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Les 4 Fantastiques du marketing : #1 Anne-Claire Bellec, Eptica

Publié le 29 août 2017 à 13:38 par Magazine En-Contact
Les 4 Fantastiques du marketing : #1 Anne-Claire Bellec, Eptica

Les grands diseux ne sont pas toujours les faiseux, me disait avec malice un ancien directeur général que j’ai cotôyé, issu de la région Nord.
Ceux que nous avons réunis pour notre photo de couverture (N°99, voir ci dessous) ne sont pas les seuls Fantastiques de notre industrie, qui en compte de nombreux, mais chacun à leur place, ils essaient de faire avancer le schmilblick, comme aurait dit Coluche. Ils sont parfois concurrents d’ailleurs, mais ont en commun 3 choses : nous avoir partagé leur point de vue sur l’expérience qu’ils vivent en boutique, qu’ils attendent, venir à La Baule en septembre et surtout, leur authenticité. Des professionnels du marketing qui parlent vrai, c’est rafraichissant et fantastique !

Anne-Claire Bellec, directrice marketing et communication d’Eptica – © Edouard Jacquinet

Episode 1 : les propos d’Anne-Claire Bellec, directrice marketing et communication d’Eptica.

Manuel Jacquinet : Qu’est-ce qui vous enchante, ou au contraire vous déçoit ou irrite en boutique en matière d’expérience client/shopping ?
Anne-Claire Bellec : Une expérience shopping réussie ? C’est un peu comme le moment relaxant du shampoing-massage chez son coiffeur préféré ! Un moment de plaisir éphémère… c’est possible en boutique mais à deux conditions : d’abord ressentir l’immersion dans un univers qui nous parle… puis se livrer à un échange qui relaxe, le temps de quelques essayages, une relation de conseil « vraie », ni surjouée, ni emphatique : le juste ton, à la fois expert et bienveillant du vendeur ou de la vendeuse qui vous comprend.
Shopper peu mais bien, c’est un peu la règle quand on vit à Paris à 37 ans avec 2 enfants et un job à temps plein. Cela se limite à trois ou quatre sorties shopping par an et dans des boutiques soigneusement sélectionnées, celles qui offrent justement ces deux conditions : univers identifiable et conversation. Je pense à FrenchTrotters dans le 11ème, Pollen dans le 19ème ou la Librairie L’Atelier dans le 20ème. Pour le reste : IT, équipement de running, jouets pour les enfants, j’achète en ligne !
A contrario, les boutiques standardisées ou les centres commerciaux démesurés, les environnements sur bondés et sans âme, l’anonymat, les files d’attentes, les vendeurs qui ne sont jamais les mêmes… en bref, tout ce qui se traduit par l’absence de conseil, de considération, d’attention, de personnalisation, et de compréhension, voilà tout ce qui est irritant dans le shopping ! Je ne me résous pas à fréquenter les centres commerciaux même s’il existe des promesses de prix plus bas. Ce qui n’est d’ailleurs pas toujours le cas.

