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Le difficile métier de formateur

Publié le 24 janvier 2009 à 12:23 par Magazine En-Contact
Le difficile métier de formateur

LES TRIBULATIONS D’UNE JEUNE FORMATRICE EN RELATION CLIENT
Profil du candidat : 32 ans, célibataire, disponible, bac + 3, évoluant dans l’univers de la formation et de la relation client.

Arles, 16 mars 2006, 15h
Apprêtée comme chacun peut l’être en un tel moment, légèrement anxieuse, je rejoins Arles pour y rencontrer celui qui me donnera ma chance (je me suis après demandée si c’était réellement une chance !) de devenir une vraie formatrice en relation client.

Dans un hôtel déguisé en bureau de recrutement, je le retrouve, détendu. Moi, le cœur à la chamade, venant rapidement à évoquer mon parcours, mes points forts, défauts et autres atouts fréquemment évoqués dans ces entretiens. Rapidement, je comprend l’enjeu et l’urgence de la mission.
« OK. Tu commences lundi ». Quoi ? Déjà ? Mais il faut que je m’organise et puis… Et puis… Mais nous sommes jeudi et lundi, c’est dans 4 jours ! RDV pris à Paris au siège d’un géant des télécommunications.
Panique. Je prends mes dispositions. Je cours, le téléphone à la main. Je réaliserai plus tard que là a commencé mon nouveau rythme de travail, ma nouvelle vie !
Re-panique. « Vais-je être capable d’assumer cette mission qui s’annonce d’un enjeu capital pour notre cabinet et notre client ??? »  La mission est simple : développer un outsourcer, prestataire du fameux géant des télécommunications. Objectif : 70 personnes à recruter, former et rendre opérationnel en 30 jours !
Rassurée. Mon expérience de formatrice au sein de l’acteur historique des télécommunications (dont je tairai le nom) va me permettre de mener cette mission (et celles qui suivront) comme une pro !
Evidemment, par précaution et pour compléter mon expérience que je pensais déjà complète, je dévore en un week-end la bible de la relation « Les Métiers des Centres d’Appels ». Désormais persuadée d’avoir toutes les cartes en main, l’expérience peut commencer.
Formateur/trice : « Personne qui forme, éduque, instruit. Ses actions vont du simple conseil pédagogique à l’apport d’outils et de documents pédagogiques ». Définition unanime dans les dictionnaires « traditionnels ».
Et si l’on parlait du dictionnaire de la relation client ?
« Personne qui forme, conçoit, forme, anime, motive, met en situation, évalue, valide les mise en application et les résultats assortis, coache, réalise un suivi, anticipe, réagit, adapte,… »
Cette définition réajustée permet de comprendre que le métier n’est pas si simple dans notre univers, celui de la relation client.
Cet univers évolue vite, très vite. Mes qualités personnelles et compétences professionnelles seront-elles suffisantes ? Panique.
Tant pis, je me lance ! Encore !

Paris, 1er septembre 2006, 9h
Le projet « Arles » s’achève. Me voilà à Paris. Paris ? Mais que fais-je à Paris ?
Oubliées les plages et le soleil du sud, les 35h tant convoitées et habilement optimisées. Bonjour Paris ! Métro, boulot, stress, course permanente au rythme de mes missions et de mes clients, déplacements aux 4 coins de la France.
Parlons-en des voyages chez nos clients !
Mon premier client de ma nouvelle vie parisienne est installé à Vierzon. « Tu as voulu voir Vierzon…..?! » chantait Brel (et mes amis !!!).
Mon client (Richard) m’explique le contexte politico-socio-économique du site et me voilà partie pour faire de 18 demandeurs d’emploi des professionnels de la relation client, aptes à vendre par téléphone en 35h chrono ! «Se présenter, identifier l’interlocuteur, attirer l’attention et susciter l’intérêt du prospect, argumenter, traiter les objections, conclure, VENDRE quoi ! » C’est parti !
A chaque nouveau client, nouvel enjeu, nouveau défi, mêmes problématiques… « Nous devons professionnaliser notre relation client… », « Nous devons impérativement diminuer notre DMC…» (Quoi ? DMC ?) « Nos ventes sont en baisse, nos télévendeurs démotivés, nous devons augmenter notre taux de transformation… »
Ma bible de la relation client va m’aider, j’espère y trouver des solutions miracles. Commençons par le glossaire. Bien. Je connais désormais la signification de toutes ces abréviations barbares.
Reprenons la problématique de mon client. Ai-je bien cerné son besoin ? Quel est mon objectif ?
Je reprends mes vieilles habitudes et définis mon objectif pédagogique. De l’opérationnel, on veut de l’opérationnel, du quantifiable, du mesurable. Des résultats, mon client veut des résultats.
Et moi qui pensais que la formation était la transmission de savoirs et de savoir-faire. Je me dis que mon métier de formatrice « d’avant » n’est plus le même ici, dans l’univers de la relation client. Ici tout va vite, très vite.

