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«Nous sommes l’opposé de Airbnb». Max Aniort, loueur de villas de luxe avec Le Collectionnist

Publié le 23 août 2024 à 05:30 par Magazine En-Contact
«Nous sommes l’opposé de Airbnb». Max Aniort, loueur de villas de luxe avec Le Collectionnist

Une location saisonnière à 2,5 millions d’euros, ça existe. Quel est le champion français, leader européen de son secteur, qui se présente comme l’opposé d’Airbnb et n’est pas sur le point d’être racheté par Accor ? Le Collectionist. Sachant que le nombre de millionnaires est en forte croissance dans le monde, l’entreprise semble positionnée sur un marché porteur : Highstay, Homanie, Iconic House..  sont quelques-unes des autres entreprises lancées sur des créneaux similaires. Un marché mondial à 25 milliards de dollars, ça suscite de l'intérêt. 

Max Aniort et ses 300 collaborateurs tentent de satisfaire les ultimes désirs de 5000 clients annuels, désireux, avec Le Collectionist, de vivre une expérience de vacances à la hauteur de leurs attentes. Quelles sont-elles ? Comment s’assure-t-on de disposer des plus belles villas, chalets ?

Entretien* avec le PDG de l'un de nos champions français du tourisme, rentable, et qui est désormais seul à la direction de l’entreprise, créée initialement avec Eliott Cohen-Skalli et Olivier Cahané.

Max Aniort, The Collectionist © Edouard Jacquinet

Les standards d’expérience client, voyageurs ont-ils changé sur votre marché en dix ans ?
Nous ne sommes plus en effet la start-up d’il y a dix ans et grâce à nos 5000 clients accueillis par an et l’écoute de leurs attentes, nous sommes parvenus à les classer dans des catégories plus ou moins homogènes et avons été obligés de le faire. La première d’entre elles est ce que nous appelons l’affordable luxury et ne correspond pas à la catégorie la plus exigeante. L’an passé par exemple, nous avons assuré une location à 2,5 millions d’euros pour l’un de nos clients. Il s’agissait de clients anglais qui ont loué un châlet pour plusieurs mois. Dans ce type de cas, la composante de services est forcément significative.

Ce type de commandes est-il fréquent ?
On aimerait bien mais c’est tout de même exceptionnel même si nous réalisons souvent des locations qui dépassent le million d’euros.

Qu’est-ce qui a motivé la création de l’entreprise, le projet de départ ?
(..) C’est une pure opportunité de marché, Airbnb était en plein essor en 2014, offrant aux voyageurs des solutions abordables pour se loger. On a senti qu’il y avait une verticale à faire sur le secteur de l’immobilier de luxe, avec pour objectif de combler ce vide en proposant des propriétés haut de gamme en location courte durée et en offrant une expérience luxueuse et sur mesure. Cela n’existait que dans les petites agences locales et c’était très restrictif d’un point de vue géographique. Il n’y avait alors pas de plateformes qui couvrait plusieurs destinations et qui s’engageait à une bonne expérience client des deux côtés, côté propriétaire et côté locataire. 

Nous sommes l’opposé de Airbnb. Chez nous, les deux parties ne se parlent jamais, nous sommes l’interface pour tout (…)

Comment sélectionnez-vous les villas que vous proposez à la location ?
(…) Pour dénicher les biens les plus exceptionnels, nous adoptons une double stratégie. Même si nous sommes constamment à la recherche de propriétés extraordinaires, nous sommes également très sélectifs sur nos choix en n’acceptant que 5 % des maisons qui nous sont proposées directement. Nous appliquons des critères très rigoureux pour nous assurer que nous ne choisissons que les meilleures maisons en termes de prestation et de caractère. Nos bureaux régionaux nous permettent de nous immerger dans la vie locale de nos destinations et d’établir des relations privilégiées avec les propriétaires, tout en nous faisant découvrir des propriétés remarquables grâce au bouche-à-oreille. Chaque année, 300 villas ou chalets sortent de notre catalogue (…)

