui emploie 280 000 agents dans le monde, on a eu l’occasion de tester à peu près tous, sous toutes les latitudes pour s’attacher les bons agents, planificateurs, managers de plateaux.
A Athènes par exemple, dans l’un de ses hubs européens où de très grandes marques peuvent faire assurer leur service commercial ou service client 7j/7 et en 24/24, l’exigence dans le sourcing des candidats va de pair avec un programme de nursing parfaitement maitrisé indiquait Marcos Gallegos (le manager est devenu depuis cette interview, DGA chez Armatis-LC). « Nous ne recrutons que des agents de langue native, que nous allons parfois chercher dans leur pays d’origine. Leur voyage pour venir sur place est pris en charge, les colonies de vacances des enfants le cas échéant » La visite sur place confirme le propos et démontre le soin du détail. La localisation du site, situé en plein cœur d’Athènes, le long de la route qui mène au Pyrrhée, n’est pas un hasard pas plus que ne l’est le choix de la ville, véritable facteur d’attraction et de fidélisation. Maria Azevedo, une portugaise trentenaire, passée par Starbucks où elle a géré le développement européen, connaît tout des contraintes et du rythme de ces sociétés de service, focalisée sur le client et pilotées avec des KPI très exigeants. « Arrive un moment où vous avez envie de vous poser, dans une ville où vous vous voyez faire une partie de votre vie, ouverte sur le monde, internationale. Athènes est unique pour ceci et le programme déployé par l’entreprise remarquable. »
Pour les jeunes recrues, la phase souvent critique post formation initiale ne se déroule plus comme, avant loin des managers. C’est dans une aire spéciale, surélevée et à proximité de voix et d’œil que les équipiers traitent leurs premiers mails ou appels. Elle se dénomme nesting, comme si l’on parlait d’oiseaux, chers à leur mère et sur lesquels il faut veiller sans relâche. Chez Myopla, à Tanger, le fondateur de l’entreprise Denis Marsault a choisi une option radicale et stratégique : s’installer au Nord du Maroc, dans une zone où peu de centres de contacts s’étaient installés avant lui. Résultats : il est parvenu, en quatre ans, à doter ses plateaux de spécialistes difficiles à dénicher dans cette industrie : des planificateurs (Work Force Managers), des Customer Success Managers ( ceux qu’on appelait auparavant des responsables de compte client) et des développeurs.
Prendre soin de ceux qui vont prendre soin … est devenue la martingale.
On évoquera plusieurs fois l'expérience des collaborateurs, des livreurs, lors de la 10ème édition d'ECTFF, le 1er Forum en France consacré à l'expérience client, patients, visiteurs.
Par Manuel Jacquinet
Photo de Une : L’hôtel Hermitage Barrière à La Baule qui accueille tous les ans ECTFF – © Igor Lubinetsky