Voyeur, mémoires indiscrets du roi des paparazzi
Des photographes qui ont l’idée de révéler le contenu des poubelles des stars parviennent à en faire des livres et à en vivre… On les appelle des paparazzi. Mais tous ne font pas fortune, et ne sont pas là pour vous importuner. Ils ont même des enfants, des femmes qu’ils aiment, épousent, quittent (?) et de temps à autre, commettent des livres intéressants. C’est le cas de Pascal Rostain, auteur de Voyeur (Grasset). Lisez les extraits de la préface – rédigée par Olivier de Kersauson – et de l’introduction : vous comprendrez que les 17 euros que vous allez dépenser pour ce livre sont un investissement judicieux. Bonne humeur et parole libre garanties, qui plus est quand l’auteur est suffisamment bien informé pour révéler le 10 février que Barack Obama aurait eu une liaison avec Beyoncé Knowles. Même Youssef Chraïbi, Twitter fou franco-marocain, a été pris de vitesse : il n’a pu que relayer l’info qui devait paraître demain dans le Washington Post.
Préface
Ce que j’aime chez cet homme c’est cet extraordinaire regard, cette capacité de tout voir autour de lui, regarder avec enthousiasme, ne rien laisser échapper. Son métier, c’est de rester caché. Caché pour surprendre. Caché pour photographier. Dieu sait s’il en a usé et abusé durant toute sa carrière époustouflante. Il s’est promené non pas à travers le monde, mais à travers les gens. Toujours prêt à saisir les images qu’ils n’étaient pas obligatoirement prêts à donner. C’est le métier de paparazzo qui l’exige. Mais chez Bicail – c’est le nom qu’on lui donne en Bretagne –, il y a toujours une certaine forme de morale. (…)
Introduction
Si je comptais combien de journées en dix ans ce travail fut rentable, j’en conclurais que près de neuf ans et neuf mois il eût mieux valu que je parte bronzer sous les palmiers. Paparazzo, c’est un boulot où tu passes des semaines dans une bagnole qui pue le gras de jambon et le camembert, à attendre devant une porte cochère, en vidant des bouteilles de Vittel et des Thermos de café, grillant des clopes et trop de cigares sous les regards suspicieux des riverains. Un paparazzo en planque est plus suspect qu’un terroriste tchétchène déambulant avec son sac à dos dans la gare centrale de New York ou qu’une bande de Roms jouant à l’épervier place Beauveau. La déception et le quotidien de notre métier de chasseur. Nous traquons, guettons, encerclons, piégeons, enfumons. Avec des jets, des yachts, des hélicos, des palmes, des pédalos, des Harley, des mobylettes, des tongs, des santiags, des barques ou des sampans. Rarement, nous déclenchons. Merveilles alors que ces parcelles de vie dérisoires et futiles, que ces instants magnifiques et baroques capturés grâce à notre téléobjectif.
Notre boulot consiste à jouer banco et à ne jamais se coucher. C’est une question de principe. On n’abandonne pas en cours de partie. Il y a une morale des paparazzi comme une morale du « milieu ». Tous les coups sont permis pourvu qu’ils soient bien joués.
Publié dans En-Contact N°78,
paru en février 2014