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Tandis que BVA recherche un chevalier blanc, SAP va mettre sur le marché Qualtrics, acquise un prix certain

Publié le 12 septembre 2020 à 04:15 par Magazine En-Contact
Tandis que BVA recherche un chevalier blanc, SAP va mettre sur le marché Qualtrics, acquise un prix certain

Où doivent aller les investissements et ressources en matière d’expérience client ? Peut-être dans la simplification, la grande priorité selon Frédéric Donati (Comdata).

En redressement judiciaire depuis le 5 juin, le groupe BVA a vu la date limite des offres éventuelles de reprise repoussée jusqu’au 12 août 2020. Le dossier est complexe mais le leader européen de la visite-mystère (mystery shopping), des études de marché et des sondages, notamment dans le monde politique (voir photo de couverture), inspirera certainement des manifestations d’intérêt au regard des valorisations atteintes par les plateformes de XM (mesure de l’expérience client).

Comment rentabiliser d’onéreuses acquisitions ? 

On a appris en effet, lors de la publication des derniers résultats de SAP, que l’éditeur avait l’intention de conduire à l’automne l’introduction en Bourse (IPO) de sa filiale spécialisée Qualtrics, acquise à prix d’or voici deux ans : 8 milliards de dollars ! L’éditeur allemand, grand concurrent d’Oracle et de Salesforce sur certains marchés, a mentionné qu’il désirait donner ainsi à Qualtrics son autonomie pour conduire ses propres acquisitions, tout en demeurant actionnaire de l’entreprise. Et si ceci relevait au contraire d’un habile story telling pour habiller une intégration délicate à rentabiliser ? Rincées par la crise du Covid-19 et déjà passablement irritées par les augmentations de prix incessantes des licences des éditeurs de CRM, CX Platform, etc., les entreprises rechignent à signer des chèques en blanc ou sont tentées par des applications open-source sur ces mêmes problématiques, plus faciles à intégrer et très efficaces. Certaines comprennent également que ce sont elles, in fine, qui sont appelées indirectement à financer ces courses aboutissant à des valorisations indécentes dans le domaine de la tech. DSI d’une ETI, Laurent B. témoigne : « N‘importe quel petit développement ou demande d’adaptation nous est facturé à prix d’or et est réalisé dans des délais bien trop longs. Pendant ce temps-là, les éditeurs racontent au marché que la base installée de clients va permettre de développer de nouvelles sources de chiffre d’affaires. Ils rachètent, à prix d’or et ensuite, nous devrions passer à la caisse ? » L’exemple même du danger des stratégies de build-up dans ces secteurs est donné par BVA, indique un bon connaisseur du secteur : BVA se porte plutôt bien, se développait avant cet incident mais les investisseurs de LBO n’ont pas toujours en tête les mêmes objectifs, intérêts ou calendrier que ceux des managers et cadres historiques. Ne pas avoir pu obtenir de prêt PGE a été un coup presque fatal pour l’entreprise. Or, c’est notamment en raison des clauses qu’imposent les fonds que cet emprunt n’a pu être conclu (voir article plus bas). En attendant l’issue de la mise en RJ, les 1000 salariés que compte le groupe tentent de conserver foi en l’avenir.

Des plateformes indispensables mais non suffisantes 

Certes, les outils et plateformes de mesure de l’expérience client se sont installés comme des viatiques indispensables dans tous les secteurs mais les seuls Medallia, Usabilla (by SurveyMonkey), quelques-uns des concurrents anglo-saxons de Qualtrics, les Wizville, Myfeelback, etc., des acteurs français de ce marché, souffrent de quelques limites dont celle de ne mesurer qu’une partie de l’expérience client, patient, usager: dans les points de vente, les aéroports ou stations-services par exemple, les smiley boxes (ces boitiers connectés qui affichent des smileys de couleur différente et permettent de remonter l’avis du client sur une étape du parcours client) semblent plus pratiques et adaptés et permettent de réagir en quasi temps réel. Dès lors que le smiley rouge qui indique un mécontentement par exemple sur la propreté des toilettes est largement sollicité, le responsable local peut être notifié. On passe ainsi d’une mesure d’un point de douleur de l’expérience voyageur à sa correction rapide. Dans d’autres industries, on ne peut se passer de la visite mystère. Au Bon Marché, dans les palaces ou dans de nombreuses enseignes de retail, voire dans les gares SNCF, le mystery shopping ou l’enquête classique de satisfaction, ne peuvent pas être complètement remplacés par un outil de feed-back management (recueil et remontée systématique et organisée de l’avis du client).

