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Ligne de crises

Publié le 14 octobre 2019 à 08:33 par Magazine En-Contact
Ligne de crises

La dame dont les ministères se transmettent le numéro s’appelle Linda.
Crise alimentaire, attentats, urgence sanitaire, les occasions pour le grand public ou les entreprises d’avoir recours à des dispositifs de crise ne manquent pas, ne disparaissent malheureusement pas. Rencontre ce mois-ci avec Linda Hemlat, experte en France sur ces « lignes de crise ».

Au gouvernement, via le SIG (service d’information du gouvernement, rattaché au Premier Ministre) ou dans de très nombreux groupes du CAC 40, on sait dans ce cas qui appeler : Teleperformance. Le leader mondial des centres de contacts a en effet acquis une réelle expertise dans la mise en place de ces hotlines d’un jour ou d’un mois, un peu spéciales tant par les effectifs qu’il convient de déployer que par la précision des messages qu’il faudra diffuser, actualiser.

En-Contact : Quel périmètre d’activité de gestion de crise ou d’évènements particuliers Teleperformance est-il habitué à gérer ?
Linda Hemlat : L’éventail des typologies de crises que nous sommes amenés à gérer est assez large : crise sociale, catastrophe naturelle, défaillance bancaire, attentats, rappel de produits. In fine, notre organisation demeure la même quelle que soit la nature de la crise, ce qui diffère, c’est le degré d’anticipation. Prenons l’exemple du changement de norme qui a rendu les téléviseurs de millions de français obsolètes (pour la TNT, Tous au Numérique) : nous avons préparé ce projet durant un an, sommes ainsi passés d’une équipe de 25 à plus de 700 conseillers en quelques semaines et avons traité l’équivalent de trois ans d’appels en quatre semaines !
Lorsque survient une crise soudaine, comme un attentat, les dispositifs mis en place nous permettent aujourd’hui de mobiliser des ressources et d’être en capacité de renseigner les premiers appelants une heure seulement après la demande d’activation.

Byron Kemby, conseiller client – © Emil Hernon

 

Comment résumer le savoir-faire et les moyens techniques ou process qui sont nécessaires pour ce type d’opérations ?
L’efficience de ces dispositifs repose sur l’anticipation et sur une organisation robuste. Concernant les moyens humains, il faut une gouvernance claire : chaque acteur du dispositif est identifié et sait précisément quelles actions il doit mener. En amont ont été mis en place des dispositifs d’accompagnement spécifiques pour nos collaborateurs avec des formations liées à la gestion de crise ainsi qu’une ligne d’écoute psychologique. Pour la partie technique, une infrastructure suffisamment solide est requise pour encaisser d’importantes charges d’appels et des policies qui nous permettent de paramétrer des centaines de positions dans des délais très courts.
Enfin, si les institutions et entreprises font appels à des partenaires extérieurs, c’est également pour pouvoir bénéficier de leur expertise. Nous avons un vrai devoir de préconisation tant sur les moyens humains et techniques (dimensionnement, outils…) que sur la stratégie de communication (quels canaux, media, flux entrants ou sortants…)

Y a-t-il un stress positif, une excitation à gérer ce type d’opérations ? Pour vous et les agents ?
Indéniablement. Bien que les évènements qui nous amènent à gérer ces crises puissent souvent être tragiques, ils forcent chacun d’entre nous à fournir le meilleur de soi, quels que soient l’heure ou le jour. Dans ce type d’activité, aucune hésitation, tergiversation n’est autorisée : nos prises de décisions et actions doivent être immédiates, ce qui maintient dans un état d’excitation permanent.

