Vol au-dessus d’un panier de crabes. Trois raisons de voir absolument Glengarry Glen Ross de James Foley
Pour le monologue de Baldwin qui résume en sept minutes l’univers de la vente.
« Always be closing », autrement dit « toujours conclure. » La tirade de Blake, le personnage joué par Alec Baldwin, est devenue mythique. Reprise, parodiée un nombre incalculable de fois, elle n’était pourtant pas dans la pièce originale qui valut à David Mamet un prix Pulitzer. Elle énonce l’argument du film : au sein d’une équipe de vendeurs, les deux moins performants seront licenciés dans une semaine. Et nous rappelle, à nous spectateurs, presque aussi tétanisés que le parterre de vendeurs qu’elle accable de son mépris, que débusquer des leads (83 occurrences du terme dans le scénario) est le nerf de la guerre dans le monde de la vente. Et plus encore dans celui de la téléprospection. Rien de nouveau sous le soleil, mais une éloquente piqûre de rappel.
Parce que Mamet sait de quoi il parle.
Avant de devenir écrivain, Mamet est passé par la case petits boulots. Et notamment la vente de tapis par téléphone. « Je passais des appels à froid avec l’annuaire, complètement à froid » dit-il. Un job qui réclamait un sang-froid manifestement incompatible avec son caractère. « J’étais un très mauvais vendeur. Je n’arrêtais pas de m’identifier avec les gens au bout du fil, ce qu’il ne faut surtout pas faire. » Mettre un pied dans la porte, offrir un produit sans arrêter de parler, les inciter à dire oui de manière qu’ils se mettent à accepter ce que vous leur proposez. La recette est vieille comme le monde et fonctionne aussi bien physiquement que par téléphone.
Pour la distribution
Al Pacino, Alec Badwin, Ed Harris, Alan Arkin, Kevin Spacey, Jonathan Pryce, le casting se passe de commentaires : James Foley a fait appel au nec plus ultra de l’actorat hollywoodien. Mais à tout seigneur, tout honneur : Jack Lemmon a gracieusement accepté de voir Al Pacino, qui n’a qu’un rôle secondaire, apparaître avant lui en tête d’affiche. Une générosité qui fait défaut aux personnages du film, voués à se livrer une lutte sans merci. Et si Pacino et Baldwin trustent les vues sur YouTube, c’est bien l’acteur génial de Certains l’aiment chaud et de La Garçonnière qui porte le film sur ses épaules.