Dans les centres de contacts (les plateformes téléphoniques), un canal par lequel transitent encore de très nombreuses interactions clients et souvent celles à plus fort enjeu, ce sont les outils de Quality Monitoring (enregistrement et analyse de la qualité et de la conformité de l’expérience vécue) qui s’avèrent indispensables. Là également, la bagarre est vive : Nice Systems, le leader mondial, a élargi son offre au point de proposer des outils de mesure à partir des remontées clients recueillies sur le web (analytics) mais il a affaire à des concurrents de taille plus modeste et agiles : MyQM, Cross CRM, Hubicus (filiale de BVA) sont parfois vécues et ressenties comme des solutions plus simples à déployer ou moins onéreuses.

Avant de mesurer l’expérience client, la simplifier 

« Les spécialistes de l’expérience client doivent, en résumé, savoir analyser sur quel canal le commerce se fait dans leur secteur et va se pratiquer de plus en plus », indique un des experts du secteur, Frédéric Donati – directeur général de Comdata France – « ou idéalement intégrer tout de suite les contraintes du multicanal. Intégrer que l’attente des clients se focalise de plus en plus sur la simplicité et le bout en bout. Leur premier investissement, avant que de mesurer, est de mettre tout en œuvre à cet effet ». Un avis corroboré par un autre spécialiste : « Après seulement avoir travaillé sur ces problématiques survient la question de la mesure ou parallèlement ; mais s’il y a un seul euro à investir, il est à mettre sur tout ce qui fait coïncider les attentes des clients ou usagers avec ce qu’ils vivent effectivement », complète Laurent Garnier, spécialiste des parcours clients (Kpam). Les deux professionnels animeront chacun, fin septembre à la Baule, une master class sur ces questions, lors du Forum qui se tient chaque année depuis huit ans dans la baie (Experience client, the French Forum). En dix ans de travail sur cette seule question des parcours clients, KPAM a archivé des données et témoignages uniques que le spécialiste présentera sous une forme de synthèse. Simplifier, pour prendre les bonnes options, engager le client et lui faciliter la vie. « Rembourser rapidement, prévenir par SMS qu’une livraison est décalée, des situations très récurrentes et précisément celles au cours desquelles on peut faire la différence », indique Frédéric Donati.

Par la rédaction d’En-Contact

Pour aller plus loin :

BVA et sa holding en redressement judiciaire (19 Juin 2020 )

Mais les enquêtes et tests liés à Elu Service Client de l’Année se dérouleront comme prévu, selon Ludovic Nodier. BVA indique de son côté que ces difficultés n’impactent pas la production des terrains, études ni aucune autre activité, tel le mystery shopping (les clients mystère). Le COVID 19 n’aura pas épargné le groupe BVA dont les holdings de tête et l’une de ses plus importantes filiales, BVA sas, ont été placées en redressement judiciaire à Toulouse, voici quelques jours (le 5 Juin 2020).
Le groupe, basé à Balma et qui est le partenaire historique de la manifestation Elu Service Client de l’Année (dont notre magazine a été l’un des partenaires médias importants, jusqu’à l’an passé), indique que ce redressement judiciaire ne devrait pas avoir d’impact sur la production des études, les enquêtes d’opinion ou les campagnes de Mystery Shopping dont il est le spécialiste en Europe.

Les raisons et le périmètre du redressement judiciaire

La crise du Covid 19 a eu  un réel impact sur nos activités indique Caroline Gaudin, directrice communication du groupe. Au niveau français, européen ou même mondial, l’ensemble du secteur a connu un ralentissement de l’activité. Les dirigeants ont donc choisi de placer la société en redressement judiciaire afin de préparer l’avenir mais ce sont les holdings qui sont mises en RJ ainsi que BVA sas. L’ouverture des procédures à notre bénéfice n’a aucun  impact sur les activités, les productions d’étude  et les 220 collaborateurs du périmètre concerné. Le groupe, dirigé par Gérard Lopez et Pascal Gaudin, a comme actionnaire Naxicap Partners ainsi que l’un des grands acteurs européens de dette privée, Alcentra (filiale de BNY Mellon IM). L’entreprise aurait t’elle pu être soutenue, dans cette période délicate, via un prêt PGE ?: Nous aurions pu en avoir un mais la structure de notre dette ne nous permet pas de solliciter ce type de prêts, complète la porte parole du groupe.