Paris, 2 avril 2007, 8h30 
Nouveau client. Problématique idem (vendre plus !). Nouveau challenge. Là, j’ai bien compris la notion d’objectif opérationnel. Nous planchons à 3 sur ce nouveau projet d’envergure. Il s’agit de former des managers, des « team-leaders » dans le jargon de mon client (car en plus, il faut apprendre le jargon de nos clients !!!).
• Comprendre et définir le besoin
• Construire le plan de formation
• Bâtir des contenus, des outils
• Définir le mode d’animation pour qu’il soit le plus « percutant » possible …. 6.  …. 7. …. 8.  ….
La journée est longue. 19h30, la présentation est prête. Je quitte le cabinet en courant. Le train de mon amie Nathalie arrive à 20h06 Gare de Lyon. Parce qu’il faut le souligner : entre toutes mes missions (passionnantes, captivantes !), j’essaie d’avoir une vie privée, des amis, des activités sportives, culturelles,… Bilan : pas évident ! Mais j’essaie. J’essaie de trouver l’appartement idéal-pas cher-et répondant à tous mes critères de choix (c’eut été plus simple à Vierzon !), j’essaie de prendre du temps pour moi, j’essaie de gérer ma vie sentimentalo-sociale au rythme des call-centers !

Mes clients ? Parlons-en. 
Profil de mes clients : toute entreprise utilisant le téléphone comme outil de prospection, de vente, de fidélisation ou de service après-vente (je ne pensais pas, avant, qu’il y avait autant de demandes !).
Profil de mes stagiaires (ou apprenants) : de 18 à 61 ans, qu’ils soient TELEopérateur, TELEconseiller, TELEvendeur, TELEassistant, TELEgestionnaire ou autre TELEacteur évoluant dans l’entreprise au contact de l’outil téléphone. (NB : Et le mien ose encore sonner le soir !!!)
Parfois motivé, parfois moins, l’homo-stagiérus doit avant tout trouver, dans la formation, son point d’intérêt personnel associé à son développement professionnel. Quelle complexité !
S’adapter aux stagiaires. Toujours. La règle d’or.
Capter leur attention, stimuler leur participation, les faire adhérer aux objectifs, leur faire prendre conscience des enjeux, leur faire acquérir de nouveaux savoir-faire…
Et tout ça en… Parfois… Une journée !

Une journée de formation…
Arrivée sur les chapeaux de roue, décidemment, les conditions de circulation parisienne me laisseront toujours dubitative !
H-15 min avant l’arrivée des stagiaires. Je me mets en condition, vérifie que la logistique est prête, rassemble les books de formation, use de ma plus belle calligraphie pour écrire les « indispensables » au tableau (leur souhaiter la bienvenue, afficher l’objectif de la formation, le programme et les conditions logistiques car ce petit monde a besoin de repères !), affiner mon sourire et c’est parti !
«Bonjour et bienvenue au séminaire relation client». Mes stagiaires n’ont pas l’air ravis d’être là. Ils m’expliquent, lors du traditionnel tour de table des présentations, qu’ils sont déjà des « pros » de la relation client, qu’ils n’ont rien à apprendre, que le chef les a obligés à assister au séminaire et qu’ils ont bien d’autres problématiques dans leur quotidien professionnel…
Panique ? Non. J’ai déjà vécu cette situation, il va seulement falloir que je les écoute et les entende, que je fasse preuve d’empathie (terme traditionnellement bien connu des populations de la relation client !), que je les rassure, m’adapte, écoute encore, transmette différemment, rende ce module ludique, bref, que ma formation leur plaise, tout en leur apportant des connaissances ou compétences nouvelles, complémentaires. Et ça, je sais faire !

