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« Quand on est entre copines, et qu’on fait ce qu’on aime… »

Publié le 30 décembre 2019 à 12:08 par Magazine En-Contact
« Quand on est entre copines, et qu’on fait ce qu’on aime… »

Elles n’ont pas tout à fait le même âge mais en commun bien des choses, outre l’instrument qu’elles pratiquent : la gentillesse et le talent et parfois des idées folles comme celle de revisiter des standards du hard-rock en quatuor. Une famille également. Confidences et parcours d’un duo qui enchante les habitués de La Baule, presque depuis la création du Forum.

L’année dernière, ces quasi habituées du French Forum (elles y sont intervenues quatre fois en sept ans) avaient joué et enchanté l’auditoire, en formation quatuor, à l’hôtel Hermitage. Cette année, Florence Véniant et Emelyne Chirol ont donné de leur temps et de leur talent, en duo remarqué ; notamment lors d’un quizz, blind test musical, animé par Manuel Jacquinet, transformé en Guy Lux pour l’occasion, qui a mis en transe la centaine de convives du French Forum réunis ce soir-là. Qui est ce duo de musiciennes, depuis peu élargi et comment s’est-il créé ?

Naissance d’un duo

Florence Véniant – © Emil Hernon

Lyonnaise d’origine, Florence (52 ans) a suivi une formation classique puisqu’elle a fait le conservatoire de Lyon où elle commence à enseigner. Rentrée très jeune (à 20 ans) à l’Opéra de Saint-Etienne, elle y reste onze ans et en garde un souvenir amusé. « Les jours de match, à cause de la rivalité footballistique entre les Verts et les « gones » de l’OL, il y a des embouteillages et ça peut parfois être tendu. Jouer « en fosse » est une bonne école : on apprend à travailler en collectif, tout en suivant ce qui se passe sur scène ». Devenue chef de pupitre, Florence tombe amoureuse d’un parisien qui lui annonce : « je veux vivre à Paris ! ». Il est surtout attaché à un métier qui le passionne et qu’il pratique au Sénat. Florence passe les grands concours tels celui de l’Opéra de Paris, sans succès. Loin de se démonter, elle joue une autre partition : faire des enfants. Au préalable, elle a découvert le monde du show biz et joue ainsi de la pop avec l’Affaire Louis Trio et Stéphan Eicher. Désormais lancée, on la retrouve ainsi à jouer sur les plateaux télé de Michel Drucker. « Je ne fais plus de télé maintenant, parce que dans ce milieu, on considère que passé un certain âge, vous ne pouvez plus être à l’image. Mais Emelyne a pris la relève ». Emelyne ? La deuxième carte du duo. Originaire de Montpellier, Emelyne Chirol (39 ans) a également suivi une formation classique, avant de faire du baroque, à Toulouse, mais ce n’était pas trop sa tasse de thé.

Emelyne Chirol – © Emil Hernon

Elle suit un professeur à Paris et se fait petit à petit une place dans un monde des musiciens encore très masculin. Tout comme sa partenaire en duo, Florence, elle a bénéficié du défrichage réalisé par Catherine Lara : « Il n’y avait que des hommes sur les albums et les tournées. Grâce à Lara, ça a changé, la mixité est arrivée ».
Lorsqu’elles se produisent ensemble, les deux musiciennes apprécient de pouvoir choisir leur répertoire, et réarrangent parfois les morceaux qui doivent être soigneusement choisis. « La clé, c’est la mélodie qui doit pouvoir ressortir, même sans les paroles des chanteur ». Leur rencontre date et s’est faite à l’Opéra, sur un même pupitre. Y a germé l’idée de monter un duo, en pop. Cette tentative de création d’un duo fût la bonne après quatre expériences similaires infructueuses. « Chacune en solo, on avait essayé de former un duo mais ça ne collait pas forcément. Il faut que la mayonnaise prenne. » Florence et Emelyne se complètent bien. « On n’a pas d’agent, on se débrouille toutes seules », raconte Florence. « Dans les précédentes expériences, j’étais souvent celle qui tirait, organisait, entraînait, communiquait. Tandis qu’avec Emelyne, nous avons la même énergie, le même enthousiasme ».