En quoi cela se distingue-t-il des gestions de service client plus classiques ?
La valeur du temps et l’imprévisibilité caractérisent ce métier bien particulier : un travail d’anticipation est indispensable afin de prévoir tout ce qui peut l’être : croitre de 2 à 100 conseillers en quelques heures, développer un script adapté à la crise, mettre à jour les éléments de langage plusieurs fois dans la journée. Mais surtout la crise n’a pas des horaires de bureau : elle peut survenir un dimanche, un jour férié. Se retrouver avec ses collègues, avec les membres du comité de direction, en pleine nuit dans nos locaux, ça n’arrive pas dans la gestion d’une activité classique. Dans ces moments-là disparaissent tous les attributs et réflexes liés à la fonction, au département au sein de l’entreprise. Nous ne sommes plus qu’une équipe, une famille, soudée autour du moment de crise que traverse notre pays par exemple.

Parmi les crises gérées par Teleperformance : les attentats du 13 novembre 2015 ou encore la plateforme d’information du grand débat national cette année – © DR

 

Par définition, la gestion d’une crise est soudaine. Comment les marques, entreprises vous connaissent-elles et vous contactent-elles ? Il faut établir un devis très vite ; celui-ci se fait-il parfois post-démarrage des opérations ?
L’impact en termes d’image peut être fortement préjudiciable pour l’entreprise concernée par la crise. A contrario, une crise bien gérée a des répercussions positives sur l’image de l’entreprise ; il est donc important de s’associer à un prestataire fiable. TP dispose de structures technologiques et humaines capables d’apporter une solution, quelle que soit la nature de la crise ou de l’urgence. Au-delà de cela, Teleperformance a aujourd’hui une expertise reconnue sur le marché. Nos partenaires sont promoteurs et le font savoir. Concernant les aspects contractuels, Teleperformance a tissé des partenariats forts et une vraie relation de confiance s’est installée avec nos clients. Malgré cela et malgré l’urgence d’une situation, la mise en place d’un dispositif de crise ne peut se faire au détriment de certains processus. Toutes les activités que nous gérons sont couvertes contractuellement, des devis sont donc adressés avant le lancement de toutes les opérations.

Le contrôle qualité de ce type d’opérations se fonde-t-il sur les items habituels ?
L’exigence en termes de qualité délivrée est la même, ce serait une erreur de considérer qu’à cause de l’urgence d’une situation on peut être moins regardant.
Nos métiers et outils de travail ont beaucoup évolué ces dernières années et cela ne s’applique pas qu’à la gestion de crise. La composante émotionnelle est un vecteur de satisfaction/réconfort indiscutable. C’est pourquoi nous avons intégré à nos outils de mesure de la qualité des indicateurs totalement détachés des exigences « métiers » habituelles, mais plutôt centrés sur les « interactions humaines » (intelligence émotionnelle, résilience…). Nous œuvrons quotidiennement pour intégrer au mieux la technologie dans nos dispositifs. Non pas pour déshumaniser la relation bien au contraire. La technologie nous aide à détacher le conseiller des tâches répétitives ou sans valeur ajoutée (réduire le nombre de clics, d’écrans…). Finalement, la technologie libère du temps précieux à nos conseillers qui peuvent ainsi se concentrer sur l’essentiel : un échange d’humain à humain, une relation client de qualité. Chaque interaction compte !

Votre plus beau souvenir ?
Dans de très nombreux cas, de haut en bas de l’organigramme, les collaborateurs et la direction générale vient sur le plateau et prend des appels. Travailler avec son directeur général, à ses côtés et être amené parfois à lui donner ou transmettre des consignes, voir tout le monde sur le pont… sont quelques-unes des spécificités et beautés de ce type d’activités.

 

Parcours d’une directrice de comptes stratégiques

Maîtrise de droit et école de commerce (diplôme européen supérieur en communication et management).
« J’ai rejoint le groupe Teleperformance en 2007 en tant que conseiller client sur des activités d’information juridique ; j’ai ensuite très rapidement pu évoluer au sein de l’entreprise vers des fonctions de management. J’ai finalement quitté les opérations en 2013 pour rejoindre la direction de comptes. »

Par la rédaction d’En-Contact

Voir notre reportage sur Teleperformance à Tunis, ici.

Photo de une : Linda Hemlat, directrice de comptes stratégiques et Rachida Benjemaa, manager expert – © Emil Hernon

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