Et si André (les chaussures) avait besoin d’un styliste ?
La fin de partie semble proche pour la marque célèbre de chaussures qui devrait être reprise par un e-marchand talentueux et bon gestionnaire (Spartoo) mais qui n’a pas jusqu’à ce jour démontré qu’il était fabricant de souliers ou styliste en chaussures et souliers.
Intrigué par cette issue que d’aucuns [voir l’article de Philippe Escande dans le Monde] considèrent comme le symbole de la mutation obligée des magasins vers plus de numérique, on s’est creusé la tête… Le chausseur qui savait chausser a-t-il loupé un coche, lequel et quand ?
De Georges Plassat à Carré Noir ou l’agence Simone… du beau monde était pourtant venu au chevet :
Depuis plus de vingt ans, malgré de nombreux efforts, des campagnes de publicité, le renouvellement du design de ses magasins par des agences renommées (Carré Noir) et des soirées d’inauguration où se presse le tout Paris (voir la photo et le lien ci-contre), la marque qui sait chausser n’a pu endiguer sa descente en enfer.
On a testé cette après-midi le service client et le site web : parfait. Commande passée rapidement, click-and-collect fonctionnel qui nous a permis de réserver une paire de chaussures en ligne et de savoir qu’elle nous attendait en magasin une heure plus tard : rien à redire. Tout l’attirail qui facilite l’expérience client en ligne est fonctionnel, efficace. On a même poussé le bouchon jusqu’à singer le client angoissé, qui rappelle le centre d’appels pour s’assurer que la paire est réellement en magasins. Parfait là aussi.
Pauline de Breteuil, Marie Victoire Achard, etc, les cadres ou ex-cadres en charge du marketing et du digital qui se sont succédées chez Vivarte n’ayant pu être jointes, on avait fait chou blanc dans notre enquête.
Mais pourquoi donc, alors que la parisienne est une accro de chaussures, que les soldes chez Louboutin ou Roger Vivier déclenchent une sorte de transe… souvent mystérieuse pour le mari ou compagnon spectateur de ces journées préparées et planifiées comme la tentative d’ascension du K2, que la superficie des rayons chaussures et accessoires ne cesse d’augmenter dans les flag-ships au point qu’ils ressembleront bientôt à des terrains de foot, une enseigne avec des prix si sages ne parvient elle pas à refaire surface ? On est allés voir la boutique voisine de la rédaction. Manque de bol, c’est précisément celle qui ne semble pas faire partie du plan de reprise (Victor Hugo, Paris 16). Toujours pas de réponse satisfaisante obtenue.
Quand soudain à 20H45, en 22 secondes…
Il a fallu moins de 22 secondes 3 dixièmes à l’une des femmes qui habite encore au foyer du rédacteur de ce complexe papier d’investigation pour produire une réponse sans équivoque :
“André ? ils ont trop de boutiques dans les villes,
là où leur clientèle attend d’autres produits, plus mode.
Et si tu regardes bien, Minelli, qui est juste un peu plus cher,
est beaucoup plus stylée, même si ça reste du Minelli”
Ce qui est bien dans les maisons où vivent des femmes grandes “shoppineuses” c’est que vous ne la ramenez pas trop. Si la Queen du retail en Angleterre s’appelle Mary Portas, en matière de souliers, c’est toujours la Parisienne qui vit à vos côtés qui dit juste, qu’on se le dise !
En d’autres termes, ce que les fonds d’investissement, les Georges Plassat, les repreneurs n’ont pas apparemment réussi à voir ou exécuter en vingt ans, tiendrait peut-être en 2 phrases : redéploiement des boutiques et collaboration avec un ou des stylistes qui feront à la marque ce que Gaucher (Jean Marc) et Jault (Olivier), ont fait à Repetto : un lifting complet.
Boris (Saragaglia, co-fondateur de Spartoo et possible repreneur) a peut-être ça en stock ou dans le viseur. C’est tout le mal qu’on souhaite aux quelques milliers de salariés de chez André.
Le service Fact-Checking du Magazine
Et si Vivarte avait acquis ShoeFitr, le sort en aurait-il été changé ?
Extrait du The Seamless Experience Fanzine n°9 – La lettre d’information business sur l’expérience client, publié le 21 janvier 2016 :
Oubliez la politique des retours gratuits. Oubliez les retours, tout court. Oubliez Zappos et Sarenza, qui ont réussi à force d’innovations techniques et de service à construire le marché de la chaussure en ligne. Un marché forcément anxiogène, tant il est difficile de trouver… chaussure à son pied, surtout quand on ne peut pas essayer lesdites groles, puisqu’on les achète en ligne. Et des retours qui coûtent cher au e-commerçant, surtout quand il les offre. C’est encore une fois Amazon qui révolutionne l’expérience client en ligne. Grâce au nouvel outil de sélection de taille, il est (presque) impossible de se tromper. Développé par la start-up Shoefitr, l’outil, disponible sur amazon.com (mais pas encore sur amazon.fr), permet de comparer la taille du modèle de chaussure désiré avec un que le consommateur a effectivement essayé, et qui est forcément dans la base de données de Shoefitr, qui a modélisé des millions de paires en plus de 5 ans d’existence. Le logiciel détermine alors la taille correspondante, et si le 44 taille « petit », vous recommandera un 45. Un modèle en 3D apparaît, qui explique exactement sur quelle partie du pied la chaussure sera plus ou moins large que la référence connue… Bluffant. Amazon ne s’y est pas trompé, qui a tout simplement acheté l’entreprise Shoefitr en avril 2015. Trop tard pour Stéphane Treppoz (patron de Sarenza) dont le chéquier garni par sa levée de fonds aurait pu servir à de telles acquisitions stratégiques.
La rédaction d’En-Contact
Photo de couverture : Mary Portas – © Edouard Jacquinet