Quelques clients se plaignent sur Trustpilot ou Google MyBusiness de prestations non conformes et utilisent parfois des termes très durs. Cela vous obsède-t-il, comment éviter ceci ?
Notre métier est un métier de services et il peut y avoir des loupés, plus ou moins objectifs. L’important est le ratio clients mécontents comparé au nombre de clients servis et accueillis.
Dans ces cas-là, nous tentons de réagir au plus vite, durant le séjour lorsque l’insatisfaction ou l’incompréhension survient. C’est le rôle des managers locaux, sachant qu’il y a un SAV internalisé, disponible jusqu’à 22h et à partir de 7h le matin, 7J/7.
L’important est donc, comme je le précisais plus haut, de bien définir la demande et les attentes du client, dès le départ. La connaissance client est donc un sujet essentiel. Dès que le prospect arrive sur notre site web ou plateforme, nous prenons contact avec lui, afin de bien définir ses attentes, le contexte de la demande.
Nous avons également appris que certains moments du parcours client peuvent être critiques, comme celui de l’encaissement de la caution, et la revue de dégâts en fin de séjour. Si nous la retenons, il faut être certain de s’être bien entendu en amont, sur les états des lieux d’entrée et de sortie. D’autant que les montants de cautions sont significatifs.
L’écoute de la voix du client, de ses attentes débute donc dès sa demande, la commande, lors du séjour et se prolonge après celui-ci. Nous appelons systématiquement tous nos clients, afin de recueillir leur point de vue et de mesurer le NPS. En interne, Slack nous permet de partager toutes ces informations.

Quelques offres du Collectionist

Y’a-t-il une direction de l’expérience client, en interne ?
Non, car ce sujet est l’affaire de tous, mais il y a une direction de la qualité.

Les consommateurs sont de plus réticents à décrocher les appels, difficiles à joindre. Comment opérez-vous ? Comment et avec quel type d’outils gérez-vous votre CRM ?
Le contact par téléphone est essentiel et WhatsApp est devenu un standard. Nous l’utilisons presque systématiquement, avec l’accord de notre client.
Nous utilisons Hubspot, qui est fonctionnel et moins onéreux que Salesforce et Slack pour le partage des informations utiles à tous en interne

Jusqu’où va le service de conciergerie ?
(..) Nous sommes avant tout une marque de location de vacances avec services. Depuis le début, il y a vraiment une curation, une inspection - avec les plus et les moins de chaque bien - y compris géographiques. L’idée du départ était de proposer un bon portefeuille de maisons. Le côté conciergerie n’a d’ailleurs été mis en place que deux ans après la création de la société. On a alors monté un véritable service. Aujourd’hui, sans surprise, les plus demandés sont chef à domicile, location de bateau et moniteur de ski. À Verbier (en Suisse) le concierge est aussi prof de ski ! Une prestation comprise les deux premiers jours de location. Le service est très poussé, des tables impossibles à réserver dans ce restaurant qui ne répond pas au téléphone, à la plage privée de Saint Tropez qui refuse du monde. Mais on peut aussi organiser des petits mariages, des soirées, faire venir un champion du monde mixologie... (..)

Où situez-vous la limite des services qui peuvent être demandés, apportés ?
On peut tout faire et assurer tant que c’est légal. La deuxième limite posée est que le service ne peut devenir la servitude.

Accor a racheté voici des années John Paul, un acteur de la conciergerie. Pourriez-vous un jour être racheté par Accor ?
Ce n’est pas en projet même s’il peut m’arriver d’avoir des discussions enrichissantes avec Sébastien Bazin, le PDG du groupe. Nous sommes plutôt dans une démarche de développement via des acquisitions. C’est le mode qui me semble adapté pour aller vite et rester conforme à nos standards.

