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« Lorsqu’elles réfléchissent à plus de simplicité, les entreprises ne sont pas toutes logées à la même enseigne »

Publié le 18 février 2021 à 10:27 par Magazine En-Contact
« Lorsqu’elles réfléchissent à plus de simplicité, les entreprises ne sont pas toutes logées à la même enseigne »

Il n’est ni chercheur, ni sociologue des organisations, mais son parcours, sa finesse d’analyse et la vision à 360 degrés que lui autorise sa bonne connaissance des technologies de RPA, du BPO m’ont souvent impressionné. Depuis la ville de Charentes où, comme bien d’autres, ce père de famille, juriste de formation, enchaine conf’call et tâches du quotidien, Fabien Fouissard nous a partagé ses convictions. Sur l’intérêt et le nom des bons CRM, sur ce qu’il convient de détruire pour rentrer dans le monde d’après, sur l’utilité pour un petit commerçant de penser digital…

Fabien Fouissard
Fabien Fouissard – © DR

En-Contact : Depuis combien de temps grenouilles-tu dans le monde des outils et métiers qui permettent de fluidifier, de personnaliser, d’externaliser ?
Fabien Fouissard : J’ai envie de dire que j’y suis depuis le départ ; ma carrière a débuté dans une filiale de la BNP puis des Galeries Lafayette, chez Laser Contact, sur un métier opérationnel : superviseur d’une équipe de service client pour la BNP. Donc, forcément j’ai été confronté dès le départ aux problématiques métier, processus, outils X et Y sur la question. Ensuite j’ai passé cinq ans, toujours chez Laser Contact, au sein d’un département qualité : décrire les process, regarder également les trucs un peu bizarres, tenter de les optimiser, de prendre en compte la complexité du BPO sachant qu’à un moment donné tu as également un prestataire et qu’il existe un système d’information, des briques CRM, des briques innovantes tel le live chat, la visio, et désormais toute la partie réseaux sociaux, Twitter… Travailler chez Nice a été une forme d’aboutissement dans cette réflexion d’optimisation des processus car Nice avait une solution de RPA.

Tu as également tenu un blog pendant des années ?
Oui il s’appelait Urmacht Relationship Management, du nom d’un personnage d’une bande-dessinée, un démon dans mes souvenirs ; je cherchais à trouver un acronyme : lorsque tu travailles dans un grand groupe, c’est compliqué parfois d’avoir des prises de parole, d’autant qu’à l’époque j’étais plus incisif. Et puis j’ai également travaillé chez les prestataires et notamment chez le numéro 1, Teleperformance.

Le besoin de simplicité, de personnalisation et de réactivité qu’attendent tous les consommateurs aujourd’hui peut-il être satisfait par les marques, les institutions et comment, selon toi ?
Il faut distinguer des situations organisationnelles et d’entreprise. Une entreprise jeune a la capacité et la chance, si elle travaille correctement, de mettre en place son bon système d’information, un bon CRM et des processus pour être au plus près de la réponse au client, positive. Une partie des entreprises et notamment celles qui ont le plus d’impact dans la vie des consommateurs, un Tik-tok ou un Facebook, sont dans ce cas mais il faut noter qu’elles n’ont a pas de concrétisation matérielle, de produit physique. Celles au contraire qui proposent des produits ou qui ont une histoire importante sont confrontées à leur poids, à cette histoire précisément et ça peut être très compliqué de s’en affranchir et c’est normal. Certaines organisations font en sorte de s’améliorer et/mais elles savent que pour aller vers de la simplicité, il faut pouvoir rendre certains sujets transverses et potentiellement les refondre. Et plus une entreprise est complexe, plus elle propose de choses, plus il existe d’intermédiaires. Je pense notamment aux sujets liés à la supply-chain. On n’est donc pas tous logés à la même enseigne quand on vise à la simplicité.
La première des choses consiste à se poser la question de ce qui est utile et de ce qui ne l’est pas, d’accepter de pouvoir détruire, supprimer les éléments d’organisation qui existent parfois depuis très longtemps. Mais tout remettre cause crée également des incertitudes, par exemple pour les salariés. Et l’on est en France, avec quantité de points réglementaires sur la question ; réussir à faire adhérer les gens, pour qu’ils remettent en question, en permanence, leurs systèmes sans systématiquement d’ailleurs se sentir obligés de passer par des audits, des sociétés de conseil pour le faire. Ensuite, souvent, dans une entreprise d’une certaine taille, assez compliquée, la complexité du process est liée à des contrôles, qui sont légitimes. En banque et finance, tu n’as pas le choix, si tu ne les fais pas, c’est impossible. Simplifier justement ces contrôles-là et faire en sorte qu’ils représentent une charge minimum, les automatiser à 100% correspond au RPA. J’y ai travaillé justement parce que j’avais trouvé ça plutôt sympa, les ERP, les solutions de CRM, de simplification. L’enjeu grâce à ceci et aux outils de RPA est de rendre les tâches de contrôle plus simples.
Sur le sujet du CRM, le but du jeu est clair et connu ; faire en sorte que les différents canaux ne soient pas traités en mode silos etc. Chez Orange, SFR, EDF, forcément, à des fins d’optimisation du business model et des coûts, on spécialise des gens, mais il existe vraiment un risque à travailler en silos. A minima ceux qui déversent des informations, des données et qui sont en charge des demandes doivent pouvoir recourir à des solutions unifiées, et aujourd’hui, ça existe.

