Michel Ruiz, ex-militaire reconverti dans la réalité augmentée et l'expérience client
Du monde militaire à l’expérience client ? C’est possible et il l’a fait ! A la tête de KaviAR Tech, Michel Ruiz continue le développement de son entreprise avec toujours plus de nouvelles technologies pour de nouvelles applications. Rencontre avec un passionné de la tech, toujours au service du client.
Pouvez-vous nous résumer votre parcours ? Quelles ont été les étapes importantes de vie professionnelle ?
J’ai eu une première carrière au sein du ministère de la Défense, en tant que technicien expert en armement, j’y ai passé 25 ans en terminant major. J’ai fait beaucoup de recherche et développement comme conseiller pédagogie et auditeur qualité, ces deux notions auront leur importance pour la suite de mon parcours.
J’ai quitté le Ministère de la Défense pour me lancer dans le e-commerce, avec une orientation client puisque j’ai créé la première centrale d’achat, une sorte de comité d’entreprise pour les militaires. Cette expérience n’est pas allée au bout par manque de fonds.
A l’issue, je me suis donc reconverti en passant un master en marketing digital à l’ISTEC. Avant cela j’étais consultant et directeur marketing du groupe Conseil CE, dans le monde des comités d’entreprise.
J’ai créé KaviAR Tech il y a 6 ans maintenant car j’ai toujours été passionné de technologie. Je m’étais beaucoup concentré sur les usages dans mes fonctions marketing, j’ai essayé d’identifier des technologies qui permettraient de venir appuyer les nouveaux usages des jeunes générations. Parmi tout cela, il y avait la réalité augmentée qui commençait à démarrer et c’est dans ce sujet que nous nous sommes lancés avec KaviAR Tech.
Quelles leçons avez-vous pu tirer de votre parcours au regard de l’expérience client ?
Le plus compliqué est de se confronter au marché. Quand on développe nos produits, on est persuadé qu’ils sont bien alors qu’on délaisse souvent une partie du product market fit. Ça revient à se demander si on vend des médicaments ou des vitamines ? Le médicament apporte un traitement ciblé tandis que le complément alimentaire, la vitamine répond à une application plus diffuse. Une fois qu’on a identifié une douleur du marché, on met tout en œuvre pour répondre à cette douleur. Chez KaviAR Tech nous vendons un vrai médicament : des produits et des solutions physique, digitale et phygitale et les clients sont prêts à payer pour ça.
La rencontre avec le produit et le product market fit est au cœur du dispositif. On ne fait pas un produit pour soi mais pour les utilisateurs. Il ne faut pas avoir peur de se confronter au marché. L’entrepreneur se maintient souvent dans une forme de confort. On essaye trop souvent de confronter le produit à des gens qu’on connaît et qui manquent parfois de sincérité. Il peut exister un biais dans ce que l’on perçoit, qui n’est pas toujours pertinent.
Comment s’est passé le passage du monde militaire au service client ?
L’avantage du monde militaire est d’apprendre à se concentrer sur l’objectif : « un chef, une mission, des moyens ». Dans tous les cas, à la fin il faut réussir à remplir la mission. On s’habitue à travailler avec des moyens contraints et à s’adapter mais la notion de service client reste inconnue.
Il m’a fallu acquérir des compétences de commercial : convaincre, trouver un argumentaire et vendre un produit à valeur ajoutée. On nous a appris à délivrer mais pas à vendre. Lorsque l’on arrive dans l’entrepreneuriat, la clé est la vente. C’est la raison pour laquelle, j’ai souhaité passer un diplôme en marketing.
La transition pour vous s’est donc bien passée a priori ?
J’étais formateur donc je savais déjà convaincre et m’exprimer en public. Il restait juste la partie financière et savoir comment diriger l’effort, notamment en ce qui concerne le pricing produit. Au départ, on pensait qu’un produit en mode SaaS aurait fonctionné tout seul mais on s’est rapidement rendu compte qu’en faisant des affaires en B2B ou en B2B2C, il y avait un effort à produire.
Nous sommes confrontés à deux choses par rapport aux clients : la résistance au changement, les équipes ne veulent parfois pas de nouveau produit, de nouvelle façon de travailler. Ensuite, avec la courbe d’apprentissage se pose la question de savoir si j’ai assez d’énergie et de temps pour réaliser moi-même certaines opérations. On s’est rendu compte que les gens avaient un temps d’attention très limité, c’est un des succès de l’IA avec le NLP (Natural language processing), qui permet de demander quelque chose verbalement pour avoir une réponse très construite.
