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Le Kid de Cincinnati* (Convergys) joue tapis pour s’installer en Allemagne

Publié le 02 août 2016 à 17:00 par Magazine En-Contact
Le Kid de Cincinnati* (Convergys) joue tapis pour s’installer en Allemagne

H_ZHpV63Pourquoi il faut aller au cinéma ou regarder l’épreuve de natation des JO pour comprendre le maelstrom mondial des centres d’appels.

Annoncée officiellement le 1er août 2016, l’acquisition par Convergys, n°2 mondial des centres d’appels de la société Buw, l’un des leaders du métier sur le marché allemand, signifie clairement que la bataille pour monter sur le podium des grands prestataires en relation client externalisée ne connaît pas de répit et nécessite d’avoir… La black card.

L’américain chasse désormais en Europe

Premier marché mondial de l’outsourcing, les Etats-Unis intéressent beaucoup de prestataires qui tentent de s’y installer par le biais d’acquisitions. Mais les places y sont chères et déjà prises. C’est donc en Europe, sur un marché très dynamique, que les prétendants au podium mondial se bousculent. Un mois après que Webhelp a acquis en Europe du Nord GoExcellent, Convergys, assez discret en Europe jusque-là, signe là une acquisition majeure deux ans après celle de Stream : le marché allemand (deuxième marché européen après le marché britannique) est caractérisé par une forte croissance (6,6%), là où celle du marché britannique est évaluée à 3% environ. Convergys pourra ainsi disposer de centres localisés en Allemagne, Roumanie et Hongrie qui emploient plus de 6000 salariés et passe dans le même temps de la 30ème position sur le marché allemand au rang de n°2, loin derrière Arvato qui réalise sur ce marché 1 milliard de chiffre d’affaires avec un portefeuille d’activités élargi et dépassant les seuls centres d’appels.

France – Amérique : le match mondial pour le leadership en expérience client

Les places sont désormais très chères sur le podium mondial de la relation client externalisée : leader incontesté depuis des années, Teleperformance caracole toujours en tête. Mais le groupe fondé par un français (Daniel Julien) a désormais de sérieux challengers : Acticall, grâce à son rachat de Sitel l’été dernier, s’est hissé à la 4ème place mondiale et voudrait bien piquer la place au n°3. Ce plan de marche, est actuellement un peu obscurci à cause d’un client récalcitrant qui a pour nom SFR et constitue à lui seul le premier client de Sitel en France. Il faut donc éteindre les incendies sur le marché domestique.

De son côté, muni du gros carnet de chèques que lui a confié KKR (Kohlberg Kravis Roberts), Webhelp fait ses emplettes, déroule son plan de marche et tel un lévrier, a pris en ligne de mire européenne le lapin Arvato. Sa récente acquisition en Europe du Nord  permet désormais à l’entreprise co-fondée par Frédéric Jousset et Olivier Duha de se présenter comme le n°2 européen.

AP640048239853-1280x960Si l’on prend en compte que ces opérations de fusion-acquisition se font de plus en plus l’été (le deal Sitel et Acticall avait été conclu l’année dernière en juillet), on pourrait hasarder une comparaison : le marché mondial des centres d’appels ressemble fort à une épreuve de natation aux Jeux Olympiques. Il y a des années, dans la discipline, c’était Michael Phelps contre le reste du monde. Désormais, les français Manaudou, Agnel, Lacour, Jérémy Stravius etc., sont de redoutables compétiteurs qui ont envie de croquer de l’or. Mais pour assouvir sa faim, il faut beaucoup s’entrainer et sortir la black card : l’acquisition de Buw s’est faite au prix de 123 millions d’euros pour 158 millions de CA. En supposant que le multiple de l’EBITDA qui a servi de base à cette acquisition soit le même que celui utilisé pour la valorisation de Webhelp (un multiple de 10), cela signifierait que Buw générera en 2016 un EBITDA positif de 12 millions d’euros environ. Pas mal pour une activité de services que les médias français continuent de méconnaître, que les hommes politiques n’ont toujours pas intégrée dans leurs radars… Enfin, ça dépend quand.

