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Belambra peine à payer les loyers de ses villages de vacances mais vend ses fichiers clients… ou les perd.

Publié le 23 août 2017 à 15:36 par Magazine En-Contact
Belambra peine à payer les loyers de ses villages de vacances mais vend ses fichiers clients… ou les perd.

(Rentrée chargée à venir pour la filiale de Caravelle et les agents au centre d’appels)

Qu’arrive-t-il aux acteurs du tourisme et notamment au numéro un des clubs de vacances en France, l’ex-VVF, dénommé désormais Belambra ? Celui-ci est en effet impliqué ou concerné par une série d’assignations ou de dossiers sensibles, que son actionnaire de référence, le groupe Caravelle, aurait tort de négliger. Assigné en justice par Familles Rurales à la fin du mois de juillet pour non-respect des dispositifs qu’impose la Cnil, le groupe qui exploite 58  villages de vacances partout en France semble chercher à élargir ses sources de revenus de façon bizarre et pas forcément du goût de ses anciens partenaires ou clients. La présidente de Caravelle, Hélène Martel-Massignac et le nouveau directeur général du groupe depuis quelques mois, Frédéric le Guen, ne pourront pas toujours opposer le silence à la série de nuages qui arrivent.

Capture d’écran

Vendre des fichier clients sans l’accord explicite du client, ça a eu payé,

Nous indique l’ancien fondateur d’un grand voyagiste français, qui désire rester anonyme, mais s’étonne qu’un acteur positionné sur le marché familial, comme l’est Belambra, soit coutumier de ce genre de pratiques. C’est pourtant ce que lui reproche l’association de défense des consommateurs mentionnée plus haut et que le groupe aura du mal à contester : la simple requête sur Google – location de fichiers Belambra – fait apparaître plus de 3 prestataires qui sont en charge de ces ventes ou locations et qui ont confirmé à la rédaction qu’ils étaient « complètement en mesure de fournir assez rapidement adresses e-mail et numéros de téléphone mobile d’une partie des 500 000 clients de leur partenaire ».
Afin de rendre ceci possible, le groupe mentionne et informe son client, dans ses conditions générales de vente en article 16 « qu’il peut être amené, avec votre accord, à transmettre les informations collectées à des tiers à des fins de promotion… » Le problème est précisément que l’accord est implicite et que la commande du voyage ou du séjour nécessite de valider les conditions générales de vente. En résumé, tout client de Belambra voit ses coordonnées en situation d’être cédées à des tiers, sauf à écrire au service relation client pour démonter le mécanisme et s’y opposer. Un acteur concurrent tel que Vacanciel procède complètement à l’opposé et ne revend aucune des coordonnées clients, indique sa directrice du marketing Christel Pradon, pas plus que ne déclare le faire Maeva, dont nous attendons cependant la confirmation écrite.

Ne pas payer ses loyers, pas au prix fixé ou pas pour toute la durée du bail

A Grasse, depuis quelques mois, quelques habitants de la célèbre commune, fort endettée, s’étonnent que son locataire Belambra (le groupe y exploite un village, Le Clavary) ait non seulement décidé de rompre le bail de 60 ans, avant son terme, mais surtout que le maire de la ville accepte de verser une indemnité de plus de 1,7 million d’euros à ce locataire qui partira avant l’heure. Pendante devant la justice, l’affaire révèle, comme les pratiques mentionnées ci-dessus, la nécessité de faire rentrer du cash…  ou d’en sortir le moins possible.
Le groupe, qui n’est pas le seul à pratiquer de la sorte, a parallèlement et unilatéralement proposé à des particuliers propriétaires de résidence de tourisme, dont la gestion est confiée à des grands groupes tels que lui, de baisser de 15 à 30 % les loyers fixés dans le bail commercial qui les lie pourtant. (voir l’article de Challenges)

Club Belambra Le Clavary

Failles de sécurité dans les systèmes d’information…

Plus ennuyeux, la transmission des fichiers clients de Belambra… n’est pas toujours volontaire.
Désireux de comprendre les process d’acquisition clients, la façon dont le « tunnel de vente » digital est géré chez Belambra, la rédaction de notre magazine a réalisé en Juillet quelques appels mystère au centre d’appels du voyagiste, évidemment largement surtaxé et procédé à quelques vérifications basiques de sécurité du site. Résultat stupéfiant : en moins de trente minutes, nous avons été en mesure, sans trop d’efforts, de récupérer des factures de clients, les coordonnées de ceux-ci, leur téléphone mobile ensuite, autant de données confidentielles.
Interrogés, Pierre Brahy, le directeur informatique du groupe n’était pas joignable, qui explique dans des vidéos sur le web que le groupe qui l’emploie est désormais avant tout une entreprise de marketing pas plus que Frédéric le Guen, le directeur général. Ce dernier a fait ses classes chez Amazon et Darty. Certes, chez Amazon, la personnalisation de l’expérience client se fonde également sur le recueil des données clients, mais les remboursements, en cas d’annulations de commandes ou de retours de produits sont rapides, ce qui ne semble pas le cas chez Belambra (à la lecture des nombreux commentaires sur les forums). Malins, les GAFA s’exonèrent pour l’instant du respect des lois françaises en vous faisant valider des CGV (conditions générales de vente) du pays qui leur convient.
Il n’est pas sûr que la position du silence et de la réponse « circulez, y a rien à voir », qui a prévalu chez nos interlocuteurs, tienne au vu des résultats complets de notre enquête*. Ils sont étonnants et inhabituels pour une “filiale” de Caravelle, fonds de retournement discret mais considéré comme très sérieux dans ce métier particulier.
D’autant que le groupe n’a pas l’intention d’abandonner l’hôtellerie, bien au contraire : les millions d’euros investis par sa présidente dans des châteaux récemment et leur rénovation en hôtels, comme au Château de Fonscolombes, témoignent d’un nouvel axe stratégique qui a amené sa présidente à acquérir ou rénover plusieurs établissements de luxe, en France, depuis 6 ans. Jointe par nos soins, cette dernière attendait fin juillet le contenu de l’assignation.

« Il faut des milliards ou faire de vrais choix pour offrir une expérience client différente. Qui les a, les consacre à ce sujet dans le tourisme ? »

« Le voyage est devenu un produit de première nécessité » indiquait au JDD le président de Voyageurs du Monde, Jean François Rial (le dimanche 20 août),  en précisant également que l’avenir était à la personnalisation, aux adresses exclusives, au « like a friend » (concept en vogue qui définit une nouvelle façon de profiter de l’expérience voyage, tourisme, grâce aux bons conseils prodigués justement sur place par celui qui connait le lieu, les bonnes adresses).
Les forums de clients, les avis consommateurs, post-voyage, démontrent que la promesse d’une expérience client premium, personnalisée est difficile à tenir, encore plus dans le métier du tourisme où les coûts fixes sont fréquents et les référentiels prix… explosés. Plus personne ne sait quel est le juste prix d’un séjour en palace.

AccorHotels est-il plus fort que Marriott sur l’expérience client ?
Comment les palaces « fabriquent » ils cette expérience du séjour si complexe ?
Montefiore Investment est-il le fonds spécialiste de ces activités…

Tels sont les sujets de l’une des 3 battles de la 5 ème édition de Expérience Client / The French Forum, qui se tiendra à l’Hermitage Barrière de La Baule du 27 au 29 septembre 2017.

 

Par Manuel Jacquinet

*Parution dans le numéro N°100 d’En-Contact, le 15 octobre.

 

 

 

 

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