Si demain, tu t’installes en auto- entrepreneur, pour débuter, que conseilles-tu à quelqu’un qui fait du commerce physique ou à distance ?
De se forcer à avoir une présence web. Et quand je dis « se forcer », je parle d’efforts parce qu’aujourd’hui la partie SEO est très compliquée : concevoir des contenus pour être référencé… C’est un investissement, c’est vrai et ce n’est pas forcément logique, pour quelqu’un qui vend des chaussures, des luminaires, ce n’est pas forcément dans sa culture. Ça dépend également de l’âge que tu as : est-ce que tu baignes dans cette dimension-là ou pas, mais il ne faut pas se le cacher. J’habite en province, j’y connais une personne qui fait de la récupération de bois et qui crée des luminaires ; il a fait l’effort d’être présent sur Facebook, sur Instagram. Ça participe d’une communauté, de la création de trafic et ça doit devenir naturel. Le deuxième conseil ensuite, sur la partie organisationnelle, est de regarder tout ce qui est pénible pour le client, de se mettre à la place du client : faire preuve d’empathie par rapport à sa vie passée, par rapport à son propre référentiel, pour essayer de se dire « comment tenter de faire pour que ce soit le plus simple possible d’avoir accès à mes produits, mes services, et pour, potentiellement, gérer au mieux les réclamations, ce qui peut d’ailleurs avoir un impact également sur la partie avec les fournisseurs. Au bout du bout, se dire : il faut qu’on se souvienne de moi, qu’on me recommande. La dernière fondation est de maintenir le dialogue avec ses clients ; et je pense notamment aux commerçants, qui ont du mal à récupérer des numéros de téléphone, des e-mails. C’est ce que je dis souvent, notamment à une personne qui vend des chaussures à côté de chez moi, mais qui a 55 ans et donc je peux comprendre qu’à un moment donné… Encore une fois on en revient à l’abandon de sa culture, de son propre référentiel. Pour cette personne, jusqu’à présent, le business avait toujours fonctionné autrement mais je lui dis : « Franchement, ça ne coûte pas grand-chose de prendre un e-mail, de récupérer un numéro de portable ; tes clients et clientes te le donneront avec grand plaisir. Et à un moment donné, tu leur envoies un message, une vidéo ; tu crées du lien ». Le lien aujourd’hui n’est plus seulement dans le monde physique ; il est dans le monde digital. Il faut apprendre à créer ce lien aussi, non seulement dans le monde physique mais également dans le monde digital, ce lien un peu phygital. Le terme est devenu à la mode.

Tu as été amené à déménager récemment et tu vis à Angoulême. Quid du télétravail ?
Je ne serais malheureusement pas forcément un super interlocuteur sur la question télétravail, j’ai pu commencer à en faire de façon non négligeable depuis 2007, parce que, régulièrement, je me suis retrouvé à distance du siège de l’entreprise qui m’employait. Une solution technologique n’est jamais la réponse à tout, mais c’est fondamental d’en avoir une. Si tu commences à vouloir faire du télétravail et que tu disposes juste d’une messagerie Outlook et de ton téléphone fixe ou portable, tu perds un peu en fluidification. Pour le reste, nous demeurons des humains, des animaux sociaux ; on a donc besoin de se voir régulièrement. À titre d’exemple, ma boîte a lancé un truc qui s’appelle VRC, le Virtual Random Coffee et je trouve ça hyper malin. Un tirage au sort est fait et t’invite alors à organiser un rdv avec trois personnes qui doivent se parler. Pour moi, qui  suis rentré il n’y a pas si longtemps dans la structure, qui n’y connait pas beaucoup de monde, c’est très utile et agréable : parler à des collègues que je ne connaissais pas, apprendre qu’il y en a un qui déménage, un autre qui va se marier, une autre qui joue à des jeux de société ; ça ne  coûte pas très cher, ça oblige, mais ça crée vraiment du lien.

Fabien Fouissard est Channel Manager et Alliance chez Vekia. Il a travaillé chez Laser Contact, chez Teleperformance, chez Nice et dans diverses autres sociétés de service.

Par Manuel Jacquinet

Voir notre Dossier sur Les Facilitateurs.

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