Le Duo devient Quatuor

Le duo fonctionne bien, les fondations sont posées. Aussi les deux compères songent qu’un Quatuor… ça permettrait de répondre à des demandes de plus en plus fréquentes de jouer en concert et, en sus, de jouer du hard rock… Évident non ? L’enthousiasme et la volonté de défricher, le duo va les discerner et transmettre à leurs deux nouvelles collègues (Sophie Durteste et Emma Piettre) au sein d’une nouvelle aventure qui s’appelle Les Parisiennes Quatuor. « Désormais, nous voilà quatre, sans chef, mais avec nos caractères, alors il faut être souple. Il arrive en effet que l’une d’entre nous ait un petit coup de mou, s’investisse moins. C’est hors concert qu’il peut y avoir des désaccords, lors des déplacements, des répétitions. Mais l’organisation prime. Il faut prendre des initiatives et, sur le sujet de la vie de famille, avoir un conjoint, un papa qui assure et pallie nos absences ». Chacune apporte et/ou propose des affaires, des contrats. Et les autres suivent, ou pas. Il y a un barème, un cachet, en dessous duquel elles ne se déplacent pas. Sauf pour les amis. « Nous avons tous eu besoin d’être aidés, un jour ». Elles peuvent œuvrer dans l’évènementiel (la mode, la haute-couture, le business) mais leur fonds de commerce s’appelle désormais les Parisiennes Quatuor, grâce auquel ces musiciennes peuvent s’exprimer pleinement, en mélangeant les genres. La prise de risque peut paraitre grande comme cette tentative de revisiter des standards du hard rock ou du rock qui balance (Iron Maiden, AC/DC, les Stones…) en quatuor à cordes, mais ça fonctionne. « Les femmes adorent nous voir jouer du rock ! On ne cherche pas à se créer des personnages excentriques ou sexy : notre démarche consiste à créer quelque chose de différent, d’assez classe, dans le domaine de l’instrument à cordes. »

Le Quatuor au complet – © Igor Lubinetsky

Accompagner les grands et les loufoques, de l’intérêt d’être bien accompagnée…

Florence et Emelyne ont joué avec et aux côtés de grands artistes tels Manu Dibango, Charles Aznavour, Johnny Hallyday, entres autres. « Certains d’entre eux étaient insupportables, reconnait Florence. Mais on est bien obligées de les supporter pour travailler ! Johnny était adorable et très généreux, comme Jane Birkin. Et parfois, c’est plus compliqué. Il faut réclamer pour être payées. Comme si c’était un privilège d’avoir joué à leurs côtés. C’est bien connu, nous les artistes, vivons d’amour et d’eau fraiche. Ils prennent un air outré quand on réclame notre dû. Nous voilà matérialistes ! Comme si c’était vulgaire de parler d’argent. Il y a aussi les capricieux, les prétentieux. L’avantage avec le Quatuor, c’est que nous choisissons avec qui nous voulons travailler. Et ça, c’est très appréciable ». Sur de grosses productions, les musiciennes n’ont pas leur mot à dire. Elles doivent s’adapter à ce qui est écrit. « Certains sont plus sympas que d’autres, moins dirigistes ». Emelyne et Florence, vraies passionnées, devenues amies, ne sont jamais frustrées, même lors d’un séminaire ou d’un mariage, si on les « entend » plus qu’on ne les « écoute », un peu comme les pianistes de bar. « Il faut bien choisir sa partenaire, précise Florence. Nous avons plaisir à jouer ensemble. C’est un challenge d’arriver à capter l’attention d’une personne qui se repose entre deux conférences, comme à La Baule. Mais le tango de Piazzolla n’a laissé personne indifférent, par exemple. Et puis on est loin du camping-car avec le sandwich (rires). A l’Hermitage, le cadre est magnifique, on est bien traitées quand même. Il y a pire dans la vie ! Les conditions étaient bonnes. »

Lors de la dernière édition d’Expérience Client/The French Forum – © Emil Hernon

 

J’avais une dernière question, je l’ai donc posée : quelles qualités faut-il réunir et pour réussir, en tant que musicienne professionnelle ? La réponse n’a pas tardé : être polyvalente et savoir s’adapter. « J’ai fait des concerts sur des patins à glace, raconte Florence et avec des costumes improbables et un violon électrique blanc. Emelyne, elle, a joué sur une balançoire, dans une situation pour le moins déséquilibrante. »
« Parfois, nous devons travailler avec des incompétents, ou des gens qui n’y connaissent rien. Et qui vous demandent des choses impossibles, voire stupides. Un jour, on m’a demandé de jouer le Boléro de Ravel toute seule », s’amuse Emelyne. « Les galères peuvent devenir drôles, quand on est entre copines. On se marre bien. Seules, ça peut être plus difficile. Mais la plupart du temps, ça se passe bien. Nous faisons ce qu’on aime. Et ça, ce n’est pas donné à tout le monde ».

Comment s’est faite la rencontre avec Emma et Sophie ?

« Dans notre métier, nous multiplions les expériences et du coup les rencontres. Notre chemin a croisé celui de Sophie (Durteste),30 ans, et plus tard celui d’Emma (Piettre), 37 ans. Sophie est un vrai rayon de soleil et Emma joue du violoncelle, en clair elle apporte le groove des basses. Nous avons ensuite beaucoup travaillé ensemble, repensé un nouveau répertoire et ensuite inspiré des arrangeurs-compositeurs qui écrivent désormais pour nous, comme Thomas Verovski ou Thomas Bernardini. »

Par Guillaume Chérel

 

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