Il nous aura fallu 6 ans pour trouver le produit. Des personnes nous avaient parlé d’environnement 3D, immersif ou de métavers. Une entreprise a besoin de ROI. Ce qui l’intéresse c’est d’identifier le comportement d’un utilisateur comme si on était en présence physique avec lui. Sur internet, le taux de conversion est compris entre 1 et 4% tandis qu’en boutique, ce taux est de 50%. La raison ? Le facteur inspirationnel. Le vendeur voit ce que le client regarde ce qui lui permet de préparer son argumentaire.
La réalité augmentée offre un retour sur investissement incroyable grâce à un environnement de vente qui peut être appliqué aux agences bancaires, agences de voyage et aux agences d’emploi. On peut voir en temps réel ce que voit le client. « Rentrer dans les yeux des clients », c’est la partie qui change tout.
Il s’agit d’une vraie notion d’opt-in car on ne récupère aucune donnée a priori, uniquement après contact avec le vendeur, comme en boutique. La qualification va se faire en temps réel avec un vrai conseiller. Pour autant, on n’oublie pas l’IA : on pourra par exemple préenregistrer des phrases pour s’adresser aux clients hors des horaires de bureau par exemple.
Comment se traduit l’agence immersive du point de vue de la couche physique (hardware) ?
Nous disposons de trois canaux possibles : d’abord l’écran d’ordinateur qui permet de se déplacer sur une scène 3D (web GL), ensuite la partie « application smartphone », qui permet de s’immerger dans un environnement 3D sans bouton. Le troisième canal est un casque de réalité virtuelle.
Quelle est la singularité de votre parcours et de KaviAR Tech ?
J’ai été très longtemps placé dans des contraintes très opérationnelles avec des notions de sécurité et d’environnement contraignant. Aujourd’hui, avec le développement de mes produits, je me sers de ces contraintes opérationnelles pour arriver à livrer des produits avec un impact fort, auxquels on ajoute une couche de marketing. J’ai gardé la rigueur du process d’execution pour y ajouter une partie commerciale. La notion de cahier des charges est très importante ainsi que l’écoute client pour répondre à la problématique posée.
Quelle est la situation ou l’anecdote que vous avez vis-à-vis de l’expérience client ?
Aujourd’hui nous avons une application qui permet d’augmenter des contenus, sur le modèle des QR code mais sans QR code. On peut par exemple scanner une photo dans la rue avec son smartphone et la photo bouge, se transforme. Parfois, ceux qui utilisent un appareil photo ne comprennent pas pourquoi ça ne fonctionne pas. C’est le véritable apport des technologies que nous développons, cela montre que le plus gros de notre travail aujourd’hui c’est l’évangélisation. La technologie est autour de nous, elle est partout. Pour nous ça nous paraît évident mais ça ne l’est pas pour tout le monde.
Notre produit a été fabriqué il y a 6 ans mais on le vend avec beaucoup plus de facilité aujourd’hui, car auparavant le marché n’était pas mûr.
A présent, l’IA permet à présent de créer des contenus à la volée. Réalité augmentée, IA, agence immersive : l’expérience client de demain va être complètement révolutionnée. Il y a une forme d’accélérateur. Il va y avoir de plus en plus de contenu mais il s’agira donc d’identifier les bons usages.
Quelle empreinte souhaiteriez-vous laisser dans le secteur de l’expérience client ?
KaviAR Tech appartient au groupe Interaction, grand groupe d’intérim français. Nous participerons au salon des maires au mois de novembre pour présenter notre cabine immersive de l’emploi, qui sera installée dans certaines communes reculées du désert économique français. Concrètement cette cabine placée dans la mairie permettra aux personnes cherchant du travail de se connecter à une tablette et d’être mis en relation avec un conseiller pour trouver des offres proches de chez eux.
Comme le disait Jacques-Antoine Granjon il y a plus de 15 ans : « Si on veut savoir si on a une bonne idée, il faut se poser une seule question : est-ce qu’on change vraiment la vie des gens ? ». Nous essayons de changer la vie des gens avec le travail, avec l’emploi par la technologie. Trouver du travail à quelqu’un c’est vraiment lui changer la vie.
On vous le disait, de l’expérience client à l’expérience candidat il n’y a qu’un pas.