L’impact prévisible sur les activités d’enquête, de sondages et sur Elu Service Client de l’année

285 salariés, sur un total de plus de 1000, sont concernés par la mise en redressement judiciaire des sociétés concernées. Les data rooms débuteront la semaine prochaine, selon l’administrateur judiciaire. Le 22 Juin, le même jour que l’entrée au CAC 40 de Teleperformance. L’expérience client et sa mesure ne sont pas un long fleuve tranquille. Mais pour savoir qui montera sur la scène en octobre, pas de souci a priori: les tests et enquêtes mystère débuteront bien fin Août, comme l’organisateur nous l’a confirmé; une date qui avait été décalée par rapport au planning habituel.  nb : Inference opérations est la filiale du groupe BVA groupe qui réalise les enquêtes pour Viséo Customer Insights, la société organisatrice de ce concours.

Pour aller plus loin, découvrez le Bottin du service et de l’expérience client dans le N°116 d’En-Contact.

Photo de Une : BVA est un des leaders en France des enquêtes d’opinion et sondages sur les intentions de vote, lors des élections. Ici François Fillon pendant la campagne de 2017 – © Edouard Jacquinet

Manuel Jacquinet et Ludovic Nodier – © DR

L’observatoire des services clients ? 

Voici plus de onze ans que les équipes de ESCDA ont créé et exporté leur prix, avec succès et grâce à  une méthodologie rigoureuse de tests (Archives en Contact, 2013 )

Le constat de la livraison 2013 de l’Observatoire des Services Clients, réalisé par Viséo Conseil et BVA en marge de la remise des prix Élu Service Client de l’Année est sans appel : le consommateur est de plus en plus exigeant, et de plus en plus impitoyable. Ainsi, selon l’étude, 90% des consommateurs sont prêts à abandonner une marque dès lors qu’ils se considèrent déçus par la qualité de son service client. Et alors même que 67% s’estiment « courtois », 51% déclarent avoir perdu leur sang froid avec un conseiller de clientèle. Il faut dire que le client attend du service client qu’il soit tout à la fois professionnel (79%), aimable (92%), attentif, empathique, qu’il comprenne rapidement et maîtrise parfaitement la langue, et résolve le problème au premier contact. Le tout en répondant aussi vite que possible : 63% sont prêts à patienter deux jours après l’envoi d’un formulaire en ligne ou d’un e-mail, et 63% jusqu’à 1 heure après une demande via les réseaux sociaux, 75% jusqu’à 3 minutes au téléphone… Et si les nouveaux canaux de communication sont ceux qui apportent le plus de satisfaction (87% pour le click to call, 83% pour les applications smartphone, 81% pour les réseaux sociaux)… c’est le téléphone qui est encore le médium le plus utilisé.
Les conséquences d’une expérience du service client sont lourdes : les Français sont de plus en plus nombreux à contacter un service client (57% contre 46% en 2012) et la qualité du contact avec ce service a une influence de plus en plus forte sur la décision d’achat (86% pour 76% l’an dernier).
Les clients sont donc de plus en plus impitoyables : selon Ludovic Nodier, fondateur de Viséo Conseil, « La confiance avec la marque est systématiquement remise en jeu lorsqu’un service client est contacté ». Le fondateur de l’Élection du Service Client de l’Année constate que l’écart entre les lauréats et les autres participants à cette manifestation est de plus en plus grand : la note moyenne des premiers étant de 15,82 et en progression de 7,14%.
Ainsi, aujourd’hui plus que jamais, comme l’explique Marie-Laure Soubils, Directrice Générale Adjointe de BVA Services « Etre promoteur d’une entreprise c’est avant tout être un client satisfait du service client ».

 

Par Manuel Jacquinet

Voir notre article IFOP+ BVA, ça ferait un sacré champion français des études, des sondages et de la mesure.

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