Cycles Mercier : le rétropédalage étonnant et coûteux de l’état
Si Jean-Marc Seghezzi est le Lance Armstrong des aides de l’Etat, qu’on prouve qu’il s’est dopé, tel est en substance le message de colère des habitant, députés et élus de la circonscription de Revin, dans les Ardennes, très étonnés que Mme Agnès Pannier-Runacher, Jacqueline Gourault et la BPI fassent machine arrière sur ce dossier, vital pour la région. La Communauté de Communes a déjà engagé plus d’1 million d’euros pour aider localement à l’accueil du projet.
Le projet de re-localisation, qui avait donné depuis quelques mois un peu d’espoir à une commune des Ardennes et devait aboutir à la création d’une usine de fabrication de vélos à la marque Mercier, a fait pour l’instant long feu, à l’initiative du Ministère d’Agnès Pannier-Runacher, a priori. Jean-Marc Seghezzi, porteur du projet et professionnel du secteur, serait devenu un personnage peu recommandable, sans qu’aucune explication factuelle ne soit fournie ni par la BPI, ni par Bercy. A Revin et à proximité de la friche industrielle Porcher, c’est le grand étonnement, la colère même.
Un volte-face non expliqué et bien tardif
Joint par nos soins, le cabinet de la Ministre déléguée et chargée de l’industrie ne fournit aucune réponse officielle pour étayer « les faits graves qui sont venus à notre connaissance lors de l’instruction du dossier et qui empêchent un soutien de l’Etat » ( SMS reçu de leur part).
Après avoir effectué quelques recherches, on constate au contraire que les décisions de justice (qui semblent devoir fonder les doutes quant au porteur du projet, dirigeant par ailleurs de Trace Sport, une entreprise qui importe des vélos et en fait le négoce) qui ont été rendues à ce stade l’ont toutes été dans le sens de Jean-Marc Seghezzi.
La plus significative d’entre elle fait état de poursuites pour des droits de douane qui n’auraient pas été acquittés par Trace Sport, après que cette entreprise a importé des vélos fabriqués notamment au Sri Lanka. Or, Rendue en Juillet 2019 par la CJUE, la décision invalide la nécessité et le fondement juridique de la perception de droits de douane qui auraient été illégalement éludés.
Un article documenté du Point ouvre d’autres perspectives et pistes d’explication sur ce rétropédalage de l’Etat.
Si Jean-Marc Seghezzi (PDG de CEMF et des cycles Mercier) est un Lance Armstrong des aides de l’état, qu’on prouve qu’il s’est dopé, c’est tout ce qu’attendent les citoyens des Ardennes dont beaucoup espéraient retrouver localement un emploi grâce à cette re-localisation industrielle opérée sur un marché en forte croissance. Pierre Cordier, député LR des Ardennes, s'est étonné sur BFM Business: “ Il y a suffisamment de hauts fonctionnaires qualifiés à Bercy pour qu'on fasse, en amont d'annonces qui suscitent de l'espoir, des vérifications sur les porteurs de projet. C'est l'Etat qui est venu nous présenter l'entrepreneur en question "
Plus d’un million d’euros déjà dépensé localement pour préparer l’accueil des Cycles Mercier
Le maire de Revin, Daniel Durbecq, par ailleurs 1er Vice-Pdt de la Communauté de Communes dont dépend sa ville, confirme que pour aider et rendre possible cette implantation, le déménagement d’une entreprise locale spécialisée en découpe laser, ACDL, la Communauté de communes a déjà engagé une somme dépassant le million d’euros : « Il fallait pouvoir installer ailleurs rapidement l’entreprise de Mr Cyrille Ausset, pour que toute la friche puisse accueillir l’usine Mercier. Nous sommes très surpris de la volte-face de l’Etat. Et constatons qu'à chaque fois qu’un de ses représentants vient dans les Ardennes, le projet qui est annoncé (Electrolux avec Arnaud Montebourg, puis Cevital à Charleville-Mézières avec Emmanuel Macron) ne se réalise pas. Il rappelle que les travaux d’ingénierie et fonciers devaient débuter en septembre.
Joint par téléphone, Jean Marc Seghezzi est également très surpris et a confié à son conseil la mission de riposter pour ce qu’il estime être une diffamation très grave le concernant. Des accusations, surgies du chapeau, évoquent une fraude fiscale et du blanchiment, des droits d'importation éludés; nous avons donc demandé au Parquet à être reçus très rapidement, indique Me Scemama, conseil du dirigeant des cycles Mercier.
« Le fameux fonds d’investissement luxembourgeois Starship Investments qui porte en partie le projet ? L’Etat sait très bien et depuis le début que j’en suis l’animateur et l’actionnaire et aucune décision de justice n’est cachée, me concernant; peut-être tout simplement ne suis-je pas allé m’installer dans une autre région, qu’on m’a parallèlement fortement invité à envisager ? Mais j’ai une parole et je m’étais déjà engagé vis-à-vis de Revin » conclut JM Seghezzi, porteur d'un maillot vert qu'on veut lui retirer, étonnamment.
Un sacré poète a fui les Ardennes, où rien n'écrivait-il, ne doit dépasser ni choquer. “Sur la place taillée en mesquines pelouses, Square où tout est correct, les arbres et les fleurs, Tous les bourgeois poussifs qu'étranglent les chaleurs Portent, les jeudis soirs, leurs bêtises jalouses. Si Jean-Marc Seghezzi n'est pas “correct” que l'Etat le détaille. Qu'il soit, pour une fois .. Voyant !
*A la musique. Arthur Rimbaud.
Par la rédaction d’En-Contact et Manuel Jacquinet.