La Chemise Française perdure, séduit des grandes marques du luxe et embarque Stéphane Bern

La chemise blanche en popeline, un incontournable ! Où se la procurer, en boutiques ou à distance ? Charvet, qu'apprécie Bernard-Henri Lévy, n'est pas à la portée de toutes les bourses, Café Coton vient d'être cédé, après une période délicate tandis que Figaret ne ferait plus fabriquer les siennes en France.
Dans le petit camp retranché de Chalon-sur-Saône, un fabricant résiste: les Ateliers Gauthier qui vend ses produits en popeline sous une marque qui sonne comme une évidence : La Chemise Française.
C’est l’un des rares fabricants français de chemises encore en activité en France.
« Il doit en rester une petite demi-douzaine, dont ceux que vous citez dans votre article. Parmi nos « concurrents », peu produisent encore en France ». Contrairement à Café Coton, il n’a pas investi dans un réseau de distribution mais dans son savoir-faire jalousement gardé par des dames. Les confidences et la vision d’un jeune PDG, qui prit très tôt le goût de fréquenter les ateliers de l’entreprise familiale, la dirige désormais et rend hommage au talent de ses artisanes couturières.

Le savoir-faire plus utile que le stock.
Nous travaillons sous notre marque mais également en tant que sous-traitant pour de grandes marques de luxe, premium, que nous ne pouvons pas mentionner pour des raisons de confidentialité. Le stock et la nécessité de le porter ne sont pas vraiment une contrainte car nous n’en avons que très peu : nous fabriquons pour l’instant les chemises à la demande, après qu’elles ont été commandées, si ce n’est pour quelques références qui sont les grands classiques et les produits demandés.
Oui il y a encore un vrai savoir-faire dans la fabrication de ce produit, qui nécessite encore l’intervention de couturières (artisanes couturières). Tout ne peut pas être automatisé, robotisé, comme le sens du détail, de l’œil, du contrôle qualité. Mon père vendait des tissus et connaissait donc le secteur et les acteurs du textile, il a repris l’entreprise, dans laquelle ma mère a travaillé, travaille encore. Pour ma part, j’ai passé de nombreuses journées dans les ateliers depuis mon enfance. Il m’a été facile de m’y impliquer plus, ce que je fais désormais
Une boutique ?
Nous n’avons pas, pas encore de boutique à Paris, car une boutique coute cher ! Or nous auto-finançons notre croissance et attendons d’atteindre la taille et la notoriété qui justifie ce type d’investissement.
Se faire connaitre
J’ai une bonne idée de tous les chantiers à mener, je trie et gère les priorités. Parmi celles-ci, une campagne de pré-commande sur Ulule afin de rendre plus visible notre savoir-faire et de permettre exceptionnellement l’accès à nos chemises à un tarif préférentiel. Ce qui nous serait nécessaire pour grandir ou croitre plus vite serait d’engager des actions marketing, des campagnes de publicité mais tout ceci coûte énormément d’argent sans garantie de retour sur investissement. Très souvent, je suis contacté par des agences, des studios de design, des spécialistes qui indiquent qu’ils ont un savoir-faire qui nous serait utile. Jusque-là, nous n’avons pas engagé de collaboration avec ce type de consultants.

Les réseaux sociaux nous offrent un levier précieux : celui de parler directement à notre public, sans intermédiaire. Ce bouche-à-oreille numérique, conjugué à la réputation de notre savoir-faire, nous permet de grandir avec constance, dans une logique de bon sens.
J’ai pris contact avec Stéphane Bern, afin qu’il devienne le « parrain » de notre marque, entreprise, compte-tenu de son inclinaison pour la défense du patrimoine français.
Indépendance et temps long
Nous nous inscrivons dans le temps long : celui d’une mode intemporelle, éthique et durable. Notre ambition est simple mais forte : améliorer constamment nos standards, répondre aux exigences de nos clients et mériter leur fidélité - ni plus, ni moins. Aujourd’hui, cette fidélité se manifeste par un taux de retour quasi nul et une clientèle en ligne toujours plus nombreuse — signe que la qualité se fait reconnaître.
Propos recueillis auprès de Romain de Saint Jean, PDG de La Chemise Française.

Comment se battre avec des acteurs puissants, tels Bexley, Figaret ou d’autres dont le marketing est puissant, la marque connue et qui ont de grands moyens ?
Nous ne nous battons pas contre des marques. Nous ouvrons plutôt un dialogue avec toutes les personnes susceptibles de porter de belles chemises — des hommes et des femmes qui recherchent de la tenue, du savoir-faire, et du sens dans ce qu’ils portent.
Nous suivons une ligne directrice claire, fidèle à l’histoire de notre atelier : proposer une chemise de très haut niveau, confectionnée en France à partir de tissus, boutons et finitions de grande qualité, à un prix qui rémunère justement le travail de nos Artisanes-Couturières, nous permet de réinvestir dans notre savoir-faire, et, modestement, dans notre communication. Notre démarche n’est pas dictée par la course au volume ou à la notoriété immédiate. Nous avons fait le choix d’une croissance saine, en maîtrisant nos coûts et en investissant dans ce qui compte : la qualité, la relation avec nos clients, et le maintien d’emplois d’excellence sur le territoire français. C’est cette même exigence qui conduit, depuis des années, de grandes maisons de luxe à collaborer avec nos ateliers.
Propos recueillis auprès de Romain de Saint Jean, PDG de La Chemise Française.