225 millions d’euros pour la « révolution numérique » du groupe, investissements tous azimuts, cap sur l’expérience client : Bazin met tout le monde d’Accor
Quand le premier groupe hôtelier du monde décide de prendre à bras-le-corps la révolution digitale, il ne le fait peut-être pas parmi les premiers, mais il ne fait pas semblant. Lors de son premier « digital day » organisé dans l’un des fleurons du groupe, le Sofitel Saint James de Londres, Accor a en effet annoncé la création d’une véritable force de frappe digitale, en dotant d’un budget de 225 millions d’euros son plan quadriennal « leading digital hospitality » – dont 150 millions les deux prochaines années, contre 120 millions lors des cinq dernières années. 55% de ce budget ira à des investissements « purs et durs », 60% du montant des engagements serviront à consolider la performance opérationnelle, et 40% à l’acquisition de parts de marché et à l’optimisation des coûts de distribution.
Avec pour objectif ambitieux d’asseoir le leadership du groupe sur « l’ensemble de la chaîne de valeur du parcours client ». Notamment en convainquant ces clients de réserver leurs chambres sur les sites du groupe, plutôt que sur ceux des agences en ligne qui monopolisent le marché. Menant sa présentation comme un patron de start-up de la Silicon Valley, sans pupitre, en tee-shirt et équipé d’une oreillette, le PDG du groupe Sébastien Bazin a fait son show. Ses armes ? Outre cet apport de cash, des acquisitions, notamment celle de Wipolo, une start-up spécialisée dans les solutions numériques de gestion de voyage. D’autres devraient suivre- sans négliger le cœur de métier puisque le groupe vient d’acheter à Serge Trigano et ses associés 35% de la chaîne Mama Shelter. Accor s’est par ailleurs associé à l’Innovation Factory, un cluster numérique, afin d’organiser avec des étudiants des « Hackatons » pour innover sur le parcours client, et sur la base de challenges d’équipes. En a notamment émané un… « chariot connecté » pour les femmes de chambre.
Mais l’atout d’Accor, c’est avant tout ses hommes et la capacité du groupe à aller les chercher. Ex-responsable de l’innovation, du marketing et des technologies chez Orange Business Services, Vivek Badrinath est depuis quelques mois directeur général adjoint en charge du marketing, du digital, de la distribution, et des systèmes d’information dans le groupe Accor.
Sébastien Bazin peut déjà mettre en avant de bons résultats : il y a dix mois, lors de sa première grand-messe des résultats annuels en tant que PDG, et après un exercice 2012 en perte de 599 millions d’euros, il annonçait 126 millions d’euros de bénéfices en 2013, pour un résultat d’exploitation en hausse de 1,9 % – soit mieux que l’objectif fixé et que le consensus des analystes.
En juin 2014, Accor indiquait dans l’un de ses communiqués sa volonté de « surclasser l’expérience client de millions de clients ».
Reste à savoir si les investisseurs encravatés de l’auditoire seront convaincus, alors que la valorisation boursière de booking.com dépasse désormais celle du groupe hôtelier.
Manuel Jacquinet
Photo de Une : Sébastien Bazin, PDG du groupe Accor – © DR