Alors je me mets dans la peau de l’animatrice idéale, impliquant au maximum mon public, mettant de l’humour dans mes interventions, partant des cas réels pour illustrer les sujets théoriques, attentive à chaque réflexion individuelle et au comportement du groupe. Ouf. Mon sujet est traité, ils ont compris, ils ont (curieusement parfois !) l’air d’être en accord avec mes propos. J’ai même l’impression de leur avoir transmis de nouveaux savoirs ! Mission réussie ! Verdict des stagiaires à la fin de la session : tour de table et questionnaire d’évaluation ! Conditions d’accès à un verdict positif : dynamisme, psychologie, compétence.

Lors de mon propre apprentissage, un de mes formateurs nous a soumis une réflexion : « Mais qu’est-ce qui vous prend à vouloir former les autres ? »
Hier, ailleurs, je me posais encore la question. Aujourd’hui, dans mon nouvel univers 100% haletant, je lui rends hommage en répondant que, ce qui me prend à vouloir former les autres, c’est la passion !

 

Le recrutement des professionnels des télé-services ? 
« Toujours aussi délicat » selon Philippe Amiel, dirigeant du cabinet Promel.
Il y a 10 ans, Philippe Amiel était responsable RH chez un prestataire téléservices et télémarketing. Aujourd’hui, il est recruteur dans ce secteur, et cette spécialité pointue en a fait l’un des bons observateurs de notre industrie. Nous lui avons demandé ce qu’il retenait de cette rentrée 2007 qui voit fleurir les annonces et postes à pourvoir en France, mais aussi en offshore. Bilan : il est de plus en plus difficile de trouver des Français prêts à s’investir pleinement dans leur travail.
Entretien.

Quelles sont les fonctions pour lesquelles vous êtes souvent missionné ?
On me sollicite de plus en plus pour des postes de support en centres d’appel ainsi que des profils commerciaux pour les prestataires.
Les fonctions de support intègrent les postes de planificateur, analyste statistique ou développeur informatique pour lesquels on recrute essentiellement en région parisienne. J’observe que nous recevons beaucoup de candidatures d’étrangers et beaucoup moins de candidatures françaises. Le travail de l’entreprise va consister de plus en plus à assister les premiers dans l’obtention d’un permis de travail et la résolution des démarches nécessaires.

Pourquoi cette pénurie de candidatures françaises ? 
Principalement parce qu’il juge le niveau de remunération trop bas. Des rémunérations situées dans le bas de la fourchette intéressent peu les candidats en poste, qui sont de plus en plus réticents à bouger. Dans le même temps, les candidats originaires du Maghreb ou du Québec sont une sorte d’appel d’air. C’est un peu l’offshore à l’envers.

La pénurie de profils commerciaux est une deuxième constante ?
En effet, et la difficulté ne fait que s’accroitre. Les profils expérimentés capables de vendre des missions d’outsourcing et de prospecter en ce sens sont de plus en plus recherchés, et de plus en plus rares. Si le poste proposé n’est pas situé dans le Sud ou en Rhône-Alpes (le soleil et la montagne attirent beaucoup), ce sera très difficile. Le snobisme des commerciaux à l’égard de tout ce qui n’est pas à Paris ou PACA est effrayant : ils craignent de s’éloigner de l’endroit où tout se passe, de compromettre leur dynamique de carrière. Et puis, avons-le, les commerciaux expérimentés aspirent au management des commerciaux ou alors souhaitent évoluer vers du pilotage de prestataires, de la démarche de projets ou alors faire de l’élevage…et pas de la chasse.

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