Quels conseils donneriez-vous à des commerçants, à des e-marchands pour faire la différence sur l’expérience client ?
L’expérience passe par l’adhésion à des valeurs : une démarche et des convictions (par exemple, le souhait de s’approvisionner et de fabriquer dans telle ou telle région pour maintenir ou développer un savoir-faire), une proposition de valeur unique et différenciante (tenues urbaines simples et élégantes, par exemple). Ce sont selon moi les ingrédients de l’expérience client : l’immersion dans l’univers de marques de « niche » qui correspondent parfaitement à mes besoins.
Mon premier conseil pour les commerçants, c’est donc logiquement de créer cet univers en phase avec les besoins précis d’une catégorie bien ciblée et circonscrite de la population et de prendre soin de cette petite communauté. L’émergence des marques de niche est soutenue et encouragée par le digital. Elles sont souvent très présentes sur Instagram et quelques autres canaux pour prolonger l’expérience d’immersion dans la marque sur le digital en animant au quotidien la conversation avec les clients. L’agilité d’un My little Paris est sans doute l’exemple le plus probant.
Deuxième conseil, fusionner les expériences digitales et physiques. Trop de marques les gèrent séparément, créant des ruptures dans le parcours clients, ce qui agace profondément ! On entend partout parler de transformation digitale mais la plupart des marques ne se rendent pas compte encore de l’importance pour le client d’avoir la liberté de passer du digital à la boutique de manière fluide sans couture. Le meilleur exemple : vous consultez l’e-shop qui propose des promotions alléchantes mais impossible de les retrouver en magasin. En tant que consommateur, on fait les frais de ce genre de rupture de service car cela ne correspond pas à nos usages : faire une sélection de modèles online et pouvoir passer les essayer en boutique en cas de doute sur la taille, est-ce trop demander ? Surtout que ce passage de l’un à l’autre ouvre un champ d’opportunités non exploité, car il ne faut pas imaginer que les magasins physiques vont disparaître… il y a simplement un manque d’expérience sur la mise en œuvre de cette fusion et surtout d’imagination sur les opportunités business que cela pourrait générer, une multitude de nouveaux services pourraient voir le jour quand on y pense…

Rencontre avec Virginie Despentes à la Librairie l’Atelier (capture d’écran)

 

En vous fondant sur ce que vous entendez et constatez dans les entreprises que vous rencontrez et prospectez, quelle to do list leur écririez-vous ?
Plutôt qu’une to do list, ce qui me vient à l’esprit dans la continuité de ce que réalisent les marques de niche, c’est l’enjeu du Customer Experience Management ou la maîtrise parfaite de sa base de données : une vue unique du consommateur quels que soient les canaux, une capacité à analyser et croiser la donnée afin d’envisager les prochaines tendances, de comprendre ses consommateurs et de leur apporter des solutions personnalisées via des actions marketing « concrètes ».
Encore une fois, le grand apport du digital c’est la capacité de lire et de comprendre les goûts des consommateurs et de pouvoir développer les produits qui correspondent à ses attentes dans les délais les plus courts. Cela implique de mettre en place des nouveaux modèles collaboratifs en interne, dans les entreprises, afin d’accélérer les méthodes, de savoir penser petit, rapide, et efficace plutôt que d’imaginer gros tout de suite ou encore, de savoir lire la donnée et de s’y intéresser de manière plus attentive.
Utiliser notamment les technologies d’analyse de verbatim permet de détecter des signaux faibles dans les conversations entre individus et les marques… très utile pour comprendre et anticiper les attentes des clients.

Quel livre permet selon vous de réfléchir à ces sujets pendant l’été ? Pourquoi ?
Un livre ? Je suis plutôt roman… alors je mentionnerais un blog, celui de Jean-Luc Raymond, expert en marketing digital. J’ai bien aimé récemment son post sur la nouvelle « ère de l’assistance » qui pourrait, selon lui, remplacer celle des moteurs de recherche prochainement et bouleverser les pratiques de nos e-commerçants dans le monde entier. Une ère de la personnalisation de la relation avec le « mobinaute » (plus encore que l’internaute), celle du web vocal et sémantique (posez la question et l’on vous répond directement, on anticipe vos questions avec un système adaptatif qui apprend de vos habitudes avec le machine learning). Penser en termes de flux et non plus de destination. Le socionaute ne partira plus d’une situation A pour arriver à un point B. Grâce à l’information qu’on lui suggèrera, il pourra évoluer dans ses choix en permanence, et il sera en relation avec le produit ou le service à tout moment de sa vie. L’expérience client dans ce futur proche : faudra-t-il encore tout recommencer ?

Propos recueillis par Manuel Jacquinet

En-Contact N°99

Retrouvez les interview des 3 autres Fantastiques très prochainement (parues dans le numéro 99 d’En-Contact) :
Ombeline Blondel, directrice marketing et communication d’easiware, Ana Athayde, directrice du développement de Novagile et Frédéric Godefroy, président et fondateur de Sereneo.

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