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«Le retail du futur mesurera l’expérience client au mètre carré»

Publié le 14 août 2024 à 10:30 par Magazine En-Contact
«Le retail du futur mesurera l’expérience client au mètre carré»

Les distributeurs se réinventent et font évoluer leur offre pour procurer une expérience client plus aboutie, répondre aux attentes de proximité, de fluidité des parcours, de traçabilité des produits... Explications avec OdilePerraudin-Juillard, Business Development Executive Distribution chez IBM France.

Odile Perraudin-Juillard

Quels challenges les distributeurs doivent-ils relever pour inventer le retail du futur ?
Odile Perraudin-Juillard : Ils doivent tout à la fois prendre en compte les risques de désintermédiation des pure players, l’arrivée de nouveaux acteurs comme l’enseigne américaine Costco, spécialisée dans les gros volumes à bas prix, qui vient de s’installer en France, l’évolution d’acteurs locaux... Dans le domaine de l’alimentaire, environ 90 % des transactions continuent de se faire en magasin, mais on a vu émerger des acteurs positionnés sur les circuits courts comme les Amap ou La ruche qui dit oui.
Du côté des réseaux, deux mouvements se développent. Certaines enseignes ouvrent des magasins plus petits en hypercentre : Sephora avec ses boutiques connectées Sephora Flash, Boulanger et Ikea qui s’installent en agglomération avec des surfaces de vente plus réduites ou sur des gammes plus spécialisées. D’autres, comme Primark, développent des magasins encore plus grands que par le passé.

La distribution doit répondre à de nouvelles exigences des consommateurs sur la traçabilité et la réparabilité des produits, sur le développement durable... Comme les parcours d’achat commencent le plus souvent sur le Web, les informations en temps réel sur la disponibilité d’un produit deviennent essentielles. Selon l’étude IBM IBV, 60 % des consommateurs veulent savoir si le produit est bien en stock avant de se déplacer en magasin.

Chatbots, RFID, comment les retailers répondent-ils à ces attentes ?
O. P.-J. : Ils s’adaptent pour que les parcours clients deviennent les plus simples possible, par exemple avec des solutions de « voice shopping». Cela passe par des chatbots, qui facilitent la discussion, mais aussi par des boutons physiques que le client active et qui permettent de convertir la voix en commande. Le paiement doit aussi devenir plus fluide. Les traditionnelles lignes de caisse commencent parfois à disparaître au profit de systèmes dématérialisés, où le vendeur encaisse un achat sur une tablette ou un terminal mobile.

La Samaritaine, un projet hybride. ©LVMH

Le mobilier et les applications évoluent mais cela nécessite encore beaucoup de temps et d’espace dans les magasins afin de désactiver les antivols, imprimer les tickets et contrôler les achats à la sortie du magasin. L’étape ultime serait que le client scanne et paie tout seul les produits qu’il achète. Beaucoup de choses existent déjà et vont continuer à se perfectionner. On peut imaginer des puces RFID qui se désactivent lors du paiement, un caddie complet qui « s’autoscanne »... Mais gérer les 6000 visiteurs par jour qui passent dans un hypermarché et tous les articles de leur panier demanderait une telle puissance de calcul qu’on n’y est pas encore !

Qu’en est-il de l’expérience client en magasin ?
O. P.-J. : Les magasins doivent se transformer pour que les clients reviennent sur les points de vente vivre une expérience la plus exceptionnelle ou la plus mémorable possible. Quand une marque ne peut pas être la moins chère, elle doit se démarquer par l’expérience consommateur. On voit même arriver de nouveaux indicateurs comme « l’expérience client au mètre carré » !

Beaucoup d’établissements ont pris des initiatives autour de l’expérience client. L’enseigne canadienne de vêtements de sport féminins Lululemon organise par exemple des séances de yoga et de fitness dans ses points de vente. Aux États-Unis, la créatrice de mode haut de gamme Tory Burch décore ses magasins avec ses objets personnels. Les Galeries Lafayette Champs-Élysées, qui ouvrira en 2018, ou le futur espace Samaritaine ne se définissent d’ailleurs plus comme des « Department Stores » mais en tant que « Department Stage », un espace conçu comme une scène propice à la théâtralisation du point de vente. Le luxe commence à commercialiser des expériences rares. Les visites de caves, les démonstrations à domicile sont des éléments importants de la plateforme de vins et spiritueux Clos 19, ouverte par LVMH au Royaume-Uni.

Une analyse fine de la donnée clients aide à faire de la micro-segmentation et à calculer l’appétence de ceux-ci sur des offres ou des promotions personnalisées. À côté de la technologie pure, il y a aussi un gros travail sur la formation des vendeurs, qui doivent non seulement s’approprier les outils numériques mis à leur disposition en magasin, mais aussi être porteurs de la culture de l’entreprise.

Costco, le géant américain, est arrivé en France

Comment IBM accompagne-t-il les retailers dans leurs évolutions ?
O. P.-J. : Nous les aidons à industrialiser l’analyse des données et les services qui intègrent de l’intelligence augmentée et du cognitif, afin de mieux connaître le comportement des clients et d’anticiper leurs attentes. Sur la partie expérience client, le cognitif permet de faciliter l’interaction avec les clients quel que soit le canal, les vendeurs sont mieux formés, les clients mieux renseignés sur le Web ou leur mobile. De plus, il faut souvent qu’ils modifient leurs systèmes d’information. Le développement de l’omnicanal implique une intégration des systèmes et la mise en place de nouvelles briques pour mieux orchestrer les commandes, savoir à quel niveau se situe le produit, pour que le système d’information soit connecté au stock dans les magasins...

Beaucoup de demandes de vendeurs vont dans ce sens car ils sentent bien la nécessité de passer à la vitesse supérieure. La blockchain offre aussi de nombreuses perspectives. IBM vient de nouer un partenariat avec une dizaine de grands groupes, parmi lesquels Walmart, Nestlé, Unilever, McLane Company (premier fournisseur de McDonald’s, ndlr), pour travailler sur une plateforme commune autour de la traçabilité alimentaire. Depuis mars 2017, nous utilisons la blockchain avec le fournisseur de matériel électronique et d’ordinateurs Lenovo pour tracer les livraisons de l’usine jusqu’au client final. Dans le luxe, cette technologie permet de certifier l’authenticité des produits. Avec nos studios, nous aidons aussi les retailers à créer des parcours utilisateurs et des parcours client qui procurent de nouvelles expériences.

 

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