Nb : Près d’Annecy, par exemple, où l’entreprise possède un de ses trois bureaux en France, avec Marseille, c’est l’activité de Vallat Immobilier qui a été rachetée.

Saint-Tropez, Ibiza, Méribel, la Toscane sont les destinations les plus demandées
(..) Nos voyageurs vont et demandent toujours les mêmes destinations : Courchevel, Méribel, Val d’Isère, La Sardaigne, Saint-Tropez, Ibiza, La Toscane… Ce qui est important pour eux, c’est plus les effets de communauté et de retrouver les groupes avec qui ils interagissent le reste de l’année. Nous n’avons pas vraiment de destination hors des sentiers battus, même si nous constatons un intérêt croissant pour des lieux plus confidentiels, tels que l’Ombrie ou l’Istrie. Encore une fois, ce sont surtout des cycles de destinations connues.

Chaque conversation est un penalty. 

( Les 100 VIP ou spécialistes de l'expérience et des parcours clients en France / De l'importance de l'appel téléphonique et de la conversation) 

Comme dans la vente de voitures de luxe ou de collection, dans l'évènementiel, l'utilisation pertinente de l'outil téléphonique, de WhatsApp, se révèle essentielle: rien de tel qu'une conversation pour connaitre et déterminer les attentes, d'un prospect, d'un candidat, d'un client mécontent. C'est ce qui explique la thématique choisie pour la 12ème édition d'ECTFF, le Forum de l'Expérience Client qui débutera le 23/09 à la Baule, à l'Hermitage Barrière. 

Les organisateurs y ont invité Anne Rigail, d'Air France, Damien Nuyttens ( Edenred), Max Aniort, Michel Faul, le guide conférencier français le plus suivi sur les réseaux sociaux, Guerlain Chicherit (Les Etincelles), Jérôme Bourdenet qui tient un monastère un peu spécial à Rochefort du Gard, près d'un sanctuaire. “Nous avons établi une liste des cent personnes ou PDG en France dans le métier desquels les parcours clients, la connaissance client sont au coeur de l'expérience client, patients, passagers. Et qui sont soit en avance sur ces sujets, ou en recherche. Ainsi que 3 start-up, comme chaque année. Nous les avons tous invités, avec un procédé vieux comme le monde: envoi d'un carton d'invitation et Top Call ensuite. L'opération est en cours, elle est passionnante et instructive” indique Manuel Jacquinet, l'organisateur du Forum. 

ageLe magazine En Contact #133

C’est à savoir :
Il arrive fréquemment à l’entreprise de collaborer avec des producteurs de films, en recherche de lieux de tournage spécifiques.
Les nouveautés : Le Collectionist a développé une activité de vente de villas.

Quelques chiffres
En 2024, la plateforme référençant 3000 adresses. 300 propriétés sortent chaque année du « catalogue », parce qu’elles ne correspondent pas aux standards exigés. Fin 2022 et pour la première fois, le cap des 100 millions de volume d’affaires aurait été atteint.
L’objectif annoncé est de réaliser 500 millions d’euros en 2026.
Rentable depuis 2020, l’entreprise aurait l’un des paniers moyens parmi les plus élevés du marché (30.000 euros pour un séjour moyen de dix jours).
Le panier moyen de services conciergerie par séjour est de 5000 euros.
30% des clients sont des clients réguliers.
L’entreprise emploie 300 CDI et recrute chaque été plus de 300 CDD ou free-lance pour des contrats de 6 mois.
Le marché de la location de villas de luxe serait estimé à 25 milliards de dollars par an.

Qui est Max Aniort ?
Originaire de la côte bretonne et issu d’une longue lignée de voyageurs, Max Aniort a vécu une grande partie de son enfance à l’étranger, notamment en Arabie saoudite et en Grèce.

*Quelques-unes des citations, celles mentionnées en italiques, sont des reprises des propos de l’interview donnée par Max Aniort au Figaro, en avril de cette année.

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