Et pendant ce temps-là, à Favars, petite bourgade de Corrèze…

Pendant ce temps-là, en France, un président de la République nommé François Hollande essaye tant bien que mal de sauver son centre d’appels, en Corrèze (Favars). Dans ce département qui n’est pas à proprement parler l’épicentre de l’industrie mondiale des centres d’appels, la générale d’une pièce de boulevard se joue : « SFR, je vais pas les laisser faire ! ». L’argument de la pièce ? Il est simple : Tellis, établissement qui dépend du groupe Arvato, est en train de perdre le contrat avec SFR, grand client du site qui assure économiquement la pérennité de celui-ci. En temps ordinaire, on n’en aurait rien à fiche, MAIS cette générale se joue quelques mois avant les élections. DONC l’issue doit être positive. Entre deux élections, les centres d’appels en France, tout le monde s’en fout : qui s’est soucié de la mort, après un long séjour en soins palliatifs du centre de Coriolis, en Corrèze également, à cause de la défection de son grand client Orange ? Personne. L’honnêteté intellectuelle impose de rappeler qu’Orange avait prévenu qu’il réduirait son contrat de prestations confié à ce prestataire. Mais là, on est le 2 août, on a eu assez de soucis ces derniers temps. Tant bien que mal, à l’Elysée, on essaye de tordre le bras de Patrick Drahi, d’Olivier du Besset (directeur du service clients de SFR), de faire un deal avec Régis Turini (ex-directeur de l’Agence des Participations de l’Etat). Quelle issue pour ce combat ?

20279732.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxxA l’Elysée, on voudrait bien que ça ressemble à un remake de The Expendables, une franchise cinématographique** qui sort toujours l’été avec beaucoup de gros bras. Mais Bernard Combes (le maire de Tulle et député de la Corrèze qu’on a chargé de la mission délicate de survie du call center) n’a rien de Sylvester Stallone, l’une des stars convoquées pour ce remake.
Selon nous, la pièce risque plutôt d’être renommée comme le grand roman de Gabriel García Márquez « Crónica de una muerte anunciada » (chronique d’une mort annoncée). Pourquoi ? Parce que Patrick Drahi, c’est le Marshal Samuel Gerard incarné par Tommy Lee Jones dans Le Fugitif. Rappelez-vous la scène où ce dernier tue le brigand qui a pris en otage son collègue policier, quitte à tirer une balle qui frôle l’oreille de ce dernier. Devant le regard inquisiteur de ce collègue qu’il a failli tuer, il sort cette réplique culte : « Je ne négocie jamais ! »

Rédigé un mardi 2 août, la veille d’un mercredi, jour des sorties en salles. L’été il y a beaucoup de reprises, rattrapez votre retard ! ☺

Un décryptage de l’actualité boursière des centres d’appels par l’équipe culture de la rédaction d’En-Contact. Prochain billet le 25 août.

*Siège social de Convergys

**Une franchise est une série de films qui inclut et reprend tous les éléments clés pour créer une « marque » propre (personnages, lieux etc.)

Was ist Buw ?

Buw, c’est quoi ? C’est qui ?

Les visages de Buw, c’est Jens Bormann et Karsten Wulf qui fondent l’entreprise en 1993 et ne cessent de la faire croître depuis : le chiffre d’affaires passe de 66 millions d’euros en 2007 à 158 millions en 2016. Avec ce rachat, Convergys accélère ainsi son développement en Europe : 16 sites et environ 6000 employés supplémentaires avec une zone qui couvre l’Allemagne, la Hongrie et la Roumanie. La zone allemande sera dirigée par Daniel Benzenhöfer, la zone britannique (UK) par Philip Telfer, la zone Europe du Sud par Remy Béal. Les deux dirigeants et fondateurs historiques de l’entreprise la quitteront après le rachat effectif.

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